Tous les bateaux sont confrontés au fouling, ce phénomène naturel de colonisation spontanée de la partie immergée de la coque par différents types d’organismes (bactéries, algues unicellulaires, algues vertes…). Il rend difficilement manœuvrables les bateaux et augmente la consommation de carburant de ceux fonctionnant à moteur. Pour retarder ce processus, la technique la plus couramment employée consiste à appliquer une peinture antifouling sur la carène. Celle-ci contient des biocides et se révèle donc nocive pour l’environnement. Son usage est d’ailleurs limité par des décrets. Face à ce problème, la société suédoise Rentunder AB a développé une solution alternative qui s’inspire des stations de lavage automobile.
Le procédé est purement mécanique et repose sur des balais-brosses, dont la rotation a pour action de retirer le fouling. Installé dans des ports, il se présente sous la forme d’un U avec des pontons flottants disposés sur trois côtés. Le bateau rentre par celui ouvert, puis une porte se ferme derrière lui, selon le même principe que les portes sectionnelles des garages automobiles. Des brosses horizontales viennent alors se positionner de chaque côté de la carène pour la nettoyer et s’adaptent automatiquement à sa forme. Ce procédé est adapté aux bateaux ne dépassant pas 6 mètres de long et un tirant d’eau (distance verticale entre la ligne de flottaison et le bas de la quille) de 2,4 m. Une brosse supplémentaire sert également à nettoyer la ligne de flottaison, et sous la coque, des brosses montées sur des vérins ont pour fonction de nettoyer la quille.
Un bassin de rétention se trouve positionné sous les brosses pour collecter les déchets qui sont ensuite pompés, puis filtrés, avant d’être évacués vers un centre de tri spécialisé. « Au départ, des éclats de peinture antifouling se détachent avec les organismes, mais l’objectif à terme est de ne plus utiliser de peinture et de nettoyer régulièrement la carène avec cette machine » explique Gaël Minier, Président de G&G Boatwash, la société qui importe cet équipement en France et dans plusieurs pays limitrophes.
La station de lavage peut s’adapter à la profondeur des ports
Cet équipement a remporté le concours d’innovation au dernier salon nautique de Paris dans la catégorie Service. Pour l’instant, une seule machine est installée en France, aux Sables-d’Olonne. Elle a d’abord été montée et testée en Suède, puis démontée pour être transportée sous la forme de module vers son lieu de destination. L’ensemble pèse un peu moins de 5 tonnes, et le transport est assuré à l’aide de deux semi-remorques ou deux containers. « Ce système de brossage est robuste et pèse 800 kg, ajoute Gaël Minier. La machine standard a un tirant d’eau de 3,2 m, mais il est possible de l’adapter selon les différentes profondeurs des ports. Les moteurs hydrauliques et les flexibles contiennent une huile biodégradable afin de ne pas polluer l’eau en cas de fuite. »
Ce procédé nécessite un nettoyage régulier de la carène, dont la fréquence dépend du type d’eau. Pour des bateaux navigants sur des lacs ou dans des eaux froides comme celles situées en Suède, il est nécessaire de laver la coque deux fois par an. Dans les eaux de la zone atlantique, le nettoyage doit être effectué entre 6 à 7 fois par an, et dans des eaux chaudes comme celles de Miami, il doit être réalisé tous les mois. Par contre, le procédé n’est pas adapté aux bateaux restés par exemple deux ans à l’eau et sur la coque desquels sont collés 100 kg de moules.
En dépit de la nécessité de ce nettoyage régulier, ce procédé se révèle malgré tout économique, selon Gaël Minier : « Il ne coûte pas plus cher que le coût de l’application d’une peinture antifouling réalisée par le propriétaire de son bateau, car il faut compter le grutage, le ponçage et la peinture. Et il coûte moins cher que la solution professionnelle d’application d’une peinture antifouling sur un chantier naval. » Aux Sables-d’Olonne, le lavage à l’unité coûte entre 40 à 210 euros selon la taille des bateaux, et il est possible de s’abonner à un nombre de nettoyages illimité à l’année pour un tarif démarrant à 300 euros, pour les bateaux mesurant 6 mètres, à 1 750 euros, pour ceux atteignant 16 mètres.
Ce nettoyage prend peu de temps, environ un quart d’heure. Il présente l’avantage de garder la coque des bateaux en permanence propre et permet ainsi de réaliser des économies de consommation de carburant. Actuellement, la machine est pilotée par un opérateur à l’aide d’une télécommande wi-fi, mais le fabricant suédois poursuit ses travaux de recherche et de développement pour rendre la station totalement autonome, à l’image des stations de lavage automobile.
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