Selon le dernier baromètre publié par le cabinet EY, près de la moitié des dirigeants internationaux ont réduit leurs investissements en France depuis juin 2024. En cause, le climat d'instabilité politique qui a suivi la dissolution de l'Assemblée nationale et qui provoque des incertitudes sur des sujets liés, entre autres, à la réglementation et à la fiscalité.
C’est un événement qui marque une rupture des investissements étrangers en France. Selon le dernier baromètre publié par le cabinet EY (Ernst & Young), la dissolution de l’Assemblée nationale a fortement dégradé l’attractivité de la France. Sur la base d’une enquête réalisée auprès de 200 dirigeants internationaux répartis dans 25 pays dans le monde, près de la moitié d’entre eux ont répondu avoir réduit leurs investissements depuis juin 2024, sans pour autant avoir l’intention de les annuler. Interrogés sur le sort de ces investissements non réalisés cette année, 84 % indiquent avoir reporté leurs décisions à 2025, voire aux années suivantes.
Ces investisseurs étrangers expliquent leur décision en premier lieu par les incertitudes législatives et réglementaires qui ont suivi la dissolution, notamment sur les sujets liés à la fiscalité des entreprises, ainsi que par la difficulté à établir des business plans. Le manque de stabilité politique du pays est devenu un handicap, puisque seulement 14 % la mentionnent comme un atout. Le ralentissement des réformes, les préoccupations sur la situation budgétaire et économique du pays, ainsi que le coût du travail sont les autres motifs évoqués.
Si plus de 60 % de ces dirigeants étrangers prévoient d’investir en France pour développer des activités de R&D ou de services d’ici à 2027, ils sont moins de la moitié à émettre l’hypothèse d’implanter ou d’agrandir leurs usines dans les trois prochaines années. Et à peine 15 % envisagent de développer des centres de décision en France.
Le Royaume-Uni, principal concurrent de la France en Europe dans les investissements dans la tech ou les sièges sociaux, pourrait être le premier bénéficiaire de la dégradation de l’attractivité de la France. Dans un contexte où l’Europe est menacée par le protectionnisme américain et les ambitions chinoises, 42 % des dirigeants jugent que ce pays a gagné en attractivité depuis six mois par rapport à la France. En plein marasme économique et confrontée elle aussi à une crise politique, l’Allemagne est quant à elle évaluée plus négativement que la France.
Un possible frein de la dynamique de réindustrialisation de la France
Près des deux tiers des dirigeants portent un regard encourageant, mais vigilant sur le potentiel du Vieux Continent. Et après six mois d’incertitudes politiques, ils sont 57 % à penser que l’attractivité de la France pourrait néanmoins s’améliorer au cours des douze prochains mois. L’Hexagone séduit toujours pour ses compétences, son potentiel d’innovation, ses infrastructures et son cadre d’investissement. Même s’il est encore trop tôt pour évaluer l’impact réel sur les montants étrangers investis en 2024 dans le pays, il est fort à craindre que le climat actuel marque un frein de la dynamique de réindustrialisation.
Plusieurs conditions sont évoquées par les dirigeants internationaux pour qu’ils développent leurs investissements en France. En premier lieu, ils souhaitent que soit prolongé l’effort de compétitivité et de visibilité engagé par le pays depuis 10 ans, notamment sur le plan fiscal, via des baisses des impôts de production. La réduction des dépenses publiques est également un axe sur lequel l’État français doit agir, selon eux, tout en mettant en place une politique d’évaluation de chaque ligne budgétaire. Ils jugent aussi important d’accélérer les délais et de simplifier les procédures d’autorisation d’implantation de sites industriels et de mise à disposition du foncier.
Ces investisseurs internationaux encouragent la France à poursuivre la réindustrialisation du pays et à stimuler l’investissement, via notamment le plan France 2030. Ils jugent également que la stratégie de décarbonation et de transition écologique du pays doit être menée de manière plus claire. Selon eux, les processus de cofinancement doivent être simplifiés, en s’inspirant des principes de l’IRA (Inflation Reduction Act) des États-Unis. Enfin, ils voient d’un bon œil les recommandations du rapport Draghi qui prône une union des marchés des capitaux et la coopération industrielle, ainsi que l’harmonisation des politiques européennes.
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