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Une nouvelle inflexion pour la chaleur renouvelable ?

Posté le par Stéphane SIGNORET dans Énergie

Le Plan de résilience annoncé mi-mars par le Gouvernement inclut un renforcement du soutien à la chaleur renouvelable. Emmanuel Macron réélu, le quinquennat écologique qu’il a promis ira-t-il encore plus loin, comme le souhaitent les professionnels ?

Une mauvaise habitude bien française a eu lieu lors du débat entre les deux tours de l’élection présidentielle : la question de l’énergie s’est irrémédiablement réduite au seul sujet de l’électricité. Pourtant, l’enjeu numéro 1 avec la décarbonation des transports est celui de la chaleur. Rien que dans le secteur résidentiel, la consommation de chauffage et d’eau chaude sanitaire dépasse de loin les autres usages, en particulier les besoins en électricité pour les équipements spécifiques (éclairage, électroménager, informatique, etc.). La part des énergies renouvelables est minoritaire et celle apportée par des réseaux de chaleur collectifs encore plus faible.

Cette figure montre que les besoins en chaleur (chauffage + eau chaude sanitaire) sont très importants dans le secteur résidentiel et encore largement dominés par les énergies fossiles. Source : SDES*

* SDES

La situation est paradoxale, car la France a de grandes ambitions en matière de chaleur renouvelable pour le résidentiel, le tertiaire et aussi l’industrie. La programmation pluriannuelle de l’énergie prévoit ainsi que la consommation de chaleur renouvelable, tous secteurs confondus, passe de 154 TWh en 2017 à 196 TWh en 2023 et autour de 230 TWh en 2028. Elle prévoit également que les réseaux de chaleur et de froid délivrent entre 32 et 38 TWh d’ici 2028, soit un doublement par rapport à 2017.

La chaleur renouvelable encore loin du compte

Ces ambitions sont soutenues de longue date par des dispositifs d’aide, en particulier le Fonds Chaleur. Avec 1,9 milliard d’euros entre 2009 et 2017, il a permis d’aider 4 300 opérations. Mais on est loin du compte pour tenir le rythme nécessaire à la transition énergétique. Les professionnels de la chaleur renouvelable demandent depuis longtemps un renforcement du Fonds pour accélérer le recours aux réseaux urbains ou industriels de chaleur/froid et aux sources renouvelables et de récupération (biomasse, géothermie, biogaz, valorisation des déchets, solaire thermique, chaleur fatale industrielle, etc.). Une première révision par les pouvoirs publics, sur la période 2020-2022, a permis de porter le Fonds Chaleur à environ 340 millions d’euros par an. Le Plan de résilience annoncé en mars dernier incluait une enveloppe supplémentaire de 150 M€ en 2022.

« Cette nouvelle hausse des soutiens financiers du Fonds Chaleur est bienvenue pour faire sortir les projets étant déjà dans les tiroirs, explique Pierre de Montlivault, président de la Fedene, la fédération des services énergie environnement. C’est une mesure de court terme qui a son importance, avec toutes les mesures d’économies d’énergie qui doivent nous permettre de diminuer notre dépendance au gaz russe, afin de passer sereinement l’hiver prochain. Mais il y a aussi besoin de lancer des mesures de long terme pour tripler le rythme, comme notre fédération l’a détaillé dans son vade-mecum ». Les professionnels rappellent la promesse du candidat Macron de porter le Fonds Chaleur à plus de 700 M€ par an, et ajoutent que pour tenir les objectifs nationaux, un montant d’un milliard d’euros par an est à viser.

Le développement des réseaux de chaleur est en ce sens une priorité, notamment pour les collectivités et entreprises qui se retrouvent avec des factures d’énergie multipliée par deux ou trois, voire plus, à cause de la hausse du prix du gaz et de l’électricité. Les acteurs ne manquent pas d’idées : dans une tribune récente, ils ont proposé que les immeubles à proximité d’un réseau existant puissent être rapidement raccordés grâce à un soutien public qui laisserait un reste à charge de seulement 100 euros par logement. La Fedene a aussi mené une étude qui lui a permis d’identifier 1 300 villes suffisamment denses en habitations et bureaux pour accueillir un nouveau réseau de chaleur. « L’Ademe pourrait lancer un appel à projets pour ces 1 300 réseaux urbains à créer, ciblé sur les collectivités de moins de 50 000 habitants. Ce serait très efficace, à l’image de ce qui a été fait pour France Relance », complète Pierre de Montlivault.

Accélérer les dynamiques locales

Installer un nouveau réseau de chaleur prend quelques mois ou années selon sa taille, mais permet aux collectivités de s’inscrire dans un temps long pour planifier l’accès aux ressources énergétiques. « Il faut s’écarter du gaz, et l’électricité n’est pas une valeur refuge : les pouvoirs publics ont tout à gagner à promouvoir la chaleur renouvelable et les réseaux. On pourrait même imaginer un service universel de la chaleur », affirme Nicolas Garnier, délégué général d’Amorce, un réseau de collectivités et d’acteurs locaux sur la transition énergétique. Parmi les autres pistes allant dans le sens de l’accélération souhaitée et d’une mobilisation dans la durée, il indique qu’on pourrait dès maintenant encourager les collectivités (via une étude de faisabilité soutenue à 80 %) à réaliser un plan territorial chaleur tel que l’Union européenne le prévoit dans son paquet « Fit for 55 ».

La mise en place d’un maillage de développeurs spécialisés dans les réseaux de chaleur, à l’échelle départementale, permettrait de dynamiser l’intérêt des collectivités et entreprises. Enfin, des mécanismes facilitant l’accès au Fonds Chaleur et sécurisant les projets en cas de rechute du prix du gaz (forfait d’aide automatique pour des niveaux de production plus élevés qu’actuellement, fonds assurantiels, etc.) ainsi qu’un véritable plan de développement de la chaleur fatale et de valorisation énergétique des déchets aideraient la France à sortir enfin de son tropisme électrique !

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Posté le par Stéphane SIGNORET


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