Décryptage

Une nouvelle filière de matériaux thermoplastiques en développement

Posté le 3 mars 2020
par Nicolas LOUIS
dans Chimie et Biotech

De la production des matières premières jusqu'au contrôle de la qualité, plusieurs entreprises et deux laboratoires du CNRS se sont regroupés pour concevoir des matériaux thermoplastiques. Objectif : augmenter les cadences de fabrication des pièces pour réduire les coûts.

Légers, faciles à travailler, recyclables, les atouts des matériaux thermoplastiques sont nombreux. Afin de développer leurs applications, le projet HAICoPAS (Highly automatized integrated composites for performing adaptable structures) a pour objectif de créer une nouvelle filière allant de la production des matières premières jusqu’au contrôle de la qualité des pièces. Il réunit deux industriels qui fourniront les deux matériaux de ces composites : Hexcel pour les fibres de carbone et Arkema pour les polymères. Plusieurs petites et moyennes entreprises très qualifiées et reconnues pour leur expertise dans le domaine des équipements et des procédés de production sont également associées au projet ainsi que deux laboratoires du CNRS.

Ces thermoplastiques seront principalement destinés aux industries de l’aéronautique et de l’automobile ainsi qu’à celles du pétrole et du gaz. Dans les avions, ces matériaux sont jusqu’ici uniquement présents à l’intérieur des appareils. L’objectif à terme est de fabriquer des pièces composant la structure extérieure comme les ailes ou le fuselage. Le but est d’alléger les avions afin de réduire leur consommation de carburant mais surtout d’augmenter les cadences de fabrication des pièces afin de baisser les coûts de production. Car contrairement aux matériaux thermodurcissables, nul besoin d’autoclave à haute température et sous haute pression pour fabriquer des pièces composites à matrice thermoplastique. Il suffit de les chauffer puis de les laisser se refroidir afin qu’elles se solidifient à nouveau. Le phénomène est en plus réversible.

Étudier la durabilité des matériaux

Sur le plan de la recherche, plusieurs questions liées à la physique des matériaux vont être soulevées. Les composites utilisés sont des nappes constituées de fines bandes unidirectionnelles de fibres de carbone pré-imprégnées de polymère thermoplastique. « Nous cherchons à comprendre comment le polymère va se fondre et se cristalliser avec la fibre, explique Ilias Iliopoulos, directeur de recherche au laboratoire Procédés et ingénierie en mécanique et matériaux qui est associé au consortium HAICoPAS. Nous allons aussi étudier la durabilité de ces matériaux dans un environnement agressif comme par exemple en présence de pluie, de carburant… ». Un travail de recherche sur les procédés de mise en forme des pièces à hautes cadences va aussi être réalisé. Les nappes seront chauffées par laser jusqu’à des températures pouvant avoisiner 400 degrés avec des vitesses de fabrication pouvant atteindre le mètre par seconde. « Nous allons mesurer et modéliser les évolutions de températures lors du chauffage puis du refroidissement », complète Nicolas Boyard, chargé de recherche au Laboratoire de thermique et énergie de Nantes, également partenaire de HAICoPAS.

Des lignes de production robotisées

En plus de la constitution de ces pièces thermoplastiques, il est aussi question d’étudier le soudage des pièces entre elles. Contrairement à d’autres matériaux comme les métaux, il n’est pas nécessaire de les percer puis d’utiliser des rivets pour les assembler. « Il faut être capable de les chauffer localement en veillant à ne pas chauffer trop profondément afin d’éviter toute déconsolidation des pièces. Là encore, nous allons étudier ce phénomène du point de vue des transferts thermiques », ajoute Nicolas Boyard.

Initié en 2019 et d’une durée de quatre ans, le projet HAICoPAS a reçu un soutien financier de 6 millions d’euros en tant que Projet de recherche et de développement structurant pour la Compétitivité (PSPC) dans le cadre du Programme d’investissements d’avenir (PIA). Le budget global s’élève à 13,5 millions d’euros. A terme, de nouvelles lignes de production robotisées et d’assemblage des pièces composites doivent sortir de terre. Une fois utilisés, les thermoplastiques présentent l’avantage d’être plus facilement recyclables, ce qui devrait contribuer à les fabriquer à des prix compétitifs. L’aptitude au recyclage et les bénéfices environnementaux apportés seront étudiés dans le cadre de ce projet.


Pour aller plus loin