Peu coûteuses et autonomes, ces « feuilles artificielles » pourraient aussi alimenter en carburant des îles éloignées et éviter l’évaporation de l’eau des canaux d’irrigation.
Les carburants solaires : utiliser la photosynthèse pour produire des carburants
Si la production de carburant synthétique à partir des rayons du soleil n’est pas une idée nouvelle, le développement de ces technologies semble s’accélérer. Les projets se multiplient et certaines technologies arrivent à maturité, à l’image du projet européen SUN-to-LIQUID. Celui-ci a ainsi abouti à la production de kérosène synthétique à partir de CO2, d’eau et d’énergie solaire et la première usine de production industrielle du monde devrait voir le jour en 2023.
Cependant, le développement de telles technologies ne doit pas se faire au détriment des terres agricoles qui sont déjà menacées par certains projets de fermes solaires photovoltaïques, pour des raisons de rentabilité.
Pour ce qui est de la production de carburant solaire, l’une des solutions serait alors d’imaginer des dispositifs flottants sur l’eau, ce qui permettrait d’éviter la multiplication de fermes au sol.
Défi : réduire au maximum le poids de ces dispositifs photoélectrochimiques pour les rendre flottants
Cela fait plusieurs années que l’équipe du professeur Erwin Reisner de Cambridge travaille sur le sujet des carburants solaires. En 2019, ils ont ainsi mis au point un prototype de feuille artificielle. Néanmoins, ce dispositif constitué de substrats en verre épais et de revêtements de protection contre l’humidité avait l’inconvénient d’être lourd et volumineux.
Dans un communiqué de presse, le Dr Virgil Andrei, du département de chimie Yusuf Hamied de Cambridge et co-auteur principal de l’étude, l’affirme : « Les feuilles artificielles pourraient réduire considérablement le coût de la production de carburant durable, mais comme elles sont à la fois lourdes et fragiles, il est difficile de les produire à grande échelle et de les transporter. »
Le Dr Reisner a ensuite ajouté : « Nous voulions voir dans quelle mesure nous pouvions réduire les matériaux utilisés par ces dispositifs sans affecter leurs performances.
Si nous parvenons à réduire suffisamment les matériaux pour qu’ils soient assez légers pour flotter, cela ouvre la voie à de toutes nouvelles possibilités d’utilisation de ces feuilles artificielles. »
Pour les chercheurs, trouver un moyen de déposer des absorbeurs de lumière sur des substrats légers constituait ainsi un défi d’autant plus grand qu’il fallait également les protéger contre les infiltrations d’eau. Pour la nouvelle version de leur feuille artificielle, les chercheurs se sont alors inspirés des techniques de miniaturisation de l’industrie électronique.
L’étude publiée dans Nature présente le processus employé. L’équipe a utilisé des oxydes métalliques en couches minces et des matériaux de type pérovskites, qui ont été déposés sur des feuilles de plastique et de métal flexibles. Les dispositifs ont ensuite été recouverts de couches de carbone hydrofuges de l’ordre du micromètre afin d’empêcher la dégradation par l’humidité. Au final, ils ont obtenu un dispositif qui, non seulement, fonctionne, mais ressemble aussi à une vraie feuille.
Des dispositifs compatibles avec les techniques de fabrication modernes
Cette étude a permis de démontrer que les feuilles artificielles sont compatibles avec les techniques de fabrication modernes, ce qui représente une première étape vers l’automatisation et la mise à l’échelle de la production de combustible solaire.
Des améliorations seront bien entendu nécessaires avant d’arriver au stade du développement commercial, mais les chercheurs imaginent déjà des applications, comme l’alimentation en carburant d’établissements côtiers, d’îles éloignées ou encore de bassins industriels.
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