En rade de Brest, l'Ifremer va tester une digue à énergie positive qui capte l'énergie mécanique de la houle pour la transformer en électricité. Comparé à d'autres systèmes, ce nouveau concept semble plus robuste pour faire face notamment aux tempêtes.
Avec le changement climatique et la hausse du niveau de la mer, il est fort probable que le nombre de digues soit amené à augmenter dans les décennies à venir. Sur son site expérimental de Sainte-Anne du Portzic en rade de Brest, l’Ifremer va tester une nouvelle digue qui, en plus d’assurer sa fonction première de protection du littoral, produit de l’électricité. Ce concept, appelé Dikwe, a été mis au point par Geps Techno, une entreprise qui conçoit des solutions innovantes pour la récupération d’énergies marines, et le Groupe Legendre, spécialisé notamment dans les travaux publics. Après avoir été validé dans le bassin d’essais océanique de l’Ifremer à l’échelle 1/15, le développement de cette digue à énergie positive va se poursuivre durant 12 mois à l’échelle 1/4.
L’installation se présente sous la forme d’une vaste chambre de 4 mètres de haut, 4 mètres de large et 6 mètres de profondeur. La largeur faisant face à la mer est équipée d’un volet qui oscille autour d’un axe horizontal à chaque fois qu’une vague vient le percuter. Et sur cet axe, vient se greffer un système de captation de l’énergie mécanique pour produire de l’électricité, via un mécanisme de conversion appelé PTO (Power Take Off).
Dans le passé, de nombreux dispositifs de captation de l’énergie des vagues ont été développés, mais un grand nombre n’a pas résisté aux tempêtes. Comparé aux systèmes à colonne d’eau oscillante, le concept Dikwe semble plus robuste selon Marc Le Boulluec, ingénieur en hydrodynamique à l’Ifremer. « Les colonnes d’eau oscillante se présentent sous la forme d’un grand tuyau en partie immergé, dans lequel les vagues compriment l’air présent dans la partie supérieure du tuyau et qui permet d’alimenter une turbine. La difficulté est qu’il est nécessaire d’utiliser des turbines spéciales capables de fonctionner avec un flux d’air oscillant. L’avantage du système Dikwe est qu’il est directement impacté par les vagues. L’un des enjeux de ce nouvel essai va être de tester sa résistance. »
Afin de faire face à l’énergie mécanique de la houle, le système comporte en plus une sorte de jupe qui démarre de la base du volet et remonte en arrière vers la partie supérieure de la digue. Son rôle est d’amortir l’énergie résiduelle des vagues non absorbée par le volet. À l’image d’une plage fortement inclinée, cette jupe permet aux vagues de venir y mourir.
Un rendement attendu d’environ 50 %
Le système sera tributaire de la marée. En Bretagne, le marnage, c’est-à-dire la différence de hauteur d’eau entre la marée haute et basse, est d’environ six mètres. Sur le site expérimental, les scientifiques ont calculé qu’à mi-marée, le volet de la digue sera hors d’eau ou les pieds dans l’eau, et qu’à marée haute, le système pourra être totalement immergé. Entre ces deux niveaux, il fonctionnera et devrait développer une puissance de l’ordre du kilowatt pour un rendement d’environ 50 %, mais à préciser au cours de cette expérimentation.
En plus de sa résistance, il est également prévu d’étudier l’effet de cette digue sur les éventuels transports sédimentaires dans le fond marin. « À l’intérieur du système, nous allons aussi observer s’il est colonisé par des algues ou des animaux qui ont trouvé là un nouvel habitacle, ajoute le chercheur. Des tests d’antifouling, c’est-à-dire de peintures spéciales capables de lutter contre la prolifération des algues, pourront aussi être menés. Il ne faudrait pas que le système soit encroûté et qu’au bout d’un an, il perde en efficacité. »
En fonction des résultats de cette expérimentation, des essais grandeur nature sur une digue déjà existante en Bretagne pourraient ensuite démarrer. Cette fois-ci, la puissance développée serait de l’ordre du mégawatt. Ces essais dureraient plusieurs années et pourraient amener ce concept à un degré de maturité technologique de 7 TRL (Technology Readiness Level) sur une échelle de 9. Une commercialisation de cette nouvelle digue à énergie positive pourrait ensuite voir le jour à l’horizon 2024.
Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE