Cette découverte est importante, car elle permet de mieux comprendre la coévolution des virus de plantes avec leurs insectes vecteurs, un élément essentiel pour réduire les impacts des épidémies provoquées par ces virus sur les productions agricoles.
Un virus qui cible uniquement les mâles
Le fait que le dimorphisme des ailes des insectes vecteurs soit un facteur déterminant pour la dispersion des virus sur de longues distances et de grandes surfaces est un phénomène connu.
En revanche, si les effets de ces virus sur la plasticité des ailes le sont aussi, les mécanismes moléculaires qui sont à l’œuvre demeurent mal compris.
Dans une étude publiée récemment dans la revue PNAS, une équipe de chercheurs chinois[1] explique le mécanisme par lequel le virus de la rayure du riz (aussi appelé striure du riz, ou encore RSV), très répandu en Asie, modifie directement la taille des ailes de Laodelphax striatellus, un insecte de la famille des Delphacidae.
Ils ont notamment découvert une particularité : le RSV induit exclusivement des modifications sur les ailes des individus mâles. Quelle en est la cause ? Un gène régulateur du développement des ailes, nommé « Encounter » qui agit, au stade larvaire, sur la transduction de l’insuline et qui est fortement exprimé chez les mâles infectés.
Les virus, pas toujours ennemis et parfois vecteurs d’évolution
Outre les applications directes en phytopathologie et en agriculture, cette étude nous rappelle à quel point ces concentrés de matériel génétique et de protéines que sont les virus sont trop souvent mal compris. Selon une autre étude, au moins 1,7 million de virus encore inconnus seraient d’ailleurs présents dans la nature !
Il faut aussi savoir que si les virus sont des parasites intracellulaires qui utilisent le matériel génétique d’une cellule pour se répliquer, leurs effets ne sont pas forcément néfastes. On peut même affirmer qu’ils jouent un rôle majeur dans le processus d’évolution.
En effet, on sait qu’après avoir infecté une cellule, certains virus sont capables de se mettre en sommeil ou même d’intégrer leur génome à celui de la cellule. Dans le génome humain, il y aurait environ 500 000 génomes rétroviraux, acquis il y a plus de 150 000 ans. Si la plupart de ces gènes d’origine virale ne s’expriment plus aujourd’hui, certaines séquences jouent encore un rôle majeur dans nos vies. C’est notamment le cas d’une protéine d’enveloppe virale présente dans un tissu du placenta et qui rend possibles les échanges entre le sang de la mère et celui du fœtus, rien que ça !
Pour en revenir aux végétaux, il a aussi été prouvé que certains virus de plantes qualifiés de persistants étaient bénéfiques pour la plante. Par exemple, la présence d’un partitivirus persistant chez le poivron limite la propagation d’un virus pathogène appelé mosaïque du concombre. Et parfois, par accident, cette présence de virus persistants conduit même à une intégration dans le génome végétal.
Il nous reste énormément à apprendre de l’étude des virus et de leurs interactions avec le vivant. Il est certain que les années à venir seront riches en enseignements !
[1] University of Chinese Academy of Sciences et Institute of Zoology (Chinese Academy of Sciences)
Dans l'actualité
- Détecter des anomalies génétiques dans la filière bovine pour mieux les prévenir
- Plantes NTG : les discussions avancent au niveau européen
- V4Cure : du venin de serpent comme source d’inspiration pour des médicaments
- Les thèses du mois : « Santé : les ambitions françaises pour 2030 »
- BGene Genetics œuvre pour une cosmétique plus vertueuse
- Qista, une start-up française contre les moustiques
Dans les ressources documentaires