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Un robot qui vole comme un oiseau

Posté le 27 novembre 2024
par Romain FOUCHARD
dans Chimie et Biotech

Quelle innovation biotechnologique ne doit-on pas rater en novembre ? Un robot bio-hybride capable de naviguer dans l'atmosphère à la manière des oiseaux planeurs...

Les oiseaux planeurs ne disposent pas de queue verticale pouvant jouer le rôle de gouvernail. Pourtant, leur vol reste stable en dépit des turbulences. Et ce, sans même avoir besoin de battre des ailes pour ajuster leur direction. Au contraire, les avions actuels possèdent (presque) tous une surface verticale à l’arrière de la carlingue : la dérive. Sa présence sert à limiter les risques d’embardées et à amortir le phénomène dit du « roulis hollandais ». Ce dernier prend la forme d’un mouvement oscillatoire en lacet rendant instable la conduite de l’appareil. Des scientifiques de l’université Stanford (Stanford, États-Unis) et de l’université de Groningue (Groningue, Pays-Bas) ont donc cherché à comprendre comment les oiseaux procédaient pour garder leur assiette en toute circonstance, avec dans l’optique que leur travail puisse mener à des aéronefs mieux adaptés au vol.

Un robot à la croisée de l’avion et du pigeon

Le premier auteur de la recherche parue le 20 novembre 2024 dans le journal Science Robotics est Eric Chang, de l’université Stanford. Lors de ce travail, il a pu compter sur l’aide de Diana Chin, de la même structure, et de David Lentink, de l’université de Groningue. L’équipe n’est pas partie de rien puisqu’elle s’est en grande partie appuyée sur une hypothèse avancée par le biologiste allemand Franz Groebbels en 1929. Celui-ci estimait que les oiseaux planeurs devaient voler comme des « avions automatiques », en usant de réflexes neuromusculaires au niveau des ailes et de la queue. Une solution inapplicable aux avions actuels, dont les ailes et la queue ne peuvent pas se déformer à la manière de celles des oiseaux. Eric Chang et ses deux collègues se sont donc mis en tête de fabriquer leur propre engin inspiré des oiseaux : le PigeonBot II.

Le robot bio-hybride développé par les scientifiques consiste en un squelette biomimétique pourvu de ligaments élastiques associés aux plumes des ailes et de la queue. PigeonBot II possède ainsi vingt rémiges – de grandes plumes rigides – sur chacune de ses ailes, et douze autres plumes sur la queue. Toutes sont vraies et proviennent de l’espèce Columba livia (le Pigeon biset). Les quarante rémiges des ailes sont actionnées avec quatre servomoteurs, et les plumes de la queue avec cinq autres de ces servomoteurs. La masse totale du robot avoisine celle d’un pigeon réel (environ 300 grammes) et s’appuie sur deux petits propulseurs – un à chaque poignet – pour s’envoler. Le point critique de l’étude consistait à mettre au point un contrôleur de réflexe adaptatif, capable de mimer la réaction instinctive des oiseaux. Pour ce faire, l’équipe de recherche a placé son PigeonBot II dans un tunnel à vent de 1*0,82*1,73 mètre, où ils l’ont soumis à une vitesse de vent de 10 m/s. Une fois le contrôleur entraîné à réduire les perturbations turbulentes, le robot a pu être lâché en extérieur, volant en autonomie en prenant des poses typiques d’un véritable pigeon. Les résultats viennent donc corroborer l’idée vieille de près d’un siècle de Franz Groebbels, et pourraient inspirer à l’avenir la conception d’aéronefs sans gouvernail à l’efficacité et à la manœuvrabilité grandement améliorées.


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