Les systèmes sollicitant une IA (Intelligence artificielle) sont très énergivores. Pour fonctionner, ils ont besoin d’importantes capacités de calcul afin de s’entraîner sur des milliards de données, ce qui nécessite des serveurs puissants. Une requête à ChatGPT nécessite par exemple 10 fois plus d’énergie en moyenne qu’une simple recherche sur Google. Selon l’AIE (Agence internationale de l’énergie), la consommation électrique mondiale des secteurs de l’IA et des datacenters pourrait plus que doubler en 2026, comparée à 2022, et atteindre 1 050 Twh (térawattheure), soit l’équivalent de la consommation électrique du Japon.
Sur une initiative d’Ecolab, le laboratoire de l’innovation du Commissariat Général du Développement Durable (CGDD), l’Association française de normalisation (AFNOR) vient de publier une méthodologie pour évaluer l’effet d’un service d’IA sur l’environnement. En plus de fournir un premier référentiel opérationnel pour quantifier son impact, le document vise à fournir des clés pour éviter les pièges et aller dans le sens d’une IA frugale.
La méthode a été élaborée selon une approche globale, c’est-à-dire qu’elle couvre toutes les ressources numériques mobilisées pour permettre de délivrer le service. À commencer par les centres de données (serveurs, baies de stockage, équipement réseau) qui permettent l’hébergement et le traitement des données numériques. Viennent ensuite les infrastructures réseaux qui assurent la transmission des données vers les utilisateurs. Et enfin les terminaux (smartphones, ordinateurs, téléviseurs, autres) dont le rôle est l’exploitation, la réception et la consultation des contenus.
L’ensemble du cycle de vie d’un système est pris en compte, depuis sa conception jusqu’à sa mise en service, en passant par son développement. Plusieurs indicateurs environnementaux sont inclus, parmi lesquels l’épuisement des ressources naturelles (minéraux et métaux), de même que celles en eau, car d’importantes quantités sont nécessaires pour réguler la température à l’intérieur des datacenters.
L’IA ne doit pas devenir une réponse systématique à tous les besoins
Outre les effets directs, les impacts indirects sont également évalués, par exemple celui appelé « effet rebond » qui prend en considération cette situation : quand l’efficience d’une IA la rend moins coûteuse et plus facile à embarquer, son utilisation peut augmenter et au final, son impact environnemental sera plus important. Ou encore, l’effet d’obsolescence lié au renouvellement accéléré d’un système d’IA suite à l’arrivée d’une nouvelle génération de service numérique.
Le référentiel propose aussi un ensemble de bonnes pratiques à adopter pour tendre vers un système d’IA frugale. Il est notamment recommandé de choisir et de développer une solution pour répondre spécifiquement à un besoin, en considérant également toutes les alternatives à l’IA. Cette dernière ne doit pas devenir une réponse systématique et doit avant tout être considérée comme « un type de solution dont l’intérêt et l’impact doivent être évalués et comparés à d’autres solutions plus classiques pour identifier la solution la plus pertinente, notamment sur le plan environnemental », recommandent les auteurs de ce guide.
Pour tendre vers plus de frugalité, il est aussi possible de réutiliser des algorithmes déjà entraînés puisque de nombreuses plateformes de modèles en Open Source existent et permettent de facilement trouver des modèles déjà opérationnels sur des tâches spécifiques. Il est également possible de partager ses modèles au sein de la communauté et de les rendre accessibles, par exemple via la plateforme HuggingFace.
La compression de données est également une solution à retenir, puisque diminuer le volume de stockage est un facteur de réduction de la consommation énergétique. Cette stratégie peut être appliquée lorsque les algorithmes d’IA n’utilisent qu’une partie des données ou une version dégradée de celles-ci, par exemple une image en plus basse résolution que celle stockée. De la même manière, « après la mise hors service d’un service d’IA, si la suppression des données n’est pas envisageable, les compresser peut être un compromis intéressant entre le fait de capitaliser sur les données d’exploitation du service et le fait de garder une approche frugale. »
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