On peut se demander si les scientifiques du Centre d’élaboration de matériaux et d’études structurales (CEMES, CNRS) et de l’Université d’Ohio n’ont pas abusé des meccano® quand ils étaient enfants. En tout cas, leur passion pour les jeux de construction motorisés les a conduit à repousser les limites de l’infiniment petit en construisant un moteur nanométrique. Ils ont ensuite mis au point une technique pour maîtriser la rotation du rotor, dépassant pour la première fois la taille limite inférieure pour un dispositif convertissant énergie électrique en énergie mécanique.
Le nano-moteur comporte trois parties distinctes : le stator, du ruthénium et le rotor. Le stator permet d’accrocher le moteur à une surface d’or. A son extrémité, un atome de ruthénium sert de rotule sur laquelle se fixe le rotor moléculaire. Celui-ci compte cinq pales. Au total, la molécule- moteur comporte moins de 200 atomes mais nécessite quinze étapes pour être synthétisé. Un procédé qui a donné du fil à retordre aux chercheurs à qui il aura fallu près de 10 ans d’effort pour le mettre au point.
Mais toute cette sueur aura finalement été utile. En plaçant la molécule à une température glaciale de -268.5°C sur la surface d’or, ils réussissent à activer le mouvement des pales en délivrant des électrons via la pointe d’un microscope à effet tunnel. Ce dernier joue donc deux rôles, celui de source d’énergie et d’instrument d’observation. Le contrôle du sens de rotation se fait en choisissant la pale du rotor sur laquelle est positionnée la pointe du rotor. Cela nécessite une précision dans le pointage de l’ordre du dixième de nanomètre.
Ces travaux ont été publiés dans le numéro de janvier de Nature Nanotechnologies.
Par Audrey Loubens