Plus qu’un simple matériau, c’est plutôt tout un système qui a été conçu par des chercheurs du MIT et de l’université de Californie à Riverside. Il se compose d’un gel formant une matrice, qui contient un polymère (aminopropyl methacrylamide – APMA), une enzyme oxydoréductase du glucose (la glucose oxydase – Gox) et des chloroplastes extraits de feuilles d’épinards, stabilisés par des nanoparticules de céria (dioxyde de cérium).
Imiter la photosynthèse
Au contact du CO2 de l’air et de la lumière, les chloroplastes, qui ne sont pas vivants, catalysent la réaction produisant du glucose à partir du dioxyde de carbone. Ce glucose est transformé en gluconolactone (GL) par la glucose oxydase et ensuite polymérisé avec l’APMA, formant ainsi un polymère de polymethacrylamide qui s’étend et se renforce en continu. La vitesse moyenne de croissance a été mesurée à 60µm3/h par chloroplaste avec un éclairage de 18h et un taux de CO2 ambiant. L’épaississement présente un module de cisaillement de 3kPa. Le matériau, qui se présente sous une forme liquide, durcit et grandit avec le temps jusqu’à former un corps solide. Le matériau a démontré, lors des expériences menées par les chercheurs, une capacité d’auto-cicatrisation, comblant les fissures avec la nouvelle matière produite. Ces travaux, publiés dans la revue Advanced Materials, sont une preuve de concept et pourraient constituer la première étape d’une nouvelle classe de matériaux capables de fixer le CO2 pour se régénérer.
Auto-réparation autonome
L’utilisation des chloroplastes n’est pas un aboutissement en soi. En fait, les chloroplastes isolés sont plutôt instables et arrêtent de fonctionner rapidement après quelques heures quand ils sont hors d’une plante. Dans leurs travaux, le professeur Michael Strano et ses collèges ont trouvé des méthodes pour accroître significativement la durée de vie fonctionnelle de ces chloroplastes, notamment en les stabilisant avec des nanoparticules de dioxyde de cérium. Dans les prochaines recherches, ils devraient remplacer ces chloroplastes par des catalyseurs non biologiques. Un des avantages potentiels de ce genre de matériau est que la capacité d’auto-réparation se fait d’elle-même, en conditions ambiantes, contrairement à la plupart des autres solutions développées aujourd’hui qui nécessitent un activateur externe (chaleur, UV, pression, agent chimique…).
Sophie Hoguin
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