La cogénération consiste à produire conjointement de l'électricité et de la chaleur destinée à un procédé industriel ou au chauffage urbain, afin d'améliorer le rendement global de ces opérations. Malgré des économies d’énergie réelles, le secteur voit rouge.
En France, il existe environ 800 installations de cogénération pour une puissance électrique installée de 5 000 MW. Elles produisent en moyenne 16 TWh d’électricité et 22 TWh de chaleur. Ces installations ont été lancées entre 1997 et 2001 pour un investissement total d’environ 5 milliards d’euros. Elles ont bénéficié d’une obligation d’achat sur 12 ans qui se termine donc entre 2009 et 2013.
« En France, la situation n’est pas au développement de la cogénération, mais à sa disparition progressive », révèle Jean-Claude Boncorps, Président de Fédération des Services Energie Environnement (Fedene).
Les installations de plus de 12 MW, représentant une capacité totale de 2 800 MW, ne pourront pas repartir sur un tarif d’obligation d’achat. Elles pourront cependant vendre leur production sur le marché, mais à des prix non rentables. Certaines installations sont déjà en cours de démantèlement.
Les installations de moins de 12 MW, représentant un total de 2 200 MW, pourraient repartir en obligation d’achat. Malgré des opérations récentes de rénovation, une remise en cause des conditions de rémunération des obligations d’achat et un manque de visibilité complet noircissent le tableau.
« A priori, la situation devrait se dégrader très sensiblement ; nous ne sommes donc pas certains de pouvoir continuer à fonctionner avec des cogénérations à des conditions économiques viables », analyse Jean-Claude Boncorps.
« Aujourd’hui, il y a un frein au développement de la cogénération, mais il y a surtout une disparition progressive d’installations performantes qui ont permis d’économiser 1,7 millions de tep par an et une réduction des émissions de CO2 de 9 millions de tonnes par an, du fait qu’elles se substituent à des centrales moins performantes », insiste-t-il.
Quel est le mix énergétique de la cogénération ?
Avec des centrales nucléaires, on ne fait que très rarement de la cogénération. On chauffera à un endroit des serres pour tenter de montrer sa bonne foi.
Toutefois, de façon générale, la cogénération ne se fait pas avec le nucléaire, car les centrales sont trop éloignées des centres de consommation. Les pertes sur le réseau et son coût seraient trop importants.
D’après le bilan électrique 2012 de RTE en France, le mix électrique est très particulier. Avec plus de 75 % d’électricité d’origine nucléaire et 12 % d’hydraulique, il ne reste que 9 % pour les centrales thermiques.
Dans ces circonstances, il n’y a quasiment aucune centrale thermique classique gérée par EDF équipée de cogénération. Dans d’autres pays d’Europe, sans nucléaire, la moitié des centrales peut pourtant en être équipée.
En France, les installations de cogénération sont donc décentralisées. Elles peuvent fournir de la chaleur alimentant des réseaux de chaleur ou des chaufferies, desservant principalement des logements sociaux, des hôpitaux, des copropriétés, des universités ou des industries.
Elles fonctionnent à 90 % au gaz. Les cogénérations avec du charbon ou de la biomasse restent relativement marginales.
La cogénération et les réseaux de chaleur
Sur les 458 réseaux de chaleur en fonctionnement en France en 2011, 204 réseaux (pour environ 235 installations de cogénération) sont équipés de cogénération dans 190 villes.
Ils permettent de produire 4,5 TWh d’électricité en complément de la chaleur qu’ils délivrent. En 2011, la chaleur issue de gaz venant de cogénération représentait 21 % de la chaleur totale des réseaux de chaleur.
Le reste provenait à 36 % d’énergies renouvelables ou de récupération, à 22 % de gaz sans cogénération, 6 % de fiouls, 8 % de charbon et 7 % d’autres énergies.
La situation n’est pas bonne. Pourtant la cogénération permet un rendement de 80 %. Avec le mix énergétique français actuel, à production d’électricité et de chaleur égale, la cogénération permet une économie de 15 % d’énergie primaire.
Dans le cadre du débat national sur la transition énergétique, ne devrait-on pas lui redonner ses lettres de noblesse plutôt que de la condamner ?
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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