Pas de paradoxe temporel à l’horizon, mais une perception tout ce qu’il y a de plus subjective du temps qui nous sépare d’un évènement. C’est ce que révèle une étude menée par Eugène Caruso, professeur associé de sciences comportementales de la Booth School of Business de l’université de Chicago publiée dans Psychological Science.
Le postulat de base de l’étude est que nous nous croyons plus proches des objets vers lesquels nous nous dirigeons que de ceux desquels nous nous éloignons, alors que nous sommes à égale distance de chacun.
Cette illusion spatiale a-t-elle une influence sur notre perception du temps ?
Eugène Caruso le pense : « « Il nous semble que les experts en psychologie ont négligé un fait important : au quotidien, nous n’évaluons pas le passé et le futur exactement de la même manière ». Une telle influence pourrait être à l’origine d’un phénomène de « Doppler temporel ».
Les scientifiques basés à Chicago ont donc enquêté. Ils ont commencé localement, en interrogeant des étudiants universitaires et des voyageurs en transit dans une gare.
Les questionnaires ont mis en évidence que les personnes perçoivent effectivement un même intervalle de temps comme plus court quand il sépare de l’avenir que quand il sépare du passé.
Cette observation a été confirmée par une étude en ligne au travers de laquelle les personnes interrogées une semaine avant la Saint Valentin s’en sentaient plus proches que ceux interrogés une semaine après.
Pour gagner en clairvoyance, les équipes d’Eugène Caruso ont réalisé un test utilisant la réalité virtuelle. Des étudiants étaient immergés dans un espace les plaçant sur une route à deux voies, marchant soit vers une fontaine bouillonnante située au bout de la route, soit marchant à reculons, s’éloignant donc de cette fontaine. Les cobayes devaient ensuite exprimer à quelle distance leur semblait être une date (trois semaines avant ou trois semaines après).
Finalement, seuls les étudiants qui allaient de l’avant ont déclaré un avenir plus proche que le passé. Ceux en marche arrière n’ont pas signalé de différence.
Il y aurait donc bien une influence de nos mouvements sur la perception du temps, la notion de direction du temps étant un concept qui dépasse le simple domaine de la philosophie.
« Cette étude est très importante car l’idée de la distance psychologique est essentielle dans la théorie et la recherche, dans chacun des sous-domaines de la psychologie (sociale, du développement, cognitive, clinique). Cependant, l’hypothèse implicite que la distance avec le passé est la même que celle avec le futur, existe toujours. » déclare Eugène Caruso, précisant « […] qu’il existe chez les personnes une différence systématique des perceptions de la distance avec le passé et avec le futur »
Par Audrey Loubens, journaliste scientifique
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