« Pour la première fois, nous montrons que des agrégats de macroplastiques flottants sont détectables grâces aux données optiques acquises par les satellites Sentinel-2 de l’Agence spatiale européenne (ESA) et, en plus, qu’ils peuvent être différenciés des matériaux naturels tels que les algues », avancent les auteurs d’une nouvelle étude publiée dans la revue Scientific Reports. « Nous espérons que cette méthode constituera un tremplin pour l’utilisation des satellites et des drones dans la lutte contre le problème des plastiques marins », partage Lauren Biermann, auteure principale de l’étude, chercheuse au Laboratoire marin de Plymouth.
Grâce à une intelligence artificielle, les chercheurs sont parvenus à détecter des agrégats de plastiques flottant dans les eaux côtières, à l’aide des images satellites de l’Agence spatiale européenne. Et ils sont parvenus à les distinguer de matériaux flottants naturels, tels que les algues, le bois flotté et l’écume de mer. Les agrégats de plastiques ont été identifiés avec une précision moyenne de 86 % sur quatre sites d’étude. « Ce défi technique constitue la première étape vers le développement d’une méthode opérationnelle de détection des agrégats de plastiques flottants dans les eaux du monde entier », soulignent les auteurs.
Valider l’algorithme grâce à des données connues
Les satellites Sentinel-2 embarquent un imageur multispectral (MSI). Ses images présentent des pixels jusqu’à 10 x 10 m et couvrent les eaux côtières mondiales tous les 2 à 5 jours. L’étude a permis de détecter des agrégats flottants à des échelles inférieures aux pixels. Pour y parvenir, l’équipe a analysé les images collectées par le satellite Sentinel-2 en utilisant un algorithme pour y faire ressortir les débris flottants dans l’eau. Cela a permis de créer l’Index des débris flottants pour l’instrument multispectral du Sentinel-2.
Parmi les déchets flottants, il fallait ensuite parvenir à identifier les plastiques. Les données des projets Plastic Litter menés par l’Université de la mer Égée en 2018 et 2019 ont rendu cela possible. Les chercheurs avaient déployé en mer des cibles flottantes en plastique composées de sacs, bouteilles et filets de pêche depuis Mytilène en Grèce. L’équipe savait alors exactement quels déchets le Sentinel-2 « voyait » à la surface. Cela a permis de construire une signature optique pour les plastiques flottants. L’index a été complété par des données validées sur les plastiques détectés après de graves inondations à Durban, en Afrique du Sud. Une fois les signatures des plastiques établies, l’équipe a entamé le même processus pour les débris naturels.
Identifier le plastique dans de nouvelles zones
L’algorithme étant désormais développé et validé, il était temps d’aller détecter les plastiques flottant dans les zones côtières et de les différencier des autres déchets. Les chercheurs ont ensuite analysé des agrégats dans deux pays développés – Canada et Écosse – et deux pays en développement – Ghana et Vietnam.
Manuellement, les chercheurs ont sélectionné les pixels qui semblaient être dominés par les plastiques en utilisant leur signature spectrale, l’index, ainsi qu’un indice de végétation par différence normalisée. Les matériaux flottants ont alors été différenciés de manière automatique grâce à une classification dite « naïve bayésienne ». Il s’agit d’un algorithme qui calcule la probabilité qu’un pixel détecté appartienne aux classes de matériaux avec lesquelles il a été entraîné. Dans cette étude, il détermine la probabilité qu’il s’agisse de plastiques connus, d’eau de mer, de bois flotté, d’algues ou d’écume de mer.
Sur les quatre sites d’étude, les plastiques suspectés ont été classés avec succès comme des plastiques avec une précision globale de 86 %. La précision était de 100 % au Canada, 87 %, au Ghana, 83 % en Écosse et 77 % au Vietnam. « Une classification moins précise résulte du fait que les pixels ne sont pas suffisamment pleins de débris flottants et qu’une petite proportion de plastiques suspectés est ainsi identifiée comme de l’écume de mer », analysent les auteurs. L’équipe affine désormais la technique pour accroître encore sa précision. Elle espère rapidement pouvoir détecter les agrégats de plastiques flottant dans les eaux côtières et les fleuves.
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