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Trump et l’industrie

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Trump et l’industrie : un protectionnisme à l’issue incertaine

Posté le par Arnaud Moign dans Entreprises et marchés

Le jour de son investiture, Trump a signé pas moins de 78 décrets, dont certains favorisent les énergies fossiles, le nucléaire ou menacent les subventions pour l'énergie solaire et l’éolien. Si de fortes incertitudes demeurent, la politique industrielle et économique de Trump sera clairement protectionniste et teintée de guerre commerciale, avec ses voisins directs, comme avec l’Europe ou la Chine.

Comme nous le disions dans cet article, la production énergétique sera la première industrie bouleversée par le retour au pouvoir de Donald Trump. Les premiers décrets qui ont été signés le 20 janvier annoncent ainsi la couleur de la nouvelle ère Trump 2.0 en matière d’énergie :

  • une politique très favorable au fossile, avec une forte relance de la production de gaz, de pétrole, y compris de schiste, et l’exploitation sans entrave du potentiel de l’Alaska ;
  • un rejet de l’éolien, principalement offshore ;
  • un soutien au nucléaire ;
  • des incertitudes concernant le sort du solaire, dont les subventions sont d’ores et déjà menacées.

Et pour lever toutes les entraves de l’industrie pétrolière et gazière, Trump a, comme en 2017, annoncé la sortie des États-Unis de l’accord de Paris, par un autre décret.

L’industrie automobile : Trump va favoriser le thermique au détriment de l’électrique

En promettant de « libérer l’énergie américaine », Trump compte bel et bien freiner l’expansion de l’électrique, probablement pour mieux soutenir la production de pétrole américaine en favorisant la mobilité thermique :

  • annulation d’un décret de Joe Biden qui voulait que 50 % des nouveaux véhicules vendus aux États-Unis d’ici 2030 soient électriques ;
  • suspension des fonds pour les stations de recharge ;
  • suppression envisagée des crédits d’impôt pour véhicules électriques ;
  • levée des barrières étatiques en matière d’émissions de gaz à effet de serre des véhicules.

Ce choix politique semble néanmoins étrange quand on sait qu’Elon Musk, l’un de ses principaux soutiens financiers, est PDG de Tesla. Or, la décision de Trump a eu une conséquence immédiate : elle a fait baisser la valeur boursière des entreprises du secteur, notamment Tesla, Rivian et Evgo.

En apparence, Elon Musk semble néanmoins soutenir cette politique, puisqu’il estime que la suppression des subventions va affaiblir ses concurrents, comme Ford et General Motors.

En réaction, le gouverneur démocrate de Californie a d’ores et déjà promis des subventions de l’État afin de compenser cette suppression des aides fédérales.

Malgré tout, ce changement de politique devrait avoir un impact limité sur les ventes de véhicules électriques aux États-Unis en 2025, selon le cabinet d’études Rho Motion, qui prévoit une hausse des ventes de 16 %.

Mais sur le long terme, les conséquences pourraient être désastreuses : jusqu’à 47 % de baisse de la demande de batteries d’ici 2040, dans le pire scénario.

Trump et l’industrie en général : protectionnisme économique et droits de douane élevés

En matière d’industrie, la philosophie de Trump est simple, voire simpliste, puisqu’il veut forcer les entreprises étrangères à s’implanter aux États-Unis. Pour cela, il compte relever les droits de douane, dans la continuité des mesures économiques prises lors de son mandat précédent.

Néanmoins, ce relèvement des droits de douane pourrait avoir de multiples effets négatifs sur l’économie américaine, mais aussi sur l’économie mondiale.

  • Augmentation des coûts d’achat pour les entreprises et les particuliers : le surcoût des taxes sera répercuté sur le prix d’achat des produits importés. D’après une étude du Boston Consulting Group, le surcoût pourrait en effet avoisiner 640 milliards de dollars pour l’économie américaine. Par ailleurs, le Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII) a évalué que « les principaux perdants des droits de douane universels seraient les États-Unis et la Chine. »
  • Impact sur l’inflation : la hausse des prix des biens importés aux États-Unis risque de contribuer à augmenter l’inflation.
  • Conséquences négatives sur le PIB et l’emploi : Comme le rappelle cette analyse publiée sur le blog du FMI en 2016, Trump fait une erreur en imaginant booster l’emploi et la productivité en augmentant les droits de douane, car c’est l’inverse qui pourrait se produire.

L’étude du FMI, publiée quelques mois avant le premier mandat de Trump, faisait d’ailleurs office d’avertissement, car elle se concluait par ces mots :

« Ceux qui prônent la fermeté à l’égard des partenaires commerciaux étrangers via des droits prohibitifs devraient bien réfléchir. Cela peut être réconfortant d’un point de vue émotionnel. Cela peut stimuler certains secteurs. Le risque peut même conduire des partenaires commerciaux à modifier leurs politiques sous le coup de la peur. Pourtant, si elles sont appliquées, ces mesures se révèlent à terme plus pénalisantes pour l’économie nationale. »

Malgré les potentielles conséquences négatives, Trump semble pourtant prêt à relancer sa guerre commerciale contre le monde entier. Comme cela a été confirmé, ses premières victimes seront ses principaux partenaires commerciaux, à commencer par le Canada et le Mexique (hausse de 25 %), ses voisins directs. Si les deux pays se préparent déjà à riposter, les contre-mesures ne seront connues que lorsque les détails des décisions prises par l’administration Trump le seront.

L’autre cible est, bien entendu, la Chine (importation de biens électroniques de grande consommation notamment), 10 % de droits de douane supplémentaires ayant été ajoutés ce week-end.

Si le calendrier de Trump n’est pas connu, il ne fait aucun doute que l’Europe sera la prochaine sur la liste. Elle est notamment ciblée pour ses médicaments, ses produits pharmaceutiques ou encore ses voitures, ses produits alimentaires et ses produits chimiques.

Les négociations risquent donc d’être tendues dans les prochains mois, entre ces différents pays, mais une chose est sûre : Trump joue à un jeu dangereux, qui risque, à terme, de ne faire que des perdants.

Mais le président assume. Comme il l’a avoué, le pays va souffrir, mais il estime que c’est un mal nécessaire. « Ce sera le nouvel âge d’or pour les États-Unis ! Est-ce que cela va faire souffrir ? Oui, peut-être. Et peut-être pas. Mais nous allons rendre sa grandeur à l’Amérique et cela vaudra le prix qu’il faudra payer ».

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Posté le par Arnaud Moign


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