Les cimentiers visent une réduction de 80% des émissions d’ici 2050. Du côté BTP, VINCI Construction s’est même engagé à utiliser 90 % de béton bas carbone dès 2030. En attendant, des alternatives au béton traditionnel sont également recherchées.
Réduire le bilan carbone du béton
Le béton est un matériau majoritairement composé de ciment, d’eau, de sable et de granulats. Souvent pointée du doigt, la production de ciment Portland serait responsable de près de 6 % des émissions des gaz à effet de serre à l’échelle mondiale et deux tiers de ces émissions sont générés lors de la production du clinker. Pour quelles raisons ? Principalement parce que la fabrication du clinker Portland nécessite de passer par une étape de décarbonatation du calcaire, ce qui libère beaucoup de CO2. L’autre source d’émission de CO2 vient de l’utilisation de combustibles fossiles pour la cuisson de l’argile et du calcaire.
Ces chiffres sont néanmoins à relativiser en ce qui concerne la France : en 30 ans, la filière béton a déjà réduit son empreinte CO2 de 39 %, du fait de l’innovation constante des industriels.
Le béton de chanvre
Développé en France depuis les années 1990, le béton de chanvre est un matériau qui s’obtient en mélangeant des particules de chanvre (la chèvenotte) avec un liant, de l’eau et des adjuvants.
En s’inspirant de techniques de construction ancestrales qui associent le minéral et le végétal, le cimentier Lafarge propose par exemple d’associer de la chaux à un granulat à base de chèvenotte. Cette solution, applicable en neuf comme en rénovation, permet d’améliorer le confort thermique été comme hiver.
Pour ne rien gâcher, le bilan carbone de ce type de produit est excellent. D’après les résultats d’ACV (analyse du cycle de vie) de la base INIES, les murs en béton de chanvre banché sur ossature bois seraient même des puits de carbone (ils consomment du carbone au lieu d’en rejeter).
Enfin, selon une étude du CEREMA, les murs en béton de chanvre permettraient, dans certains cas, de réduire jusqu’à 70 % le besoin en chauffage des bâtiments.
Les matériaux fibres-ciment
Le terme « fibres-ciment » désigne une famille de matériaux composites fabriqués à partir de ciment, d’eau, de fibres et de charges minérales. Les fibres, autrefois en amiante, ont depuis longtemps été remplacées par d’autres fibres, notamment en cellulose. Ces matériaux ont la particularité d’être très résistants, inoxydables, incombustibles, ingélifs et faciles à mettre en forme. Couramment utilisé pour la fabrication de plaques de toitures ondulées, le fibre-ciment est aussi de plus en plus employé pour la conception de matériaux de façade et de lames de bardage.
Ces matériaux peuvent être considérés comme écologiques, dans le sens où :
- leur durabilité dépasse 50 ans ;
- ils sont démontables et peuvent donc être réutilisés dans un autre bâtiment lors de la déconstruction ;
- ils contiennent des fibres de cellulose ;
- les déchets de fibre-ciment sont revalorisables en tant que granulat routier ou en tant que charges pour fabriquer de nouveaux matériaux en fibre-ciment.
Quelques acteurs du marché français : CEMBRIT, EQUITONE, ETERNIT.
Le béton d’argile
Utilisée depuis la nuit des temps, la terre crue a de multiples usages en construction et il existe des dizaines de techniques permettant sa mise en œuvre. Des sacs de béton d’argile à mélanger avec un gravier ou des big bags, permettant de réaliser des dalles ou des chapes sont par exemple commercialisés. Bien que ce matériau ne soit pas assez résistant pour permettre la réalisation d’ouvrages porteurs, il a bien d’autres qualités :
- Il est constitué d’argile crue. Il n’y a donc pas de cuisson à haute température, ce qui réduit fortement l’impact environnemental ;
- Il apporte une certaine inertie thermique et amplifie le déphasage thermique ;
- C’est un produit sain, sans odeur, qui ne contient pas d’adjuvant ;
- Il a une bonne absorption phonique ;
- C’est un biomatériau recyclable à l’infini.
Néanmoins, l’utilisation de béton d’argile ne semble pas limitée à la production de dalles ou de chapes, la mise en forme par coffrage et par compression permettant de réaliser des façades porteuses, sous certaines conditions.
Voici quelques exemples de réalisations :
- une construction en pisé sur l’îlot B2 de Lyon Confluence ;
- l’utilisation de béton d’argile pour la réalisation de dalles non porteuses.
Si vous souhaitez approfondir cette thématique, nous vous invitons à consulter les résultats du programme de recherche Béton d’Argile Environnemental, qui détaille également l’utilisation de chanvre dans les bétons.
Cet article se trouve dans le dossier :
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