Le géant pétrolier Total va renoncer à un avantage fiscal, dont il affirme ne plus tirer profit depuis 10 ans, mais qui continuait de faire polémique en lui permettant théoriquement d'échapper à l'impôt sur les sociétés malgré ses bénéfices astronomiques.
« Total a décidé de ne pas solliciter auprès de l’État le renouvellement du régime fiscal du bénéfice mondial consolidé (BMC) », a annoncé lundi soir le directeur financier du groupe, Patrick de la Chevardière, dans une interview aux Échos mise en ligne sur le site Internet du quotidien économique.
Le régime du BMC, accordé par l’État, permet à certaines grandes sociétés françaises de déduire de leurs impôts des pertes enregistrées à l’étranger. Le patron de Total, Christophe de Margerie, avait laissé entendre que son groupe envisageait d’y renoncer, après sa remise en cause la semaine passée dans un rapport de l’Assemblée nationale qui pointait les écarts entre l’impôt payé par les groupes du CAC 40 et celui acquitté par les PME.
Rapporteur général du Budget, le député UMP Gilles Carrez évalue dans ce document le taux moyen d’imposition des grandes sociétés françaises à un niveau inférieur « de l’ordre de presque 20 points » à celui de « la moyenne des PME ».
L’abandon du BMC par Total, dont le ministre de l’Économie François Baroin a « pris acte » dans la soirée sur France 3, intervient alors que Christophe de Margerie s’est trouvé engagé ces derniers jours dans une autre polémique, sans rapport, après avoir déclaré que le groupe pétrolier allait répercuter à la pompe les récentes hausses des cours du pétrole brut.
Première capitalisation de la Bourse de Paris, le géant pétrolier a, grâce à la flambée de l’or noir, dégagé l’an dernier des bénéfices à l’échelle mondiale en hausse de 32 %, à plus de 10 milliards d’euros. Avec un nouveau bond de 35 % et 3 milliards supplémentaires engrangés au premier trimestre 2011, le groupe faisait figure dans ce contexte de cible idéale aux critiques contre l’inéquité du système, alors qu’il n’a pas été soumis depuis 2008 à l’impôt sur les sociétés.
« Plutôt que de continuer à entendre à longueur de journée que l’entreprise bénéficie d’un régime de faveur, nous avons choisi d’y renoncer de nous-mêmes », a expliqué le directeur financier de Total dans Les Échos. « La dernière fois que le régime du bénéfice mondial consolidé a eu un impact favorable sur nos impôts, c’était en 2001 », a affirmé M. de la Chevardière. Il a fait valoir que Total n’avait pas échappé à l’impôt sur les sociétés ces dernières années du fait du BMC, mais en raison de ses mauvais résultats dans l’Hexagone, avec un trou global de 16 millions, selon les chiffres du groupe, qui atteint 600 millions pour le raffinage.
« Pour pouvoir bénéficier du BMC, il faut déjà payer des impôts en France et Total ne paie pas d’impôt en France du fait que ses activités y sont en déficit », a résumé un porte-parole du groupe. « Total apporte également quelque 800 millions d’euros de recettes fiscales à la France, hors IS », a également souligné le directeur financier, listant pêle-mêle retenues sur dividendes versés, et taxes professionnelles diverses. « Surtout, il existe un principe essentiel en fiscalité française, celui de la territorialité de l’impôt : vous êtes imposés sur les résultats là où vous réalisez des bénéfices, c’est-à-dire partout dans le monde sauf en France », a mis en avant M. de la Chevardière.
« Je ne connais aucune autre entreprise du CAC 40 qui paye autant d’impôts », a-t-il affirmé, chiffrant à 56 % le taux moyen d’impôts décaissés dans le monde par le groupe sur ses bénéfices.
(Source : AFP / photo : Patrick Kovarik)
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