À la fin de 2022, Time for the Planet a rallié près de 30 000 nouveaux actionnaires. En cinq jours, l’entreprise est passée de 72 000 actionnaires à plus de 100 000 et a levé plus de 2 millions d’euros. Et le mouvement continue. Le 18 janvier 2023, le compteur indique près de 107 000 actionnaires pour 16,2 millions d’euros rassemblés.
Denis Galha Garcia est cofondateur de Time for the Planet, directeur innovation de l’entreprise. Techniques de l’ingénieur profite de cet événement pour vous présenter les grandes innovations soutenues par le mouvement.
Techniques de l’ingénieur : La première innovation soutenue par Time for the Planet permettrait de stocker naturellement du carbone à large échelle. Quel est le procédé utilisé ?
Denis Galha Garcia : La première innovation que nous avons soutenue dès 2021 est Carbon Time. C’est une solution qui était connue dans les laboratoires depuis 30 ans, mais elle n’en sortait pas. C’est pour cela que nous avons créé Time for the Planet : créer une dimension entrepreneuriale et en faire une solution qui puisse être déployée à large échelle.
Carbon Time est une innovation qui a un potentiel monstrueux : elle permet de réduire l’acidification des océans et retire donc du CO2 de l’atmosphère [pour 50 kg de CO2 émis (minage et transport), c’est 1 tonne de captée et stockée selon l’entreprise, NDLR]. Nous avons investi 1,5 million d’euros.
Concrètement, le procédé repose sur l’olivine, un minéral que l’on trouve dans la roche volcanique, et sur l’action des vagues et des courants. On broie l’olivine pour la transformer en sable et on vient la déployer au niveau d’un littoral. Puisque les minéraux volcaniques retirent naturellement le CO2 de l’atmosphère, ce procédé permet d’accélérer un cycle naturel grâce aux vagues et aux courants, sans apport énergétique supplémentaire. Une grosse partie de la réaction et de la séquestration est naturelle : un sédiment se forme naturellement et se dépose au fond de l’océan.
Vous avez également soutenu deux solutions à large potentiel de réduction d’émissions. Quelles sont-elles ?
En janvier 2022, nous avons soutenu deux solutions qui servent à réduire les émissions de gaz à effet de serre : Leviathan Dynamics pour 1,85 million d’euros et Beyond The Sea pour 1 million d’euros.
Leviathan Dynamics est plutôt une solution technique. Il s’agit d’un système de production de froid mais sans gaz fluorés, qui utilise tout simplement de l’eau comme fluide réfrigérant. Les gaz fluorés, c’est tout de même 2 % des émissions mondiales en équivalent CO2. Vu qu’il y aura de plus en plus besoin de climatisation et de production de froid avec le changement climatique, là encore il y a un énorme potentiel. L’entreprise a pour l’instant installé quatre pilotes.
Beyond the Sea propose une solution pour le transport maritime qui représente 3 % des émissions mondiales. La solution est un système de kite qui peut s’appliquer rapidement sur tous les bateaux, de toutes tailles sans modifier leur architecture et qui ne nécessite aucune énergie pour fonctionner. Elle permet ainsi de réduire de 20 % les émissions de gaz à effet de serre. En plus, c’est Yves Paris qui porte l’innovation, un navigateur du Vendée Globe. En septembre 2022, Marc Thienpont est arrivé en tant que directeur général. Cela a tout accéléré : un démonstrateur est à l’eau et des essais en situations réelles sont en cours.
Vous avez également évoqué Shyva et Cool Roof France. On parle ici à la fois d’hydrogène vert et de peinture pour lutter contre la chaleur…
Oui, Shyva propose une électrode qui permettrait d’avoir un meilleur rendement pour la production d’hydrogène vert par électrolyse de l’eau. C’est un procédé simple qui pourrait permettre d’utiliser des eaux usées. On en est à la phase de tests en laboratoire, donc on a simplement investi 100 000 euros pour le moment.
Cool Roof France propose un principe vieux comme le monde : mettre de la peinture blanche sur le toit des bâtiments pour éviter qu’ils se réchauffent. On baisse ainsi les besoins en climatisation l’été. C’est une peinture très peu polluante dont la formulation intègre des coquilles d’huître, qui a un grand pouvoir de réflexion et qui dure pendant 20 ans. On est en train de construire la première licence libre pour tester ce modèle de partage de la solution. Nous avons investi ici 500 000 euros.
Quelles sont les deux prochaines innovations qui seront financées ?
L’argent levé nous donne les moyens d’être ambitieux. On a voté deux nouveaux financements en décembre, les discussions restent en cours : Elow, une solution d’effacement électrique et C.I.A. qui développe le « CompactCarbonCatcher ».
La solution CompactCarbonCatcher est un dispositif qui s’installe en sortie de l’échappement d’un moteur thermique. On peut imaginer l’appliquer aux véhicules, aux groupe électrogènes, et aux navires… Le dispositif casse la molécule de CO2 pour récupérer le carbone et relâcher l’oxygène. On le fait grâce à une réaction chimique, sans apport énergétique complémentaire.
Dans un premier temps, nous devrions investir 500 000 euros pour vérifier que la technologie peut bien se faire à plus grande échelle. On veut faire une analyse de cycle de vie complète pour s’assurer qu’il y a bien un gain carbone intéressant. Si tout fonctionne bien, on investira 2 millions d’euros supplémentaires.
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