Après une phase de test, le groupe Thales va mettre en œuvre à grande échelle sa solution d'évitement des traînées de condensation sur les vols de la compagnie aérienne française Amelia. Elle consiste à modifier l'altitude des avions, sans modifier leur route, afin de limiter la consommation de kérosène supplémentaire sous la barre de 3 %.
Tout le monde a déjà pu observer ces sillages blancs dans le ciel à la suite du passage des avions. Il s’agit de traînées de condensation qui se forment à haute altitude à la sortie des réacteurs, lorsque l’air environnant est froid et humide. Certaines d’entre elles peuvent persister pendant plusieurs heures et sont loin d’être anodines, car elles accentuent le réchauffement climatique en absorbant une partie du rayonnement provenant de la terre, puis en le réémettant vers le sol. Thales vient d’annoncer qu’il allait déployer une solution à grande échelle pour éviter ce phénomène physique.
Ce projet repose sur une application, appelée Flights Footprint, capable d’estimer les émissions de CO2 des aéronefs, mais aussi tous les autres effets sur l’environnement. Conçus avec l’aide d’experts de laboratoires et d’institutions académiques, le modèle numérique prend également en compte l’impact des traînées de condensation. Pour cela, les données de profils et de trajectoires de chaque vol sont analysées et combinées à des informations météorologiques pour calculer, par exemple, où se forme ce phénomène. Thales utilise les dernières prévisions météorologiques et les modèles climatiques les plus avancés fournis par le collectif Breakthrough Energy Contrails.
L’outil calcule ensuite des trajectoires optimales que les avions devraient emprunter et propose des alternatives de vol. Il repose uniquement sur des ajustements de l’altitude des avions, sans modifier leur route, ce qui permet de maintenir la consommation de kérosène supplémentaire sous la barre de 3 %. Le groupe d’électronique français spécialisé dans l’aérospatial met ces informations à disposition des compagnies aériennes, des pilotes et du contrôle aérien pour prévoir et planifier des vols plus vertueux et plus respectueux de l’environnement.
Depuis juin 2024, ce modèle numérique est testé sur toutes les rotations entre Paris et Valladolid (Espagne) de la compagnie française Amelia, opérées par des avions Embraer ERJ145. En intégrant cette solution aux outils du Centre de Contrôle Opérationnel (OCC) de cette compagnie aérienne, Thales permet aux agents d’opérations de l’OCC de récupérer directement des routes alternatives à leurs plans de vol afin de réduire de manière significative les traînées de condensation tout en maîtrisant l’impact de cette mesure sur le plan opérationnel.
Quatre tonnes d’équivalent CO2 seraient évitées à chaque vol
À l’issue de chaque vol, les modèles climatiques utilisés sont enrichis par des données de ré-analyse météorologiques et appliqués à la trajectoire réelle de l’avion, afin d’évaluer l’efficacité de l’évitement des zones de formation des traînées. Par ailleurs, la mise en place d’une caméra au sol, fournie par Reuniwatt, permet de valider l’efficacité de la solution par l’observation directe des traînées grâce à des analyses menées avec l’entreprise de services du numérique.
D’après les chiffres communiqués par Thales, l’outil a permis d’éviter en moyenne plus de 4 tonnes d’équivalent CO2 par vol initialement concerné par des traînées de condensation et de réduire leur impact climatique jusqu’à 40 %, un niveau qui correspond à l’impact cumulé des effets liés au CO2 et à ceux « hors CO2 ». Aujourd’hui, Amelia a décidé d’étendre ce système à ses vols éligibles en 2025, devenant ainsi la première compagnie aérienne à systématiser une approche d’évitement des traînées de condensation.
Selon une étude de T&E (Transport & Environment), moins de 3 % des vols dans le monde ont généré 80 % du réchauffement climatique engendré par les traînées de condensation en 2019. L’ONG environnementale indique par ailleurs que le changement de trajectoire de vol nécessaire pour éviter ce phénomène physique ne devrait concerner qu’une petite partie des trajets. Elle estime que « le surplus de carburant utilisé par ces avions pour éviter les traînées de condensation ne représenterait donc que 0,5 % du kérosène consommé par l’ensemble de la flotte mondiale sur une année. Sur les quelques vols pour lesquels un changement d’itinéraire est prévu, 80 % du réchauffement dû aux traînées de condensation peut être évité, avec une surconsommation de carburant de 5 % ou moins. »
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