Fondée en 2018, Square Sense est une jeune start-up de la « proptech », un secteur en pleine émergence qui vise l’application des technologies de l’information et de l’économie des plateformes aux marchés immobiliers.
Elle accompagne ses clients promoteurs et opérateurs dans les phases amont de conception des bâtiments et lors de la définition des programmes « smart service » et « smart energy », mais également ses clients investisseurs comme partenaire opérationnel de la gestion de leurs actifs.
Square Sense ambitionne de mener la transformation digitale du secteur immobilier, par la collecte et l’analyse de toutes les données produites par l’usage d’un bâtiment.
Antoine Ziliani en est le co-fondateur et directeur des opérations (COO).
Techniques de l’ingénieur : Avez-vous constaté un regain d’intérêt pour les questions énergétiques ces derniers temps ?
Antoine Ziliani : Compte tenu du contexte actuel, l’énergie est un sujet transverse qui monopolise l’attention de plus en plus d’acteurs économiques. Nous avons constaté que, depuis quelques mois, les priorités de nos clients ont changé. Auparavant, on faisait surtout appel à nous pour des problématiques de performance financière liées à des investissements immobiliers. Dorénavant, la performance énergétique des bâtiments devient aussi un centre d’intérêt.
Ce regain d’intérêt a-t-il également un lien avec le « décret tertiaire » ?
C’est en effet le cas. Le décret tertiaire, dont la première échéance arrivait cette année, impose notamment aux propriétaires d’actifs immobiliers de déclarer les consommations énergétiques des bâtiments, ceci dans le cadre de la trajectoire de réduction des émissions de CO2 pour 2030 à 2050.
Square Sense a un impact assez fort sur les trajectoires de décarbonation imposées par le décret tertiaire, car nous pouvons aider les propriétaires à réduire les consommations liées à la gestion opérationnelle de l’immeuble.
Sur quels leviers peut-on jouer pour réduire rapidement la consommation des bâtiments tertiaires ?
Un immeuble surconsomme de l’énergie pour deux raisons. D’une part, il consomme parce qu’il est exploité et cette exploitation n’est pas forcément optimale.
D’autre part, il consomme trop d’énergie lorsque sa performance thermique n’est pas suffisante.
Par conséquent, pour réduire la consommation énergétique d’un bâtiment, on peut agir sur les deux leviers.
Malheureusement, agir sur le bâtiment en lui-même (améliorer la performance thermique, etc.) impose de faire des investissements conséquents. Si faire de tels investissements est nécessaire pour atteindre les objectifs de décarbonation fixés par le décret tertiaire, il y a une manière plus rapide de réduire la consommation.
En agissant sur la gestion opérationnelle de l’immeuble, on peut identifier rapidement les postes de consommations principaux et agir sur ceux-ci.
Quels sont ces postes de consommation ?
Nous nous sommes rendu compte que l’occupation des espaces était un facteur prépondérant. En effet, la gestion technique des systèmes de ventilation et de chauffage constitue la principale source de consommation des bâtiments, notamment de bureaux. Or, depuis la période Covid et la mise en place du télétravail, on constate une sous-occupation massive des espaces de bureaux.
Malgré cette baisse d’occupation importante, la gestion opérationnelle des systèmes de ventilation et de chauffage n’a pas vraiment changé. En clair, même si les espaces ne sont utilisés qu’à 20 % de leur capacité, la consommation d’énergie reste identique.
Par ailleurs, la réglementation concernant la ventilation impose bien de souffler 25 m³ d’air frais par heure et par personne. Il n’y a donc aucune règle qui empêche de réduire ce flux.
Malheureusement, comme les immeubles de bureaux ne disposent pas de systèmes capables de prédire le taux d’occupation des espaces, les équipements sont donc réglés à leur capacité maximale.
Je vous laisse imaginer les économies que l’on pourrait réaliser si on arrivait à ajuster en temps réel la quantité d’air soufflée par rapport au taux d’occupation !
Si nous n’en sommes pas encore là, pour le moment, en donnant simplement des consignes de reprogrammation régulières aux facility managers, nous arrivons à faire économiser entre 15 % et 30 % sur la ventilation. Cela représente tout de même jusqu’à 5 € d’économies au mètre carré.
Ceci à un impact direct sur la rentabilité de l’immeuble, sur sa valorisation et sur les charges du locataire, donc sur sa satisfaction.
Quelle est l’approche de Square Sense vis-à-vis du Smart Building ?
Aujourd’hui, le Smart Building est principalement un ensemble de solutions techniques qui s’adressent aux opérateurs techniques des immeubles. Néanmoins, au-delà de la gestion technique des bâtiments, on constate que les cas d’usage ne remontent pas dans la chaîne de valeur, qu’il s’agisse de la gestion d’actifs, du portefeuille ou de la prise de décision concernant l’investissement.
Les acteurs du Smart Building ont actuellement du mal à valoriser ces technologies auprès des investisseurs, faute de pouvoir estimer les bénéfices réels. Notre approche originale permet de rendre ces bénéfices plus concrets et de mettre en évidence les économies réalisables sur la commercialisation du bien, la gestion des biens locatifs et aussi de limiter la vacance locative.
Au final, les investisseurs peuvent espérer atteindre 10 % à 15 % de gain lors de la cession de l’actif. Par cette approche concrète, Square Sense est ainsi à même de parler aux directions générales des investisseurs institutionnels et des fonds d’investissement, afin de les « embarquer » dans cette transformation de la gestion d’actifs grâce à la donnée.
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