Bertrand Bocquet, vous êtes enseignant-chercheur en Physique au sein du laboratoire SCité de l’Université de Lille 1, pouvez-vous nous présenter ce laboratoire et ses travaux ?
Notre cheval de bataille, ce sont donc les sciences en société, par ailleurs apparues comme un nouvel objectif dans la loi pour l’enseignement supérieur et la recherche du 22 juillet 2013.
En quoi consistent exactement les « sciences en société » ?
Bertrand Bocquet. Cela regroupe plusieurs choses et il est encore difficile de bien les caractériser. D’abord, la vulgarisation, la plus fréquente, difficilement quantifiable, qui est limitée essentiellement par le facteur temps : avec la professionnalisation de la recherche dans un cadre de plus en plus concurrentiel, les scientifiques sont de plus en plus soumis aux mêmes contraintes que le monde de l’entreprise, et n’ont plus beaucoup de temps à consacrer à cette mission qui peut consister, par exemple, à intervenir dans une école de sa ville pour présenter ses travaux aux élèves.
Ensuite, il y a les controverses scientifiques qui dépassent le cadre académique, s’invitant dans le débat public, où différents acteurs, notamment issus de la société civile, vont s’impliquer, et proposer une expertise.
Enfin, ce que l’on appelle la recherche participative, historiquement très développée en astronomie et en naturalisme, mais encore marginale dans les autres disciplines. Dans ces deux domaines historiques, les scientifiques construisent l’objet de recherche, et les passionnés les aident ensuite dans leur recherche. Dans les nouveaux modèles de recherche participative, il y a co-construction de l’objet de recherche avec la société civile. Le premier exemple en France étant les Partenariats Institutions-Citoyens pour la Recherche et l’Innovation (PICRI), créés en 2005 en Île-de-France.
Vous avez élaboré pour « Techniques de l’Ingénieur » la rubrique Sciences et société de la base documentaire Ingénierie et responsabilité. Pourquoi les ingénieurs devraient-ils s’intéresser à travailler avec la société civile ?
Bertrand Bocquet. D’abord parce que les associations impliquées dans ces processus de recherche participative, qui ont développé ou développent une expertise, ont besoin d’ingénieurs. C’est donc un débouché professionnel non-négligeable pour les ingénieurs, et pas seulement pour les chercheurs. Pour les ingénieurs travaillant en entreprises, la notion de responsabilité maitrisée est un atout en plus dans la compétition économique : prendre en compte les aspirations sociétales est important pour savoir y répondre.
Enfin, pour la société dans son ensemble, cela permet d’avoir des personnes plus ouvertes d’esprit. Si la société civile se retrouve face à des interlocuteurs ayant déjà réfléchi en amont à ses attentes, cela favorise les relations entre ces différents acteurs, et l’implantation, par exemple, d’unités de production au niveau local, si l’entreprise est jugée responsable, et compatible aux intérêts locaux.
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