Alors que le Salon mondial de l'auto s'ouvre bientôt et que la décarbonation des transports est au cœur des enjeux de ces prochains mois, Techniques de l'ingénieur dresse un bilan des tendances et de leur adéquation avec les ambitions pour 2030.
Le verdissement des véhicules serait-il en bonne voie ? Selon les chiffres du rapport Secten, référence sur les émissions de gaz à effet de serre (GES), élaboré par le Citepa, le transport routier reste le premier émetteur en France avec 119 millions de tonnes d’équivalent-CO2 (MtCO2e) en 2023. Cela représente près d’un tiers des émissions du pays. Entre 2022 et 2023, l’organisme estime la baisse à 3,4 %, dans une tendance à la baisse depuis 2015 (hors rebond post-covid 2021 et 2022).
Pour expliquer ces bons résultats, l’organisme avance : « Il y a des effets de court terme tels que les augmentations des prix des carburants à la pompe qui limitent les déplacements non contraints au moment des hausses. Il y a aussi des effets de moyen et long terme comme le renouvellement du parc par des véhicules moins énergivores (véhicules électriques par exemple) ou comme le report modal (covoiturage, modes doux). »
Des objectifs et un scénario ambitieux pour 2030
Pour l’instant, le secteur des transports semble être en accord avec les objectifs de la stratégie nationale bas carbone (SNBC-2). Le scénario de référence prévoit des émissions pour le secteur du transport de 116 MtCO2e en 2025, 99 MtCO2e en 2030, en vue d’atteindre 51 MtCO2e en 2040 et 4 MtCO2e en 2050.
Il faut donc fortement accélérer la décarbonation des transports dès aujourd’hui pour atteindre des objectifs de plus en plus ambitieux. Pour y arriver, le scénario de la SNBC-2 mobilise cinq leviers : la décarbonation de l’énergie consommée par les véhicules, une meilleure performance énergétique des véhicules, la maîtrise de la croissance de la demande, le développement du report modal, et l’optimisation de l’utilisation des véhicules pour le transport de voyageurs comme de marchandises.
La SNBC mise sur le développement des motorisations électriques, au biocarburant et au biogaz selon les modes de transport. En 2030, le scénario atteint notamment une part de 35 % de voitures particulières électriques et de 10 % de voitures particulières hybrides rechargeables dans les ventes de véhicules neufs. Le scénario vise une consommation de 4L/100 km en consommation réelle pour les véhicules neufs vendus en 2030.
Des objectifs bientôt mis à mal ?
Mais des signes avant-coureurs laissent présager que les choses pourraient ne pas se passer aussi bien. Ainsi, selon le baromètre d’août 2024 de l’Avere, 20 577 véhicules électriques et hybrides rechargeables ont été immatriculés en France, en baisse de -32,5 % par rapport à août 2023. C’est le « 4e mois consécutif de baisse des immatriculations neuves, le mois d’août 2024 s’affiche comme le plus mauvais des dix dernières années pour le marché des véhicules particuliers », avance Clément Molizon délégué général de l’Avere-France dans un communiqué.
Par ailleurs, l’amélioration des performances des véhicules neufs est moindre que prévu. Et l‘association des constructeurs automobiles européens demande même le report du durcissement des normes européennes sur les émissions de CO2. Plus de CO2, cela signifie inexorablement moins de véhicules électriques sur les routes et donc plus de pétrole brûlé dans des véhicules thermiques.
Il convient en plus d’ajouter que les véhicules sont de plus en plus lourds. D’après le palmarès de l’«autobésité » que l’association Agir pour l’Environnement dévoilera à l’occasion du Mondial de l’automobile de Paris, du 14 au 20 octobre prochains, les véhicules sont loin de devenir plus économes en ressources. En vingt ans, le poids moyen des 25 voitures les plus vendues a augmenté de 325 kg. Et la course au SUV – thermique ou électrique – ne semble pas faiblir.
Mais la course à l’ambition est-elle perdue pour autant ? Non. Des constructeurs volontaires montrent la voie, des ONG montent au créneau pour le respect des budgets carbone de la SNBC-2. De son côté, le secrétariat à la planification écologique a publié fin juillet un rapport, très détaillé, explorant les politiques budgétaires et fiscales pour accélérer la transition des véhicules. Il propose notamment d’augmenter les malus poids et CO2 sur les véhicules neufs pour freiner l’achat des véhicules les plus polluants. Il recommande encore de limiter l’avantage fiscal des indemnités kilométriques qui limite le report modal. Le barème actuel serait près de deux fois supérieur aux coûts réels de possession constatés pour les distances inférieures à 5 000 km/an, calcule le secrétariat. En plus, le rapport propose de réformer le régime fiscal actuel de l’Avantage en Nature qui sous-estime l’usage personnel de ces véhicules. Il s’agit là d’une autre niche fiscale qui n’incite pas au report modal. Finalement, il ne reste plus qu’au nouveau gouvernement de s’emparer de ce défi.
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