Gautier Vincent est Expert Risques Industriels et formateur Techniques de l'Ingénieur sur l'entrainement au CLP et sur les moyens et scénarios. Il détaille pour Instantanés Techniques la nécessité, pour les utilisateurs finaux comme pour les fournisseurs, de se former sur les FDS étendues. Entretien.
Instantanés technques : Présentez nous les nouvelles fiches de données de sécurité (FDS) étendues.
Gautier Vincent : La fiche de données de sécurité étendue, cest la FDS au format Reach qu’impose la réglementation Reach, et qui incorpore en annexe les scénarios d’exposition qui sont développés dans la cadre des dossiers d’enregistrement Reach. Ces nouvelles FDS commencent à arriver depuis janvier. Nous allons pouvoir commencer à « traiter » toutes les substances enregistrées en 2010. L’opération sera reconduite ensuite pour toutes les substances enregistrées en 2013, puis en 2018.
Qu’est-ce qui va changer concrètement ?
Beaucoup de choses vont changer sur les FDS, ce qui explique le développement de ces formations. Rien qu’au niveau de la quantité d’informations, on va passer de 8 pages à parfois 20, voire 200 dans certains cas !
Tout d’abord, la somme d’informations supplémentaires est extrêmement importante. Des paramètres vont évoluer. Prenons l’exemple des usages : avant, dans la FDS, on trouvait des précisions sur les conditions d’usages de la substance, « dans les grandes lignes ». Maintenant, on va avoir ce qu’on appelle des « codes usages ». Ces codes usages sont issus des guides techniques de Reach, et regroupent des informations permettant de savoir le domaine où on peut utiliser la substance. Ces codes usages vont être regroupés en scénarios, ce qui va permettre d’établir l’exposition aux travailleurs, à l’environnement et éventuellement aux consommateurs vis-à-vis de ces usages-là. Toute cette partie concernant la détermination de l’exposition va concerner les annexes.
Au niveau des usages, les code déterminés dans les guides techniques de Reach sont très larges. Aujourd’hui, le problème qui se pose est que ces codes sont tellement larges qu’on peut, pour un même process, se retrouver avec des codes usages différents. Toute la problématique est de savoir utiliser ces codes usages de la bonne manière, pour retrouver son usage et avoir le droit d’utiliser la substance dans son entreprise. Ceci concerne les utilisateurs avals.
D’où l’intérêt, pour les utilisateurs finaux d’actualiser leurs connaissances…
L’important est surtout pour l’utilisateur final de savoir identifier les utilisations via les informations données par les codes usages, et surtout savoir quoi faire si l’utilisation de tel ou tel produit n’est pas répertorié dans les codes usages correspondant, pour rester « couvert » vis-à-vis de la réglementation.
Que se passe-t-il quand l’utilisateur a un doute sur l’utilisation d’une substance dans un cas particulier ?
Il existe différentes possibilités : demander au fournisseur de vous couvrir, ou développer vous-même votre propre scénario
si c’est l’utilisateur aval qui demande à développer son propre scénario, il le fera pour lui-même. Cela permet notamment de traiter tous les usages de substances à caractère confidentiel. Il existe un autre cas : l’utilisateur peut se référer à son fournisseur, pour un usage non pris en compte dans la réglementation. Si le fournisseur accepte de le prendre en compte, il va l’intégrer dans son dossier d’enregistrement Reach, et la future FDS fera l’objet d’une mise à jour qui incorporera les nouveaux usages et les scénarios qui y sont associés. Il est donc important, aujourd’hui, de savoir manipuler et connaître au mieux toutes les formes d’usage. Une autre solution peut consister à changer de fournisseur.
Une fois que l’utilisateur final a bien repéré ses usages, il va se reporter à la partie des annexes qui le concerne. Les données qu’il va trouver sont de plusieurs ordres. D’abord, une description de la substance : à quoi sert-elle ? Comment se présente-t-elle ? Comment est-elle utilisée dans le process industriel ? Quelles sont les conditions opératoires ? L’usage de la substance nécessite-t-elle l’utilisation d’équipements particuliers, individuels ou collectifs ?
L’implication de l’utilisateur aval dans les FDS semble beaucoup plus important.
C’est vrai. Les FDS étendues ne changent en rien ce qui existait en la matière auparavant, mais elles permettent d’aller beaucoup plus dans le détail. Et cela est justifié. Si un utilisateur final dérive de la FDS au niveau de certains usages par exemple, il doit être capable de montrer, à l’occasion d’un contrôle par exemple, qu’il reste dans le cadre des scénarios correspondant à l’usage. Mais il faut noter que la rédaction d’un rapport n’est pas une obligation réglementaire au sens strict.
Justement, comment abordez-vous les problématiques liées aux différentes réglementations ?
On intègre dans la formation « usages et scénario » le lien avec les autres réglementations. C’est un point très important. Au-delà de Reach, on a aussi des problématiques d’évaluation du risque chimique et de mesure de l’exposition, qui se fait sur le poste de travail. Il s’agit d’une réglementation française, qui se base sur les équipements de protection individuels et collectifs. Il est donc nécessaire qu’il y ait homogénéisation avec les règlements Reach. Il est important de considérer les règlementations non pas une par une, mais dans leur globalité.
Et pour les formulateurs ?
Les formulateurs font les formulations de plusieurs substances, mais il faut prendre en compte le fait que chaque substance aura ses scénarios. Il s’agit alors de faire un « mix » intelligent des différents scénarios associés aux différentes substances. Ils ont différentes possibilités. Soit ils prennent la substance la plus dangereuse et en déduisent les différents scénarios, en considérant que ces scénarios couvrent l’utilisation de l’ensemble des autres substances.
Ils peuvent aussi considérer plusieurs scénarios. Si une substance A est dangereuse pour l’environnement, alors que la B ne l’est pas mais qu’elle est dangereuse pour l’homme
Les cas de figure sont très nombreux, il y a donc la nécessité de clarifier tout cela le plus possible. Aujourd’hui, il y a clairement une demande d’aide vis-à-vis de ces problématiques, émanant surtout des PME/PMI.
Qu’est-ce qui ressort de l’attente des participants aux formations ?
Il existe de plus en plus de formations, la plupart très théoriques, et inspirées par les guides de l’ECHA qui sortent régulièrement. Dans certains cas, ces guides sont encore à l’état de brouillons lorsqu’ils sont utilisés pour les formations. Avec les Techniques de l’Ingénieur, nous avons choisi de mettre l’accent sur le côté pratique des formations. Il s’agit surtout de se confronter à ces nouvelles obligations en les connaissant mieux.
Propos recueillis par Pierre THOUVEREZ
Les formations TECHNIQUES DE L’INGENIEUR évoquées dans cet entretien :
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