Cette semaine dans la revue du Web :
- suivons pour commencer la formation de cristaux de glace sur un fil, structures uniques de quelques millimètres chacune ;
- retrouvons ensuite un avion conçu par le MIT, dont les prouesses sont plus que surprenantes ;
- jetons un œil au fonctionnement fascinant des cordes vocales ;
- découvrons la vidéo des six volontaires américains qui se sont retrouvés sous une bombe atomique de deux kilotonnes en juillet 1957 ;
- le gadget (inutile ?) de la semaine : « Swumanoid », le robot nageur pas encore maître-nageur ;
- et enfin pour conclure, quelques magnifiques clichés du travail de l’artiste américain Todd Johnson, créant des figures de Lichtenberg en exposant du plexiglas au faisceau d’un accélérateur de particules.
Formation de cristaux de glace sur un fil
Pour débuter la trente-deuxième revue du web, voici un petit bijou en vidéo : la formation de cristaux de glace sur un fil, branches après branches. La vidéo, fascinante, illustre un phénomène qui semble trivial avec une expérience dont le protocole expérimental n’est pourtant pas vraiment simple à réaliser… hors d’un laboratoire. Dans une chambre où la température serait maintenue autour de – 45 degrés Celsius (- 47 degrés Fahrenheit), les aiguillons cristallins se forment sur un fil dans lequel passe un courant électrique de près de 2000 volts. Les structures uniques qui peuvent se former sur le fil ne font pas plus d’une fraction de millimètre chacune, et se forment très rapidement grâce à l’appui de la charge électrique.
L’expérience a été réalisée par le collectif « Words are Pictures », étalée sur quatre jours, pour le besoin d’un clip vidéo d’un musicien anglais, Ryan Teague. Le rôle que joue l’électricité dans cette expérience est loin d’être négligeable : l’application du courant électrique aide à aligner les molécules d’eau pour ensuite former les structures cristallines. Les cristaux de glace se forment selon une règle qu’on pourrait qualifier « de la moindre résistance » : la vapeur d’eau se solidifie sur la surface, mais la moindre aspérité ou bosse sur la surface gelée permet à l’eau de voyager moins loin avant de se transformer en glace. Ces aspérités sont des sites de germination, où la tension superficielle est localement plus basse. Par capillarité, la bosse grandit et forme une branche glacée. De branches en branches, les motifs semi-chaotiques prennent de l’ampleur, sous le coup de la croissance dendritique.
Le petit avion autonome du MIT, capable de se faufiler à travers des obstacles
Le Massachusetts Institute of Technology (MIT) nous offre une fois de plus une petite merveille : un petit avion autonome capable, entre autres, de voler à travers un espace plus étroit… que sa propre envergure ! Développé par le scientifique américain Russ Tedrake et son équipe de chercheurs, l’avion assisté par ordinateur est capable de raser des obstacles tout en volant à plein régime, performance en soi. L’objectif de l’équipe du MIT serait au-delà de la simple recherche et détection d’obstacles en plein vol, il se situerait selon eux au niveau du contrôle de l’appareil lors de manœuvres considérées comme complexes. « Nous entrons dans le système les informations concernant la position des obstacles avant le vol, et utilisons la technique de motion capture pour savoir où se situe notre appareil ainsi que les obstacles, à tous moments », explique Andrew Barry, membre de l’équipe.
Dans la vidéo qui suit, prenant exemple sur le vol d’un oiseau apercevant un obstacle au dernier moment, les chercheurs testent les limites du système, obligeant l’avion et le système de commande à ordonner une acrobatie au dernier moment, challenge particulièrement difficile à relever tant l’écoulement d’air peut être chaotique lorsque la pirouette se fait sur un angle raide. La position de l’avion est constamment contrôlée par ordinateur durant le vol, calculant comment celui-ci doit se mouvoir, en fonction des perturbations. Les informations sur la trajectoire sont ensuite transmises au petit bolide. A terme, le projet pourrait permettre de créer des drones capables de voler à travers une forêt dense, en les équipant d’un système de vision détectant les arbres et autres obstacles durant le vol.
Le fonctionnement étonnant des cordes vocales
La vidéo qui suit nous permet d’observer le fonctionnement complexe et la mécanique bien huilée des cordes vocales, à travers le prisme – un peu cru – d’une laryngoscopie. En examinant la cavité du larynx à l’aide de l’image réfléchie sur le miroir du laryngoscope ou à l’aide d’un tube spatule introduit sur le dos de la langue, la laryngoscopie permet de détecter ou de retirer un corps étranger logé dans la gorge comme d’évaluer l’état général du larynx.
On peut observer ici les plis vocaux, communément appelés « cordes vocales », vibrer lors de vocalises à des vitesses différant selon la hauteur du son produit, donnant pourtant l’impression qu’elles se rapprochent et s’entrechoquent relativement lentement. La raison est bien connue, et n’est autre que le nombre d’images par seconde de la caméra capturant la vidéo.
Essentielles à la phonation et à la moindre émission des sons vocaux, les cordes vocales sont les replis des membranes muqueuses du larynx qui, une fois mises en vibration, produisent ces sons qui nous semblent si évidents à produire. Elles comprennent, sur plusieurs niveaux différents, le muscle vocal, et la lamina propia, elle-même séparée en trois couches, allant de la profonde à la superficielle.
Elles ne mesurent pas plus de 9 à 13 millimètres chez la femme, tandis qu’elles peuvent faire jusqu’à 20 millimètres chez les sujets masculins. La mécanique des cordes vocales veut qu’elles s’écartent lorsque l’on respire, tandis qu’elles se resserrent lors de la déglutition.
Archives : les cinq hommes qui acceptèrent de se trouver sous une bombe atomique…
Ce n’était pas une punition… Les cinq hommes apparaissant dans la vidéo qui suit étaient tous volontaires. Seul le photographe – qui n’apparaît à aucun moment – ne s’était pas porté volontaire. Le colonel Sidney Bruce, le lieutenant-colonel. Frank P. Ball, le commandant Norman « Bodie » Bodinger, le commandant John Hughes, Don Lutrel et le photographe George Yoshitake se sont donc retrouvés, le 19 juillet 1957, autour d’un panneau dont l’écriture incertaine et maladroite indiquait le « Ground Zero » de l’explosion, ainsi que sa supposée population – cinq, le nombre d’officiers volontaires, omettant pourtant le photographe. L’explosion, qui s’est déroulée à plus d’une centaine de kilomètres au nord-ouest de Las Vegas, dans le cadre de la très controversée « Opération Plumbbob », a eu lieu à environ 5600 mètres (18500 pieds, et ce malgré la vidéo annonçant 10000 pieds) au-dessus des six cobayes américains. La bombe a été lancée par un Northrop F-89 Scorpion, premier avion au monde à avoir été équipé d’un missile air-air à tête nucléaire, accompagné du premier bombardier supersonique capable d’atteindre Mach 2, un Convair B-58 Hustler.
Bien que le missile ait été tiré, s’en suit une courte attente, rythmée par un compte à rebours laconique. L’explosion vient sanctionner la fin du décompte, et l’un des cobayes – celui portant des lunettes de soleil – regarde même dans le ciel au moment fatidique. Dans un contexte de guerre froide entre la Russie et les États-Unis, les autorités gouvernementales américaines souhaitaient démontrer les faibles conséquences et la sûreté – toute relative – d’une explosion nucléaire de faible ampleur dans l’atmosphère, afin de rassurer le peuple américain alors que des armes similaires pouvaient être entre les mains des Russes. La bombe, relativement petite – seulement deux kilotonnes – aurait explosé dans une zone et à une altitude ne permettant pas aux officiers volontaires d’être exposés par les radiations immédiates. Les particules, trop chaudes, seraient selon toute vraisemblance restées en partie en altitude puis se seraient répandues plus tard et de manière plus diffuse une fois la température descendue, sur une surface bien plus grande.
Le film de propagande nous montre les officiers tressaillir au moment de l’explosion, lorsque le flash de lumière blanche leur parvient. Puis une pause et finalement l’onde de choc, dans un grondement magistral. Les cinq officiers semblent, malgré les risques phénoménaux encourus, avoir eu une longévité surprenante. Outre le photographe, toujours vivant en 2010 et âgé alors de 82 ans, deux des officiers seraient morts à plus de 80 ans, deux autres auraient atteint la barrière des 70 ans, et le dernier serait décédé à l’âge de 63 ans.
Le gadget (inutile ?) de la semaine : « Swumanoid », le robot nageur japonais
Futur maître-nageur ? Pas encore… Pour conclure cette trente-deuxième revue du web, voici le gadget (inutile ?) de la semaine, « Swumanoid », le robot humanoïde nageur de l’Institut de Technologie de Tokyo, encore à l’état de prototype, qui serait capable de nager le crawl à près de 0.64 mètres par seconde. Le robot japonais nage le crawl, mais pas seulement : « Swumanoid » nage aussi le dos crawlé et le papillon. La réalité est pourtant toute autre, de l’aveu même de ses créateurs : le robot nageur ne nage même pas – encore – toujours sur commande. Certains de ces défauts sont – évidemment – imputables au fait que « Swumanoid » soit encore un prototype, le robot restant relativement loin de satisfaire les ambitions de l’équipe japonaise.
La première de ces ambitions aurait été de le déployer, à terme, pour le sauvetage des victimes de noyade. Pourtant, son usage le plus plausible devrait en faire un outil pratique d’analyse de la technique d’un nageur, sportif ou non, donnant des indices sur ce qui peut être amélioré dans les mouvements et dans le positionnement de celui-ci.
Bonus : l’accélérateur de particules et les figures de Lichtenberg
En bonus cette semaine, voici de splendides photos de fractales obtenus à l’aide d’un accélérateur de particules, créations de l’artiste américain Todd Johnson. Un accélérateur de particules pourrait donc servir à autre chose qu’à rechercher le Boson de Higgs ? Todd Johnson, loin de se servir d’outils et de supports de créations artistiques traditionnels, fait passer des cylindres ou des plaques de plexiglas dans un accélérateur de particules, bombardant les supports de plexiglas de protons qui s’y retrouvent comme « piégés ». Produisant jusqu’à cinq millions de volts, l’accélérateur de particules emprisonne les électrons dans chaque pièce de plexiglas, avec un potentiel électrique élevé. La charge est alors libérée avec précautions, en appliquant un choc mécanique à l’aide d’un outil bien isolée, permettant aux électrons de s’échapper bruyamment dans un éblouissant flash de lumière.
Lorsque la charge quitte le plexiglas, ils se regroupent et suivent un itinéraire ressemblant aux ramifications fractales. Le contrôle de l’énergie et du placement du faisceau d’électrons détermine la forme finale de l’ensemble, décrivant des figures de Lichtenberg.
Pour rappel, les figures de Lichtenberg sont des images prenant la forme d’une arborescence électrique, produites par une décharge électrostatique, pouvant se former sur la surface ou à l’intérieur d’un matériau isolant. A titre d’exemple, lorsqu’un homme est touché par la foudre, celle-ci laisse souvent une brûlure sérieuse ayant elle-aussi la forme d’une figure de Lichtenberg.
Par Moonzur Rahman, journaliste scientifique
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