L’excès de pesticides dans les aliments est un sérieux danger pour la santé publique. Une détection rapide et en amont d’éventuels résidus est donc cruciale. D’autant plus quand il s’agit d’aliments de la grande distribution comme les légumes, à la durée de conservation limitée. Yuanhao Zhou, de l’université Sun Yat-sen de Shenzen (Chine), et ses collègues chinois ont donc travaillé sur une nouvelle méthode de dépistage des pesticides à la surface des plantes. Pour cela, ils ont utilisé un spectromètre de masse miniature, capable de détecter et d’identifier les molécules d’intérêt par la simple mesure de leur masse. Ils l’ont ensuite couplé à un algorithme de deep learning qu’ils ont développé dans le but de trier les résultats efficacement et de manière autonome. L’ensemble du procédé est présenté en détail dans le numéro de Food and Chemical Toxicology en date du 28 août 2023.
Des pesticides repérés à « tous » les coups
Avant d’être analysé par le spectromètre de masse, le légume à dépister doit d’abord être prétraité. Il s’agit en réalité de faire ressortir les pesticides qu’il contient pour les rendre détectables par la machine. Les scientifiques chinois ont procédé à divers tests mettant en jeu cinq résidus de pesticides différents – carbendazime (biocide), diméthomorphe et azoxystrobine (fongicides), tébufénozide et cyromazine (insecticides) – répandus sur quatre types de végétaux (niébé, poireau, céleri et poivre). Selon eux, la méthode optimale de prétraitement consisterait à placer le légume dans un sac hermétique flexible. Le meilleur matériau pour ce dernier serait du polyamide mêlé à du polypropylène coulé, car ces composants interfèrent peu avec les composés ciblés. Le sac est également empli d’une solution composée de méthanol et d’eau en ratio 1:1 (son volume en mL devant égaler la masse de la plante en g). Le rôle de la solution, ou éluant, va être d’extraire les résidus du végétal. Après avoir agité le tout pendant une minute, le liquide est filtré à travers une membrane en nylon (maille de 0,22 μm) avant de passer à la spectrométrie.
Auparavant, d’autres modes de détection avaient été employés : résonance magnétique nucléaire, spectroscopie Raman, méthode immuno-enzymatique… Mais la spectrométrie est celle qui a montré les résultats les plus prometteurs en laboratoire : haute spécificité et sensibilité, et précision aussi bien en qualité qu’en quantité. Problème : les spectromètres de masse sont encombrants et compliqués à opérer. C’est pourquoi des versions miniatures ont été inventées et sont actuellement employées en protection environnementale, en sécurité publique et même lors d’examens médicaux. Toutefois, la miniaturisation s’accompagne d’une baisse notable de performance… Heureusement pour Yuanhao Zhou et son équipe, le développement de l’intelligence artificielle a mené au développement d’algorithmes de machine learning appliqués aux spectromètres de masse de taille réduite. Certains ont par exemple servi à la reconnaissance de fruits ou au diagnostic de parasitoses chez la volaille. Les chercheurs chinois, eux, ont conçu leur algorithme dans l’optique d’améliorer les capacités de détection sur site du spectromètre. Un pari réussi puisque ce dernier a pu repérer des quantités de pesticides aussi infimes que 10 μg/kg de légume, avec une précision de 99,62 % !
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