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Les raisons de la renégociation des parcs éoliens en mer français

Posté le par Pierre Thouverez dans Entreprises et marchés

Le gouvernement a surpris la filière éolienne en annonçant vouloir renégocier les contrats sur les futurs parcs éoliens en mer. Une initiative qui passe mal auprès des professionnels du secteur qui crient à la trahison après un premier accord de révision trouvé en décembre. En termes de communication, le message est pour le moins contradictoire avec la volonté affichée du ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, de défendre les énergies renouvelables. Explications.

République bananière

Sur la forme d’abord. L’amendement déposé début mars au Sénat prévoyant une renégociation des termes des appels d’offres éoliens en mer de 2012 et 2014 a été une vraie surprise pour la filière française. « Nous ne nous attendions pas à cela de la part du gouvernement. Modifier les règles du jeu unilatéralement en cours de route, ce sont le genre de décisions que l’on voit plutôt dans les républiques bananières », s’insurge un représentant du secteur sous couvert d’anonymat. En effet, l’initiative colle peu avec l’image pro-business affichée par le Président Emmanuel Macron depuis le début de son mandat. D’autant plus qu’un premier accord avait été négocié en décembre dernier dans lequel les lauréats des appels d’offres (EDF EN, Engie et Iberdrola) avaient concédé de limiter leurs sur-rémunérations. Le Syndicat des énergies renouvelables est monté au créneau dénonçant une mesure qui remet en question  « de manière rétroactive et par simple décret des projets d’énergies renouvelables pourtant légalement attribués dans le cadre d’appels d’offres ». Heureusement pour la filière, l’amendement n’a pas été approuvé au Sénat et est reparti en Commission mixte paritaire, passage obligatoire avant une seconde lecture à l’Assemblée nationale.

Une facture de 41 milliards d’euros

De son côté, le gouvernement estime être dans son bon droit évoquant des rémunérations, estimées à 200€/MWh, totalement déconnectées des conditions actuelles de marché. Lors de la présentation à la Chambre haute dudit amendement, Olivier Dussopt, secrétaire d’État aux comptes publics, avait calculé qu’avec de tels tarifs d’achat, les six parcs éoliens en mer allaient coûter la bagatelle de 41 milliards d’euros aux contribuables et qu’une telle somme pourrait être bien mieux employée. Lors des questions au gouvernement la semaine dernière, Nicolas Hulot n’a pas dit autre chose : « Je ne ferai rien pour fragiliser la filière des énergies marines renouvelables. Dans le même temps, vous comprendrez que les projets doivent être réalisés à un coût raisonnable, car nous sommes garants des deniers publics ».

Un argumentaire conforté par les récents appels d’offres étrangers qui se sont caractérisés par un soutien public quasi nul. L’appel d’offres qui s’est tenu en Allemagne en avril 2017 a fait l’effet d’une bombe. Sur les quatre parcs éoliens attribués, trois l’ont été sans subvention aucune. Cela signifie que les porteurs de projets (Dong Energy et EnBW) se sont engagés à n’être rémunérés que sur la vente d’électricité sur le marché de gros. Plus récemment, c’est le groupe Vattenfall qui s’est engagé à construire pour les Pays-Bas deux parcs éoliens en mer avec un business model sans aide publique. Des exemples qui confortent la position du gouvernement français, du moins en partie.

Courbe d’apprentissage

Comment expliquer un tel différentiel à seulement quelques centaines de kilomètres ? Tout d’abord en raison de la courbe d’apprentissage de l’éolien offshore qui, à l’instar du photovoltaïque, est beaucoup plus rapide qu’anticipée par la plupart des acteurs de l’énergie. Or, les projets français ont été attribués en 2012 et 2014, une éternité au regard de la vitesse à laquelle les coûts semblent baisser. Deuxièmement, la concurrence acharnée que se livrent les opérateurs, désireux de se placer les premiers sur les meilleurs sites en termes de vents, d’accessibilité, etc… Enfin, les lauréats français rappellent à l’envie que les projets allemands et danois ne contiennent pas le volet réseau puisque le raccordement en mer sera réalisé par le gestionnaire de réseau TenneT, contrairement aux parcs de l’Hexagone.

Sortie vers le haut

Alors que le gouvernement semble bien décidé à faire passer l’amendement, de discrètes négociations sont actuellement en cours pour trouver une sortie vers le haut. S’il semble acquis que le tarif d’achat va être revu à la baisse, il reste encore à déterminer combien et quels leviers actionner pour que les projets gardent une rentabilité. Plusieurs pistes sont à l’étude comme la fiscalité, estimée à 6 M€/an par projet,  ou les dispositions supplémentaires concédées par les exploitants pour protéger la faune et la flore. Les engagements de contenu local pourraient être aussi être allégés en faveur d’importations et les procédures administratives accélérées pour éviter les nombreux recours qui émaillent l’installation des parcs éoliens en France. « Nous comprenons l’objectif du gouvernement mais regrettons le message négatif envoyé à la filière qui a besoin de confiance, stabilité et visibilité pour se développer. Nous sommes en revanche à la disposition du gouvernement et de nos clients pour travailler à améliorer la compétitivité de ces projets dans la concertation », indique Cédric Turnaco, responsable Communication et Affaires publiques France de Siemens Gamesa Renewable Energy (SGRE), l’un des fournisseurs de turbines des parcs en mer. Selon toute vraisemblance, le feuilleton éolien devrait être réglé d’ici juin.

Par Romain Chicheportiche

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Posté le par Pierre Thouverez


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