La pandémie de coronavirus a mis à nu les fragilités des chaînes d’approvisionnement dans certains secteurs de l’industrie française. Ce bilan fut dressé dès le mois de mars 2020, lorsque les pays du monde entier, sur des timings différents, ont fermé leurs frontières et stoppé, au moins partiellement, leurs activités industrielles.
Quelques mois plus tard, le gouvernement annonçait son désormais célèbre plan de relance, un cocktail d’aides ciblées destinées à soutenir l’économie française face à une situation à l’ampleur difficilement prévisible, autant en terme de gravité que de durée.
Il est important de comprendre qu’au-delà de la crise sanitaire que nous traversons, la situation fragile de l’industrie française dans certains secteurs n’est pas nouvelle. L’exemple des composants électroniques, une production que la France a longtemps délaissé à cause de sa faible valeur ajoutée, est parlant aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, le volet « relocalisation » du plan de relance, doté de près d’un milliard d’euros et opéré par la BPI, a pour objectif de soutenir des entreprises françaises évoluant au sein des cinq secteurs ciblés et développant des modèles de production territoriale, agiles et stratégiques.
L’ambition de produire en France
Sous forme d’appel à projets, le gouvernement offre donc la possibilité aux entreprises – de la santé, de l’agroalimentaire, de l’électronique, aux intrants essentiels de l’industrie et aux applications industrielles de la 5G – de déposer leurs projets en cohérence avec les objectifs annoncés par le gouvernement.
A l’heure actuelle, deux phases de sélection ont été dévoilées et ce sont 105 projets au total qui ont été retenus. L’appel à projets est d’ailleurs toujours ouvert, jusqu’au 21 juin 2021. Près de 10 000 dossiers de candidatures ont d’ores et déjà été déposés.
Dans ce dossier, la rédaction a choisi de revenir sur trois projets portés par des entreprises françaises ayant été retenus par le gouvernement, sur les secteurs de l’électronique, de la 5G et de l’agroalimentaire.
Dans le secteur de l’électronique, la France est extrêmement dépendante de fournisseurs étrangers sur certains composants de base. L’entreprise SRT Microcéramique, une PME du secteur de l’électronique, fait partie des deux seuls fabricants européens de condensateurs céramiques multicouches. L’entreprise, dont le projet a été sélectionné par le gouvernement, porte le projet « CAPAFRANCE », qui vise à tripler la production de ces condensateurs. Ces composants présents dans tout système électronique et pour lesquels la France et l’Europe dépendent à 99% de fabricants américains et asiatiques pourraient, s’ils étaient produits en Europe, redonner à la France une plus grande indépendance industrielle sur ce secteur.
Quand relocalisation rime avec souveraineté industrielle
Dans le secteur de la 5G, les défis sont immenses. Alors que l’enjeu autour de la 5G industrielle offre de nombreuses opportunités, l’image de cette technologie est écornée dans le débat public. Développer une souveraineté industrielle autour de la 5G constitue pour autant un objectif stratégique pour la France. Sequans Communications est une startup créée en 2003. L’entreprise est aujourd’hui spécialisée dans la fourniture de semi-conducteurs pour les terminaux 4G et 5G. Le projet CRIIoT (Critical IoT), porté par l’entreprise, ambitionne de développer une solution permettant aux industriels, et plus particulièrement aux secteurs dits « verticaux », d’évaluer puis de déployer rapidement des solutions 4G/5G pour connecter leurs objets et optimiser et sécuriser leur usage. C’est le second exemple sur lequel la rédaction a choisi de s’attarder.
Le secteur agroalimentaire fait aussi partie des secteurs stratégiques, puisqu’il est inextricablement lié à l’indépendance alimentaire de l’Hexagone. Parmi les projets sélectionnés pour le moment, la rédaction s’est arrêtée sur l’entreprise Né d’une seule ferme. Cette start-up propose des solutions clés en main pour les entreprises agricoles. Son concept consiste à déployer des containers équipés en yaourteries, déplaçables et fabriqués en France, dans des fermes sur tout le territoire métropolitain. Le concept porté par Né d’une seule ferme vise à renforcer la souveraineté alimentaire du pays, tout en permettant aux producteurs de lait de remonter dans la chaîne de valorisation de leur production.
Les deux derniers secteurs stratégiques ciblés par le volet relocalisation du plan de relance sont ceux de la santé et des intrants essentiels à l’industrie. Sur le secteur de la santé, les projets sélectionnés partagent l’ambition de produire sur le territoire des molécules médicamenteuses stratégiques, qui permettront à l’industrie de la santé de fonctionner de manière plus indépendante. La problématique est similaire pour les intrants essentiels à l’industrie : que ce soit pour les aciers, les terres rares, les poudres, les traitements de surface… tous les projets retenus visent à relocaliser des productions stratégiques sur le sol français.
On le voit, les 5 secteurs ciblés par le gouvernement portent des enjeux stratégiques en termes de souveraineté industrielle pour le pays. Si le choix fait par le gouvernement, de saupoudrer les aides sur des dizaines de projets différents divise, les mois qui viennent permettront de voir dans quelle mesure ces initiatives ciblées favorisent à la fois une relocalisation de certaines productions, et un repositionnement de l’industrie hexagonale.
Par Pierre Thouverez
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