Seulement 22 % des plastiques, toutes utilisations confondues, ont été recyclés en fin de vie en France en 2016. Si le taux de collecte des bouteilles est en moyenne de 55 %, il reste bien inférieur à celui des pays nordiques (plus de 90 %). Face à ce constat, le gouvernement a décidé d’agir et lance sa feuille de route Economie Circulaire. En vue de recycler 100 % des plastiques, il compte notamment améliorer la collecte, jouer sur la fiscalité et augmenter le taux d’utilisation des matières recyclées.
Pour permettre aux consommateurs de mieux identifier les produits recyclables lors de leurs achats, le pictogramme Triman sera obligatoire sur tous les produits recyclables dès 2021. Il sera accompagné d’une information sur la nature du geste de tri à effectuer. Le « point vert » et autres pictogrammes qui entraînent de la confusion seront interdits.
Améliorer la collecte des plastiques
Dans un premier temps, le gouvernement entend améliorer la collecte des plastiques. La priorité sera mise sur les zones où les taux de collecte sont les plus bas, notamment les zones urbaines les plus denses. Par ailleurs, depuis juillet 2016, les entreprises produisant plus de 1.100 litres de déchets par semaine – soit une vingtaine de sacs poubelles standards de 50 litres – doivent trier, entre autres, leurs plastiques. Cependant, cette loi est loin d’être respectée. La feuille de route vise donc à augmenter le recyclage dans le secteur des cafés, hôtels et restaurants. Toutefois, encore aucun véritable contrôle et aucune sanction ne sont annoncés pour les entreprises ne respectant pas leurs obligations.
La modernisation des centres de tri d’ici 2022 sera l’occasion de simplifier et harmoniser les règles de tri des déchets sur l’ensemble du territoire. Cette modernisation devrait permettre d’atteindre un taux de recyclage « au mieux [de] 70 % à l’échelle nationale« . D’autres efforts doivent donc être mis en place. La mesure phare est la multiplication de nouveaux types de consignes pour le tri hors-domicile, à l’instar des machines automatisées de Lemon Tri et Canibal, ou des kiosques Réco. Le gouvernement veut également développer la « consigne solidaire » dans les collectivités. « Chaque nouvelle bouteille et canette collectée contribuerait au financement d’une grande cause environnementale, de santé ou de solidarité« , explique la Feuille de route. Ces opérations seront financées grâce à un soutien spécifique à la tonne collectée reversé par les éco-organismes agréés de la filière des emballages. Des expérimentations de consigne seront également lancées dans les territoires ultramarins volontaires. Par ailleurs, trois nouvelles filières de responsabilité élargie des producteurs (REP) seront créées pour développer le recyclage des jouets, des équipements de sport et des articles de bricolage et de jardin.
Pour une nouvelle fiscalité des déchets
Le taux de TVA sera réduit à 5,5 % pour les activités contribuant à l’économie circulaire, comme la prévention, la collecte sélective et la valorisation des déchets. De même, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) va être repensée pour que le recyclage soit favorisé par rapport à la mise en décharge. Les déchets plastiques qui ne peuvent pas être recyclés, comme ceux contenant des substances polluantes organiques persistantes ou les déchets médicaux, seront exonérés de TGAP s’ils sont incinérés avec valorisation énergétique.
En outre, les frais de gestion de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) seront réduits de 8 à 3 % en cas d’introduction d’une part de tarification incitative. Cette dernière vise à faire payer les usagers en fonction de la quantité de déchets qu’ils produisent. Cela diminuera d’autant le coût de gestion des déchets et facilitera les investissements de modernisation des centres de tri.
Augmenter le recours aux plastiques recyclés
D’ici l’été prochain, le gouvernement attend des engagements volontaires de la part des industriels de la filière plastique. Ces engagements se feront résine par résine, en particulier pour le polystyrène (PE), le polyéthylène (PE), le polypropylène (PP) et le polychhlorure de vinyle (PVC). Les secteurs concernés sont l’emballage, le bâtiment, l’automobile et les équipements électriques et électroniques.
La Fédération de la plasturgie et des composites travaille ainsi sur le déploiement d’objectifs volontaires d’introduction de matières recyclées par filière. Elle juge qu’elle pourra atteindre un taux moyen d’incorporation de 40% de recyclé. Avec des aides de l’Etat, il serait possible d’arriver à un taux de recyclage nettement plus élevé. Les annonces pourraient néanmoins être insuffisantes pour atteindre l’objectif recherché.
Des mesures qui manquent à l’appel
Pour augmenter le recyclage des plastiques, il faudra développer de nouvelles filières pour les plastiques de moindre valeur, notamment le polystyrène et les films en polyéthylène. Suite à l’interdiction des importations chinoises de plastiques en mélange, il faudra également développer de nouvelles usines de surtri et de lavage en France et en Europe. Aucune annonce n’est faite dans ce sens.
Un point important reste à préciser. Les éco-organismes devront élaborer un plan quinquennal sectoriel pour développer l’éco-conception des plastiques. Par ailleurs, des sanctions sont prévues pour les éco-organismes qui n’atteignent pas leurs objectifs environnementaux. Toutefois, rien ne garantit que ces deux mesures suffiront à faire en sorte que seuls des plastiques 100 % recyclables soient mis sur le marché dans quelques années. En plus, aucun soutien particulier n’est prévu pour démocratiser la réutilisation des plastiques ou pour développer les bioplastiques.
La France a interdit le recours aux microbilles de plastique dans les cosmétiques rincés à usage d’exfoliation ou de nettoyage. Elle poussera cette interdiction au niveau européen. La France compte aussi pousser l’interdiction des plastiques fragmentables et des contenants en polystyrène expansé pour la consommation nomade. Par ailleurs, afin de limiter la dispersion des granulés de plastique, le gouvernement imposera d’ici 2022 l’installation de filtres de récupération des particules de plastiques sur les sites où celles-ci sont produites ou utilisées en France. En revanche, aucune mesure ne vise à interdire ou diminuer le recours aux plastiques à usage unique, comme cela est envisagé dans de nombreux pays.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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