Le président de la République française a annoncé un effort de réarmement national caractérisé par une production massive d’équipements de guerre. L’industrie de défense est-elle capable de sortir de sa torpeur pour garantir la souveraineté de l’armée française ? L'Europe peut-elle s'affranchir de la tutelle américaine ?
Au moment même où les États-Unis et la Russie négocient un cessez-le-feu en Ukraine, le chef de l’État français affiche la volonté martiale de réarmer le pays. Dans cette optique, les grands industriels français de l’armement ainsi que les représentants de 4 000 PME du secteur ont été convoqués à l’Élysée vendredi dernier. Parmi eux, Safran, Dassault, Thalès, Naval group[1] ou encore KNDS[2] . Aujourd’hui, malgré une augmentation de la cadence, les limites de production persistent.
Rafales, canons Caesar… Quels sont les atouts de la France ?
La France est la première armée d’Europe[3] . La LPM[4] 2024-2030, d’un budget de 413 milliards d’euros, vise à adapter et à moderniser les équipements des systèmes de drones et des systèmes de missiles antiaériens.
La production du Rafale, l’un des meilleurs avions de combat au monde, a connu une montée en puissance ces dernières années en anticipant l’afflux des commandes. En 2020, un seul Rafale sortait des lignes d’assemblage de l’usine de Mérignac tous les mois, contre deux à trois aujourd’hui. Le PDG de Dassault Aviation, a annoncé se mettre en capacité « s’il le fallait » pour sortir cinq Rafales par mois.
KNDS, qui fournit l’armée de Terre en canon Caesar dans le cadre du programme Scorpion[5], a aussi intensifié la cadence de sa ligne de production. Le canon Caesar, à la capacité de tir de six obus par minute, est un des fleurons de l’artillerie française. La durée de production usuelle de 15 mois a été divisée par deux depuis la guerre en Ukraine. Sur le site d’assemblage de Roanne, la production du Caesar est passée de deux par mois à six en l’espace de trois ans. Près de 70 exemplaires équipent l’armée ukrainienne.
Néanmoins, on ne peut pas, stricto sensu, parler d’économie de guerre ; il n’y a, pour le moment, ni mobilisation de l’appareil productif français ni réquisition de la main-d’œuvre au profit des forces armées.
« L’Europe de la défense » : le serpent de mer
Le 4 mars dernier, un plan historique intitulé « ReArm Europe » de 800 milliards d’euros a été présenté par la Commission européenne.
L’Europe dispose d’un tissu prestigieux d’entreprises spécialisées dans la défense qui pourrait lui permettre de jouer sa partition. En effet, 27 entreprises européennes figurent dans le top 100 mondial des plus grandes entreprises du secteur[6] . On y retrouve le leader mondial britannique BAE Systems, l’allemand Rheinmetall ou encore l’italien Leonardo. Cinq[7] entreprises françaises figurent dans ce classement. Ces entreprises vont profiter des hausses de budgets votées par les États européens. L’annonce d’une course au réarmement a déjà fait bondir les actions de ces grandes sociétés du secteur de la défense.
Avec 41 entreprises sur 100, les États-Unis dominent le classement. Même si les états européens souhaitent s’émanciper du parapluie américain pour créer « l’Europe de la défense », le chemin risque d’être long : entre mi-2022 et mi-2023, 64 % des commandes européennes d’armement sont attribuées aux États-Unis. Pour inverser la tendance, l’instauration d’une préférence européenne pour l’acquisition d’équipements militaires peut être envisagée. Privilégier, par exemple, le Rafale au F-35 américain qui est devenu incontournable pour les forces aériennes européennes.
Selon le baromètre industriel de l’État, la réindustrialisation, en France, a été en perte de vitesse en 2024 et même en recul pour les créations nettes de nouvelles usines.
De son côté, la Russie a produit 1,4 million de drones en 2024 – soit dix fois plus qu’en 2023. La Biélorussie a, par ailleurs, annoncé le 6 mars dernier être prête à accueillir une usine russe capable de produire jusqu’à 100 000 drones par an…
[1] Leaders mondiaux de la construction de navires militaires
[2] Groupe franco-allemand : KMW+Nexter Defense Systems
[3] Selon le dernier classement de global firepower
[4] Loi de programmation militaire
[5] Programme de modernisation de l’Armée de terre française
[6] Classement établi par l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI)
[7] Thalès, Naval Group, Safran, Dassault Aviation et le Commissariat à l’énergie atomique
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