Propriétaire de Priceminister en France, le groupe revoit sa stratégie de développement. Ses activités télécom et tourisme affichent des résultats positifs. Mais sa branche e-commerce est fragilisée.
Qui connaît Rakuten en France ? Certainement les internautes qui vont sur Priceminister. Cette entreprise qui est l’un des poids lourds du commerce au Japon a acquis 100 % du capital du site français d’achats entre particuliers en 2010 pour 200 millions d’euros. « En associant nos forces respectives, Priceminister va pouvoir accélérer sa croissance, en France et en Europe » avait déclaré à l’époque Pierre Kosciusko-Morizet, cofondateur et PDG de Priceminister.
Six ans plus tard, cet objectif n’a pas été atteint. Dans l’hexagone, Amazon écrase la concurrence avec 19 millions de visiteurs par mois, soit trois fois celle de Priceminister. Le site français s’est délesté de ses déclinaisons spécialisées dans le voyage, l’immobilier, l’automobile, mais aussi de ses bureaux en Espagne et en Angleterre.
Malgré ces mauvais résultats, l’entreprise japonaise confirme son intérêt pour l’Allemagne et la France et donc pour Priceminister (1 million de clients et entre 30 000 et 50 000 transactions par jour). Le groupe a les moyens d’encaisser une baisse de régime. Sur l’année 2015, Rakuten affiche un chiffre d’affaires de 5,5 milliards d’euros (+19 %) et un résultat net de 346,7 millions d’euros. Le groupe du milliardaire Hiroshi Mikitani reste le leader du e-commerce au Japon, juste devant la filiale locale d’Amazon. Mais comme le commerce en ligne est devenu très concurrentiel, Rakuten doit multiplier les services (promotions régulières, expéditions accélérées…) pour conforter sa position.
Au Japon, il vient même de lancer les premières livraisons par drone pour les golfeurs qui souhaitent commander du matériel ou des sandwiches. Baptisé « Tenku », le drone a été conçu par ACSL (Rakuten a investi 6,4 millions de dollars dans ce laboratoire), mais son logiciel de reconnaissance visuelle a été mis au point en collaboration avec les ingénieurs de Rakuten. « Le Japon a perdu face aux étrangers sur les marchés des smartphones et des ordinateurs. Nous ne devons pas commettre la même erreur avec les drones », explique Kenzo Nonami, le PDG d’ACSL.
Le Japonais ambitionne toujours de se développer à l’étranger en multipliant les acquisitions : Viber (application de téléphonie et de messagerie en ligne), Ebates (qui offre des rabais sur les achats sur le web), OverDrive (livres électroniques) et le canadien Kobo qui propose des liseuses et services de librairie en ligne.
Les paiements sur internet et la FinTech apparaissent comme ses axes prioritaires de croissance. Après avoir pris des parts dans la start-up britannique Currency Cloud (règlements transfrontaliers) et dans la société californienne WePay (qui développe une API pour les paiements), le Japonais a placé 15 millions de dollars dans Azimo, une jeune entreprise britannique spécialisée dans les transferts d’argent. Il a surtout lancé un fonds d’investissement de 92,8 millions d’euros afin de devenir actionnaire de start-ups qui innovent dans les services financiers. Baptisé « Rakuten FinTech Fund », il participera à des levées de capitaux afin de soutenir des projets américains et européens.
Enfin, Rakuten s’intéresse à l’économie collaborative. En 2015, il a pris 12 % du capital de Lyft, un service rival d’Uber aux États-Unis. Plus récemment, il a investi 92 millions de dollars dans Cabify. Cette start-up espagnole propose l’équivalent d’Uber en Espagne ainsi qu’en Amérique du Sud. Le patron du groupe nippon est conscient que des obstacles seront présents sur la route. « Nous voulons vraiment atteindre notre objectif d’être une des plus importantes sociétés de services internet au monde. Pour ce faire, nous devons nous attendre à beaucoup de difficultés. Mais c’est en essayant à maintes reprises, avec des erreurs et échecs, que nous surmonterons les obstacles pour créer une organisation plus forte », a-t-il reconnu.
Par Philippe Richard
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