Définir le métavers est une tâche absolument indispensable. En effet, on trouve encore dans la littérature et dans les médias des définitions qui mélangent malencontreusement la finalité du métavers, ses fonctions, ses applications et les techniques sur lesquelles il repose. Il faut rejeter ces approches, parfois trop centrées sur les aspects technologiques, ou d’autres confondant le métavers avec la réalité virtuelle...
Un extrait de « De la réalité virtuelle aux métavers » par Philippe FUCHS
Alexandre Bouchet, directeur de Laval Virtual[1], donne cette définition technique du concept de métavers : « C’est un vaste réseau de mondes et de simulations 3D, persistants et calculés en temps réel, qui par interopérabilité prennent en charge entre eux la continuité de l’identité, des objets, des données et des droits, et qui peuvent être expérimentés de manière synchrone par un nombre très important d’utilisateurs, chacun ayant un sentiment individuel de présence et d’incarnation ». Il est difficile pour les spécialistes du domaine de faire des prévisions à deux ou trois ans sur un seul type d’usage. Rappelons les fameuses prévisions erronées pour la télévision 3D stéréoscopique (3Ds). Entre autres, en 2010, le site displaysearch.com a publié une étude dont les résultats prévoyaient des centaines de millions de téléviseurs 3Ds dans les années suivantes… De même, plus étonnant, les écrans d’ordinateur allaient être stéréoscopiques ! Pour Philippe Fuchs : « Toutes les prévisions sur les nouvelles technologies ont autant de chance d’être fausses qu’exactes ».
Un métavers conceptuel pour quatre métavers appliqués
Il est possible de classifier les métavers en tant que créations en quatre types.
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- Avec blockchain, ou décentralisé. Il s’agit d’une pratique de stockage et de transmission de données sous forme de blocs liés les uns aux autres et protégés contre toute modification. Elle peut être comparée à un grand livre infalsifiable et traçable. Basée sur un protocole de gestion numérique de données décentralisées, en libre accès, elle enregistre les transactions sur une base de données distribuée, sécurisée et transparente.
- Sans blockchain, ou centralisé.
- Avec usage de visiocasque, c’est-à-dire avec immersion corporelle. On parle ici de proprioception. Celle-ci renseigne la position et les mouvements du corps et de ses membres par rapport à l’environnement extérieur. Les récepteurs proprioceptifs sont les mécanorécepteurs des muscles, des tendons et des articulations, ainsi que les vestibules des oreilles internes. Les deux systèmes vestibulaires informent le cerveau du mouvement et de l’orientation de la tête. Les organes tendineux de Golgi, eux, déterminent les forces exercées sur le muscle à la différence des fuseaux neuromusculaires qui déterminent la longueur et les changements de longueur du muscle.
- Sans usage de visiocasque, c’est-à-dire sans immersion corporelle. On parle alors d’extéroception. Une notion qui regroupe tous les stimuli sensoriels provenant du monde extérieur au corps, et qui vont permettre d’observer le monde environnant l’individu. Certains extérocepteurs discernent à distance l’environnement (vision, ouïe et odorat), tandis que d’autres sont des récepteurs de contact. Cette distinction n’est pas anodine et a un impact sur la technologie des interfaces. Pour réaliser des stimulations tactiles sur les mains ou autres parties du corps, il faut obligatoirement s’équiper de dispositifs. Une contrainte ergonomique dont on souhaiterait être dispensé.
Pour certains, le métavers optimal ne peut s’envisager que décentralisé et avec tous les usagers en immersion proprioceptive, via visiocasques, ce qui est discutable.
En effet, le critère d’immersion corporelle/proprioceptive dépend aussi de considérations technico-économiques. Le grand public ne pourra s’équiper que progressivement de visiocasques, tout en sachant qu’il n’est pas certain que tout le monde souhaite acquérir une telle interface visuelle. Rappelons qu’il a fallu une quarantaine d’années à l’ensemble des Français pour s’équiper d’ordinateurs, proposant de nombreux services et usages essentiels. Au début des années 1980, on a vu l’apparition des premiers micro-ordinateurs[2], jusqu’aux alentours de 2020, où la grande majorité de la population française était équipée d’un ordinateur. En conséquence, l’immersion visuelle dans les métavers se fera via les ordinateurs, tablettes, smartphones, consoles de jeux et, pour ceux qui peuvent s’en procurer, grâce aux visiocasques ou aux lunettes de réalité augmentée.
[1] Laval Virtual est un salon annuel dédié aux innovations et aux technologies Immersives. L’édition 2023 a lieu du 12 au 16 avril.
[2] Des micro-ordinateurs IBM, surtout, mais aussi Apple.
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