Une étude a évalué les impacts du Pacte Vert européen dans le secteur agroalimentaire. Sous certaines conditions, des résultats significatifs sont envisagés sur le plan climatique et environnemental, tandis que le secteur de l'élevage risque d'être impacté très négativement. Une incertitude demeure sur la capacité des consommateurs à changer de régime alimentaire.
Lancé en décembre 2019, le Pacte Vert européen ou European Green Deal est une initiative de l’Union européenne visant à parvenir à la neutralité carbone à l’horizon 2050. Sur le plan des systèmes agro-alimentaires, une approche globale est mise en œuvre, en considérant l’ensemble de la chaîne alimentaire, de la ferme à l’assiette. La démarche vise à agir sur trois leviers principaux : le développement d’une agriculture agroécologique, la réduction des pertes et gaspillages alimentaires et l’adoption de régimes alimentaires plus sains et plus durables. Des chercheurs de l’INRAE ont analysé quels seront les impacts de ces leviers et ont publié leurs travaux dans la revue de l’OFCE.
Grâce à des simulations réalisées à partir d’un modèle original du secteur agroalimentaire européen calibré sur les données des années 2018 à 2020, les auteurs de cette étude estiment que l’utilisation conjointe des trois leviers peut permettre d’obtenir des résultats significatifs sur le plan climatique et environnemental. D’ailleurs, leur analyse suggère qu’il n’existe pas de véritable voie alternative, puisqu’en poursuivant le modèle actuel basé sur l’intensification de la production, il faudrait retirer des surfaces de la production agricole pour restaurer la biodiversité, tout en augmentant les rendements sur les terres restant dévolues à la production agricole.
Les chercheurs pointent tout de même du doigt que les impacts du Pacte Vert seront sensiblement différents selon qu’un seul levier est actionné ou que les trois leviers sont utilisés simultanément. Par exemple, la mise en œuvre du seul levier de l’agroécologie, qui prône une extensification de l’agriculture par un moindre recours aux intrants chimiques et à l’augmentation des surfaces en agriculture biologique, conduirait à des bénéfices climatiques et écologiques amoindris, du fait notamment de fuites d’émissions de gaz à effet de serre vers l’étranger liées à l’importation de denrées agricoles.
Adopter des régimes alimentaires moins riches en produits d’origine animale
Selon ces travaux de recherche, l’utilisation simultanée des trois leviers prévus par le Pacte Vert augmenterait sensiblement les bénéfices climatiques et environnementaux. Ainsi, les émissions de gaz à effet de serre liées à la production agricole domestique diminueraient de 249 MT eq CO2 (millions de tonnes en équivalent CO2). À cela, s’ajouterait une réduction de 20 MT eq CO2 des émissions incorporées dans les échanges de denrées alimentaires avec l’étranger. Dans ce scénario, un bénéfice sur le plan nutritionnel est aussi prédit, tout comme une baisse des dépenses alimentaires de 15 %.
Mais ces effets positifs ne devraient être possibles que si les comportements de consommation évoluent de façon très substantielle, à la faveur de régimes alimentaires moins riches en produits d’origine animale. Pour y parvenir, l’une des voies d’action consiste à informer les consommateurs, à travers des campagnes de communication. Une autre porte sur le système de prix et vise à taxer ou au contraire subventionner les prix des aliments selon leurs caractéristiques nutritionnelles et environnementales. Une autre solution consiste à agir sur l’offre, en exposant par exemple les consommateurs à des menus végétariens dans la restauration collective.
Reste que cette hypothèse d’un changement de la dynamique des préférences alimentaires des consommateurs est une des principales inconnues des évolutions à venir. Cette modification aura également un impact très négatif sur l’économie des filières animales, avec un secteur de l’élevage qui risque d’être confronté à un choc de la demande auquel il ne pourra pas faire face sans des mesures fortes d’accompagnement des pouvoirs publics. « Les conséquences économiques du Pacte vert pour les acteurs des filières animales sont une difficulté majeure qui, par construction, est trop peu prise en compte dans les exercices reposant sur des modèles biophysiques de biomasse et visant à établir la faisabilité technique d’un modèle agricole et alimentaire européen reposant sur l’agroécologie et des régimes alimentaires contenant moins de produits animaux », alertent les auteurs.
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