Le 19 novembre, le premier ministre Manuel Valls évoquait la possibilité d'attaques chimiques. « Il ne faut aujourd’hui rien exclure. Je le dis bien sûr avec toutes les précautions qui s’imposent mais nous savons et nous l’avons à l’esprit. Il peut y avoir aussi le risque d’armes chimiques ou bactériologiques ». Ces simples mots prononcés pendant un discours devant l'Assemblée nationale, ont par la suite été largement relayés par la presse.
Fallait-il faire preuve d’autant de transparence dans ce contexte post-attentats ? Certains s’interrogent, estimant qu’une telle annonce pourrait créer une psychose au sein de la population voire de donner aux terroristes de nouvelles façons d’envisager leurs actions. Une chose est sûre, c’est un risque que le gouvernement ne néglige pas. Ce qui implique de prendre les mesures nécessaires sans dramatiser pour autant.
Que fait le gouvernement pour parer aux attentats ?
Il a réagi très vite, en publiant l’arrêté du 14 novembre 2015, en vue de la COP21. Celui-ci offre tout pouvoir au service de santé des armées d’approvisionner en sulfate d’atropine 40 mg/20ml PCA, un traitement contre les agents neurologiques (sarin, tabun…), des services d’urgence civils (SAMU).
Le gouvernement a également augmenté le niveau de surveillance des réseaux d’eau à son maximum. Les principaux sites de Paris sont surveillés par des agents et filmés en permanence par des caméras de vidéosurveillance. Personne ne peut y entrer hormis le personnel habilité. Mais en cas d’intrusion, des capteurs disséminés un peu partout alerteraient rapidement le centre de contrôle. En outre, la société Eau de Paris, qui gère l’approvisionnement en eau potable pour la ville de Paris, a accru le niveau de chlore afin de s’assurer qu’il n’y ait pas de contamination bactériologique. Si jamais les contrôles montraient une trace de contamination sur l’un des lieux d’approvisionnement (Paris en compte cinq), ce dernier serait automatiquement bouclé et seuls les clients prioritaires (hôpitaux) continueraient d’être alimentés. Car il faut savoir qu’un jour de consommation d’avance est toujours prévu. Cependant, « pas de menaces particulières » ne sont à noter.
Il a mis en place le plan Piratox, intégré au plan Vigipirate, qui se destine à la « prévention et à la vigilance face à une menace terroriste de nature chimique avec un volet judiciaire comprenant la recherche, l’identification et la neutralisation des auteurs d’un attentat ». Ses missions sont principalement axées autour de la décontamination, que ce soit des lieux touchés ou des victimes.
Suite à l’affaire, en 2001, des enveloppes contaminées au bacille du charbon (bacillus anthracis), une bactérie charbonneuse pouvant être létale pour l’homme et qui avaient d’ailleurs causé la mort de cinq personnes, le ministre de la Santé de l’époque, Bernard Kouchner, créait le plan Biotox. Ce plan plusieurs fois remanié par la suite, s’articule autour de la gestion de crise et la veille sanitaire pour détecter au plus tôt le risque d’une épidémie. Cela se traduit par la surveillance de tout un réseau de laboratoires ou encore la formation et l’entraînement de personnels, prêts à intervenir en cas d’alerte.
Quelles sont les armes chimiques les plus dangereuses et quels sont leurs effets ?
Le sarin, « une substance inodore, incolore et volatile, de la famille des organophosphorés, un neurologique pour l’homme et l’animal » fait partie de la famille des agents neurologiques, au même titre que le soman, le tabun et le VX. Il attaque le système nerveux humain, au niveau des synapses. Ce gaz mortel est considéré depuis 1993, comme une arme de destruction massive par les Nations Unies. En 1988, Sadam Hussein, s’en servait contre les kurdes dans le nord de l’Irak.
Il entre dans la catégorie des agents vésicants, le gaz moutarde, aussi nommé ypérite, est « un composé chimique cytologique et vésicant qui a la capacité de former de grandes vésicules sur la peau exposée ». Il inflige des brûlures sur la peau, les yeux et les poumons.
Les agents suffocants, comme le chlore, la chloropicrine et le phosgène, provoquent des lésions et des irritations aux voies respiratoires et aux poumons. Ils entraînent la mort par asphyxie.
Il faut savoir que les armes chimiques ont été interdites aux lendemains de la Première Guerre mondiale, considérée comme la première guerre chimique, en 1925 par la signature du protocole de Genève. Par la suite, la Convention sur l’interdiction des armes chimiques, signée en 1993, est venue renforcer ce traité en interdisant « la mise au point, la fabrication, le stockage et l’usage des armes chimiques ».
Doit-on vraiment craindre des attentats ?
Manuel Valls précisait sur France 2, peu après son discours devant l’Assemblée nationale, que le risque était bien présent mais toutefois « extrêmement limité ». Depuis les attentats, on le sait, « tout est possible » mais cela ne signifie pas qu’il y a un risque de ce type sur le territoire. Quant au spécialiste des armes chimiques, Olivier Lepick, il confiait, rassurant, « qu’il y avait un certain nombre de barrières techniques et logistiques » par rapport à « un attentat conventionnel ». La complexité de ce genre d’attaques et leurs résultats les rend moins intéressantes pour les terroristes. Les armes chimiques peuvent en effet être difficiles à employer ou a fabriquer, à cause de leur caractère parfois instable. Sans compter le transport jusqu’en France qui s’avère un grand obstacle. De telles opérations ne sont donc pas simples à mener. Pour cette raison et bien qu’il soit de notoriété publique que l’État islamique (EI) dispose d’une petite quantité de gaz moutarde, selon un rapport de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), il n’y aurait pas de raison de s’alarmer outre mesure.
Par Sébastien Tribot
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