Décryptage

Quelles évolutions réglementaires pour prévenir le risque sur les sites industriels ?

Posté le 23 novembre 2020
par Pierre Thouverez
dans Environnement

Suite à l’accident industriel survenu le 26 septembre à partir de 2h40 du matin sur les sites de Lubrizol et de Normandie Logistique, le Ministère de la transition écologique a élaboré un plan d’action, présenté le 11 février 2020. Ce plan s’appuie sur les retours d’expériences des services compétents, afin d’améliorer la prévention et l’information quant aux risques relatifs à l’exploitation de sites industriels.

Si le site de Normandie Logistique est un entrepôt, il est important de rappeler que celui de Lubrizol est un établissement de production d’additifs pour les lubrifiants, classé Seveso haut.

Le retour d’expérience suite à l’accident a permis de récolter des informations émanant de tous les services compétents impliqués dans la gestion accidentelle et post-accidentelle, permettant une analyse approfondie et la formulation de recommandations. Ce rapport a été remis aux autorités en février 2020. Suivront d’autres travaux, comme la mission d’information réalisée par l’Assemblée nationale (rapport remis le 12 février 2020), la commission d’enquête du Sénat (rapport publié le 2 juin 2020), et enfin une seconde mission inter-inspections, sur la gestion de la crise, dont les résultats ont été publiés le 8 juillet 2020.

Le plan d’action présenté en février dernier et paru au journal officiel le 26 septembre 2020 contient une partie relative au renforcement de la réglementation en matière de prévention et de préparation à la gestion des accidents. Ces textes – 2 décrets et 5 arrêtés – dont nous allons énumérer les points les plus importants, renforcent significativement les obligations des sites Seveso et les prescriptions relatives à la prévention des risques d’incendie (et à la limitation de leurs conséquences). Ces prescriptions seront en vigueur dès le début de l’année prochaine, avec un échéancier de mise en conformité courant jusqu’en 2026.

Renforcement des obligations des sites Seveso

Un décret et un arrêté sont consacrés aux sites Seveso. L’idée directrice est de réévaluer périodiquement les mesures de sécurité et les évaluations du danger, comme l’a expliqué Anne-Laure Fauquet, membre de la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) et principale rédactrice de cet arrêté et de ce décret, lors d’une conférence en ligne – par précaution, en raison de la pandémie de Covid-19 – organisée par la DGPR le 3 novembre dernier : « Lors du réexamen de l’étude de dangers, l’exploitant doit également recenser les technologies éprouvées et adaptées qui, à coût économique acceptable, pourraient permettre une amélioration significative de la maîtrise des risques, compte tenu de l’environnement du site. »

Par la suite, l’exploitant hiérarchise ces technologies, en fonction, entre autres, de la probabilité, de la gravité et de la cinétique des accidents potentiels qu’elles contribueraient à éviter, et du coût rapporté au gain en sécurité attendu. A la suite de cela, l’exploitant se prononce sur les technologies qu’il retient et précise le délai dans lequel il les met en œuvre.

Par ailleurs, le décret et l’arrêté obligent désormais les établissements Seveso seuil bas à établir un POI (plan d’opération interne), à compter du 1er janvier 2023.

En ce qui concerne l’information du public, obligation est faite à l’exploitant de mettre à disposition, en ligne, toute une liste d’informations relatives au site Seveso en question. Toutes les modifications, ayant par exemple pour conséquence un passage « seuil haut » à « seuil bas », doivent également être publiques. La coopération entre établissements Seveso voisins, pour permettre la prise en compte de la nature et de l’étendue du danger globale d’accident majeur, devient également une obligation.

Etat des matières stockées

Le volet concernant l’état des matières stockées du plan d’action introduit une section spécifique dans l’arrêté ministériel du 4 octobre 2010 relatif à la prévention des risques accidentels au sein des ICPE soumises à autorisation. L’objectif est double. Il s’agit «  d’imposer de manière générique et transverse à l’ensemble des installations soumises à autorisation les dispositions « de base » relatives à l’état des stocks, mais également de définir des dispositions spécifiques pour certaines catégories d’installations. »

Des dispositions spécifiques sur l’état des stocks – mise à jour hebdomadaire, mise à disposition des autorités sanitaires, des services d’inspection, des services de secours et du public – sont également mises en place.

Liquides inflammables et combustibles

Ce volet du plan d’action réorganise les textes existants, en créant un arrêté nouveau relatif au stockage des liquides inflammables en récipients mobiles pour tous les sites à autorisation.

Entrepôts de matières combustibles

En ce qui concerne les entrepôts, l’évolution de la réglementation vise à « éviter le saucissonnage des entrepôts et appréhender les risques à l’échelle d’un ensemble de bâtiments de stockage, relever les seuils d’autorisation au profit du régime d’enregistrement, et traiter en cohérence le sujet de l’évaluation environnementale relative à l’artificialisation ».

Enfin, une partie des textes réglementaires présentés vise à améliorer la sécurité des sites nouvellement soumis à la réglementation ICPE.

Retrouver la liste exhaustive des réglementations post Lubrizol ici.


Pour aller plus loin