Le décret relatif à la PPE de la Guyane a été publié au Journal officiel le 1er avril, alors que la collectivité connaît le plus grand mouvement social de son histoire. Et côté énergie, beaucoup reste à faire. La Guyane importe environ 80% des ressources énergétiques qu’elle consomme. Et les transports représentent 56% de l’énergie finale qui y est consommée. La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe des objectifs propres aux territoires d’outre-mer : 50% d’énergies renouvelables dans la consommation finale d’énergie en 2020 et autonomie énergétique pour 2030.
Pour atteindre ces objectifs, la PPE fixe les orientations stratégiques sur deux périodes (2017-2018 et 2019-2023). Pour la première période, la PPE se consacre avant tout à l’évolution du système électrique. L’enjeu est important : environ 48% des logements ne sont pas électrifiés dans les communes de l’intérieur !
Quelle organisation du réseau électrique ?
Le réseau électrique guyanais est constitué d’un réseau de transport organisé le long du littoral, depuis Saint-Laurent-du-Maroni, jusqu’à Cayenne. Il est complété de systèmes indépendants les uns des autres pour les communes de l’intérieur et les écarts. Ces systèmes isolés sont constitués d’une ou plusieurs unités de production dont la puissance maximale n’excède pas 2 mégawatts (MW). Le réseau du littoral n’est pas connecté aux réseaux des pays voisins.
Plusieurs actions expérimentales sont prévues par la PPE pour électrifier le territoire. Il s’agira notamment d’évaluer l’intérêt de l’autoconsommation ou du stockage. Des appels d’offres seront lancés pour encourager le développement de solutions locales d’électrification à partir d’énergies renouvelables à Maripasoula, Grand Santi, Régina et Papaïchton. Des études technico-économiques sont aussi prévues sur de possibles interconnexions, l’extension du réseau électrique littoral à l’est, le doublement de la ligne électrique vers Saint Laurent du Maroni…
La part des énergies renouvelables dans la production d’électricité atteignait déjà 64% en 2014. L’essentiel de cette production renouvelable provient du barrage de Petit-Saut (113 MW). Le reste de l’électricité est essentiellement produit par des centrales thermiques diesel. L’objectif est de dépasser les 85% d’électricité d’origine renouvelable d’ici 2023.
Quelle évolution du mix électrique d’ici 2023 ?
Sur une zone non interconnectée, coupler les énergies renouvelables intermittentes à des moyens de production de pointe et des moyens de stockage est capital. Et un mix renouvelable diversifié est essentiel. En 2014, le mix électrique du réseau littoral avait une puissance nominale 301 MW. Sa production était de 863 gigawattheures (GWh), avec 57% d’hydraulique, 6% de solaire, 1% de biomasse et 36% de thermique. Pour les communes de l’intérieur non raccordées au réseau, la production était de 17 GWh.
La diversification du mix électrique passera par l’installation d’énergies renouvelables sur le réseau électrique du littoral. 40 MW de biomasse locale, 16,5 MW de petite hydraulique, 20 MW d’éolien avec stockage et 8 MW de déchets. Côté photovoltaïque, il y aura 25 MW avec stockage et 26 MW sans stockage, comprenant l’autoconsommation. Dans l’Ouest de la région française, 20 MW supplémentaires de puissance garantie seront installés, «privilégiant les moyens de production à partir de sources renouvelable», sans plus de détails. Ajoutés aux 20 MW déjà installés à Saint-Laurent-du-Maroni, cela portera la capacité de production électrique à l’Ouest à 40 MW.
La plus grosse centrale thermique au diesel et les deux turbines à combustion de Dégrad-des-Cannes devrait être remplacée d’ici fin 2023 par une nouvelle centrale thermique de 120 MW (dont 40 MW réservés à la production de pointe). Elle pourra fonctionner aussi bien au fioul léger qu’au gaz naturel. Elle sera associée à une centrale photovoltaïque de 10 MW sans stockage et complétée de 20 MW de moyens de production à partir de sources renouvelables à puissance garantie. Une étude doit être menée pour évaluer l’intérêt d’un plan d’approvisionnement en gaz du territoire d’ici 2023.
L’efficacité énergétique dévoile aussi tout son intérêt dans cette situation. Les objectifs sont de réduire la consommation d’énergie de 151 GWh en 2023. Pour cela, des efforts sont notamment à faire sur l’eau chaude solaire. Des objectifs dans le résidentiel, le secteur tertiaire et industriel éviteront 36 GWh de production électrique.
Le secteur des transports sera plus développé lors de la révision de la PPE prévue en 2018. Sur la mobilité, la PPE prévoit pour le moment simplement la mise en place d’un projet de transport en commun en site propre. Et l’installation de 5 bornes de recharge pour les véhicules électriques en 2018. Un objectif qui sera accompagné d’un schéma régional des infrastructures de recharge pour les véhicules électriques cette même année.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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