Les véhicules électriques peinent à « démarrer », tant par le prix des batteries, élevé, que par leur autonomie limitée, et le temps de recharge dissuasif. Malgré ces points de blocage, les industriels du secteur automobile et les pouvoirs publics se montrent optimistes et parient gros sur l’avenir du véhicule décarboné.
En novembre 2011, en France, on comptabilisait seulement 250 immatriculations de véhicules électriques dont 150 rien que pour Autolib’ – système d’autopartage permettant d’avoir accès en libre-service à des voitures électriques, lancé le 5 décembre en Ile-de-France.
Une étude de l’observatoire Cetelem de l’Automobile rendue publique le 15 décembre montre que la France est le pays dans lequel l’intérêt est le moins fort pour cette technologie, à 54 %. Si 71% des Européens se disent intéressés par la voiture électrique, et sont 49 % à ne pas envisager de faire un effort financier pour acquérir un véhicule électrique, ils sont une majorité (57 %) en France à ne pas vouloir dépenser plus pour acheter un véhicule propre.
Voitures électriques, à quel prix ?
Du côté des constructeurs, la voiture électrique semble au contraire promise au plus bel avenir.
Selon Eric Besson, ministre de l’industrie, le « marché mondial de la voiture électrique est estimé à près de 4,5 millions d’unités par an à l’horizon 2025 » et il devrait générer en France « plus de 12 milliards d’euros d’activité par an ». Il devrait permettre ainsi « de réduire de 3 % les émissions de CO2 et de 4 millions de tonnes équivalents pétrole nos importations d’énergie fossile ».
Pour les industriels, le prix élevé de la voiture électrique ne devrait pas effrayer les potentiels acheteurs. Le bonus écologique doit en outre leur donner un coup de pouce en attendant la baisse des prix.
Ainsi, pour une Peugeot Ion, et une Citroën C0 il faut débourser la somme d’environ 30 000 euros ; pour une Renault Fluence ZE, 21 300 euros ; un peu plus de 20 000 euros pour la Kangoo ZE ; et autour de 19 000 euros pour la Mia. Le tout, bien sûr, hors frais de location de la batterie, sous peine de rendre quasi inabordable le prix d’achat de ces véhicules.
Chez Renault, la location de batterie vous coûtera entre 72 et 82 euros par mois, le tout agrémenté d’une assistance gratuite 24 heures sur 24. « On la changera quand elle commencera à donner des signes de faiblesse », déclare un porte-parole de Renault. Ce qui veut dire après 4-5 ans d’existence. D’autres constructeurs proposent des véhicules électriques à la location. Ainsi, la nouvelle Jazz que Honda lance aux États-Unis sera proposée en location pour l’équivalent de 300 euros par mois. Même tarif de location chez Mia. Quant à PSA, le constructeur français propose déjà des offres de leasing (location avec option d’achat).
Changer ou charger la batterie ?
Le temps de charge d’une batterie varie entre 6 et 8 heures pour une charge optimale sur une prise domestique. Mais si l’on veut pouvoir regonfler 80 % de sa batterie en vingt minutes, il faut des bornes plus puissantes, ce qui implique un déploiement vaste et coûteux.
En 2010, le gouvernement s’est saisi de la question, faisant appel à 12 villes pour déployer un réseau de bornes publiques de recharge avec, pour objectif, la création de 75 000 points de recharge accessibles à tous dès 2015 et 400 000 à l’horizon 2020. Douze collectivités (Bordeaux, Grenoble, Rennes, Nice, Angoulême, Aix-en-Provence, Orléans, Paris, Rouen, Strasbourg, Le Havre et Nancy) ont donc signé une charte avec les constructeurs Renault et PSA, qui, de leur côté, se sont engagés à commercialiser 60 000 véhicules électriques en 2011 et 2012. Pouvoir recharger sa batterie partout et sans attendre des heures ne devrait donc plus relever de l’utopie…
Quelle autonomie ?
Pour Jean Syrota, ancien président de la Cogema et auteur d’un rapport publié au printemps, la promesse annoncée des constructeurs – une autonomie de plus ou moins 150 kilomètres – ne serait réalisable qu’à condition de rouler sans embouteillage, sans chauffage et sans radio. Ce que conteste Vincent Bolloré, PDG du groupe du même nom dont la Bluecar a remporté l’appel d’offres pour Autolib’, pour qui les 225 kilomètres tout compris sont facilement atteignables. Grâce à la capacité de stockage de sa batterie nouvelle génération lithium-métal-polymère (LMP), cinq fois supérieure à celle de ses concurrents, la Bluecar est ainsi censée pouvoir rouler pendant 250 kilomètres.
D’autres constructeurs préfèrent considérer le problème sous un autre angle. Selon eux, « 87 % des Européens parcourent moins de 60 kilomètres par jour », les déplacements en ville ou suburbains étant leur priorité avant tout. Reste que selon l’étude de l’observatoire Cetelem de l’Automobile, sur les 82 % d’Européens effectuant moins de 100 km par jour, 55 % d’entre eux n’envisagent pas l’achat d’un véhicule électrique dont l’autonomie est inférieure à 250 kilomètres.
Sans bruit et sans émissions polluantes, la voiture électrique est donc loin de faire l’unanimité. Lino Guzzella, ingénieur spécialisé en moteurs nouvelle génération et enseignant à l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich, rappelle que « plébisciter les voitures électriques à grande échelle, [revient à] plébisciter les centrales nucléaires et les centrales à charbon. »
D’où un regain d’intérêt récent pour l’hydrogène. Hier, l’équipementier FAM présentait à Paris le premier modèle français doté d’un réservoir à hydrogène et d’une pile à combustible. Les ingénieurs de Mia annoncent aussi un prototype hydrogène pour mars 2012.
2012, année de la voiture électrique ?
Malgré tout, 2012 s’annonce comme une grande année pour la voiture électrique en France et en Europe. Dans l’Hexagone, aux Peugeot iOn et Citroën C-Zéro viendront s’ajouter l’utilitaire Renault Kangoo ZE lancé récemment, puis la berline Zoé au second semestre. Parallèlement, le service Autolib devrait monter en puissance pour atteindre 3 000 véhicules fin 2012, contre 250 attendus d’ici la fin de cette année.
Les constructeurs étrangers ne seront pas en reste, avec notamment la Leaf de Nissan, la Mini de BMW et les Chevrolet Volt et Opel Ampera de General Motors. Carlos Ghosn, PDG de Renault, prévoit que la voiture électrique pèsera 10 % du marché automobile en 2020. Le constructeur automobile a annoncé vouloir atteindre une production de plus de 200 000 unités de véhicules électriques d’ici 2015-2016. PSA penche plutôt pour 5 %, mais ce dernier mise aussi parallèlement sur la motorisation hybride, technologie mixte associant un moteur thermique classique à un autre, électrique.
(Sources : Smartplanet ; Le Nouvel Observateur ; Ginkoo ; Automobile Propre ; Le Temps ; EcoCO2, L’Expansion, 20 minutes)
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