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Quand une pollution radioélectrique nous protège

Posté le 10 juillet 2017
par Sophie Hoguin
dans Informatique et Numérique

L'homme a transformé les paysages terrestres, mais pas que. Il a aussi anthropisé l'espace qui entoure la Terre. Et sa trace ne se traduit pas seulement par la présence massive de satellites ou de débris spatiaux mais aussi par une influence sur l'environnement radiatif du proche espace terrestre.

Un article paru sur Space Science Review revient sur l’influence de l’homme sur l’espace qui entoure la Terre. Parmi ces influences, les transmissions radio à très basse fréquence, VLF (pour very low frequency). Ces ondes dont la bande de radiofréquences est comprise entre 3 et 30 kHz (équivalent à une longueur d’onde entre 100 et 10 km) sont utilisées principalement pour les communications longues distances des sous-marins proches de la surface. Mais elles se diffusent aussi hors de l’atmosphère et peuvent interagir avec les particules de hautes énergies présentes dans l’espace. Leur présence crée une bulle autour de la Terre qui est observable depuis l’espace et qui contribue à protéger la Terre des radiations (voir vidéo de la Nasa). Les sondes Van Allen de la Nasa qui étudient depuis 2012 les particules, ions et électrons dans le proche espace qui entoure la Terre ont ainsi pu repérer cette bulle et elles ont permis de relever que la limite de cette bulle correspond à peu près à la limite de la ceinture intérieure des ceintures de radiations de Van Allen (deux zones de forme toroïdale de la magnétosphère qui présente une densité de particules énergétiques très forte). Pour Dan Baker, directeur du Laboratory for Atmospheric and Space Physics à Boulder (Université du Colorado), il est possible que la frontière de la ceinture intérieure serait plus proche de la Terre sans cette bulle VLF. Cette hypothèse s’appuie sur le fait qu’entre 1960 et maintenant cette limite s’est éloignée de la surface de la planète, en parallèle du développement des communications VLF.

Des projets sont déjà à l’étude pour tester si des ondes VLF pourraient supprimer des excès de radiation comme ceux qui se produisent lors des éruptions solaires et ainsi mieux protéger les satellites, engins spatiaux et astronautes dans le futur.

Des ceintures de radiations artificielles

Mais en matière de météorologie de l’espace*, on sait maintenant que l’homme n’est pas qu’un simple observateur. Grâce à des données provenant de documents déclassifiés sur les essais nucléaires spatiaux américains et russes des années 1958 à 1962, les auteurs de l’article ont pu largement revenir sur les effets de ces explosions sur la météo de l’espace.

Ainsi, sur les nombreuses bombes expérimentales déclenchées entre 25 et 400 km au-dessus de nos têtes, les scientifiques ont pu observer que la boule de plasma expulsée pouvait créer des perturbations géomagnétiques qui affectent la bordure du bouclier magnétique terrestre, induisant notamment un champ électrique à sa surface. Certaines de ces explosions ont même engendré des ceintures de radiations artificielles piégeant des particules chargées pendant des semaines voire, dans le cas de Starfish Prime, le lancement du 9 juillet 1962, pendant des années. A noter, que Starfish était une bombe de 1,4 mégatonne qui a détruit et endommagé plusieurs satellites et créé une panne de courant à Hawaï. Certaines explosions ont pu être détectées sur Terre en provoquant des aurores boréales artificielles de quelques secondes dans des régions inhabituelles commes les îles polynésiennes ou en déclenchant des tempêtes géomagnétiques s’étalant de la Suède à l’Arizona (voir vidéo de la Nasa).

Et les auteurs de conclure que ce genre de tests seraient aujourd’hui impensables, pas seulement parce que les technologies disponibles pour la recherche sont bien plus sophistiquées mais aussi parce qu’ils pourraient détruire ou endommager fortement de nombreuses infrastructures modernes.

*La météorologie de l’espace est une nouvelle discipline qui se développe surtout depuis les années 1990 avec la création du Space Environment Center à Boulder aux Etats-Unis et qui commence tout juste à se structurer au niveau international à l’image de la météorologie terrestre. Elle consiste à caractériser et prévoir le milieu spatial d’un point de vue de son état physique et phénoménologique. Outre l’aspect scientifique, elle a pour but de créer des prévisions permettant de réduire les risques pour les satellites, les lanceurs, les avions de ligne, les astronautes ou les réseaux électriques qui sont particulièrement sensibles aux tempêtes spatiales.

Par Sophie Hoguin


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