Le Président chinois Xi Jinping a mis en œuvre depuis plus d’une décennie une stratégie de développement du trafic aérien sur le territoire chinois, mais aussi à l’international. Le but est double. Il s’agit de moderniser la mobilité dans le pays où en plus des mégalopoles historiques se développent de nouvelles villes, de taille inférieure mais occupant une place de plus en plus importante dans l’économie chinoise actuelle.
Aussi, la Chine veut s’exporter, et voir son influence économique, culturelle et commerciale grandir à l’international.
La capacité du pays à développer de manière autonome une filière aéronautique civile la plus complète possible constitue le marche-pied de cette ambition. En moins de quinze ans, la Chine a réalisé une grande partie de cet objectif.
La tête de gondole de cette évolution majeure est le développement par la Comac du C919. Ce gros porteur aux performances comparables à celles des Airbus A320 et des Boeing 737, a obtenu en septembre 2022 la délivrance de sa certification par l’aviation civile chinoise. Elle a donné à ce nouveau venu dans le monde du transport aérien civil l’autorisation officielle à embarquer ses premiers passagers.
Si à ce jour les deux géants mondiaux que sont Airbus et Boeing n’ont pas grand chose à craindre de la concurrence du C919, les choses risquent d’être différentes sur le moyen terme. En effet, pour le moment, la Comac s’est engagée à produire quelques 150 avions par an jusqu’à 2030, alors que le besoin chinois en avions neufs d’ici 2040 est estimé à environ 9 000 appareils ! Le pays ne pourra donc pas satisfaire lui-même à ses propres besoins dans l’immédiat.
L’enjeu actuel pour la Chine est de produire elle-même des moteurs d’avions compétitifs. Le C919, équipé par un moteur franco-américain, illustre l’absence de solutions made in China pour le moment. Comme pour le développement du C919, qui avait pris beaucoup de retard, la mise au point de ces moteurs se fait attendre. Mais nul doute que cette ambition finira par se matérialiser, sur le court ou moyen terme.
Le contexte international, lui, pourrait être un frein au développement exponentiel du trafic aérien et des capacités chinoises dans ce domaine. En effet, la décarbonation des activités humaines oblige le secteur aérien à revoir sa copie : les innovations attendues en Europe concernent le développement d’avions ayant un fonctionnement plus neutre pour l’environnement. Ainsi, les motoristes travaillent sur des moteurs nouvelle génération permettant de réduire les émissions liées au transport aérien.
Si tant est qu’il soit possible de réduire les émissions de ce secteur sans en limiter le volume du trafic, qui continue à augmenter depuis la parenthèse liée à la crise sanitaire et aux confinements successifs.
Ainsi, l’avance actuelle des motoristes européens et américains en termes de motorisation pourrait voir les moteurs chinois presque obsolètes avant même d’entrer en service. Ceci dit, il faudra voir dans quelle mesure, d’ici à 2030 en Europe, les acteurs de l’aviation civile mettent effectivement en place des modes de transport aérien qui permettent concrètement de réduire l’impact du secteur dans les émissions de GES.
Il n’est pas certain que l’enjeu écologique constitue un frein identique au développement du secteur aérien civil, que l’on soit en Chine ou en Europe.
Par Pierre Thouverez
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