Du fait de leur omniprésence dans l’industrie mondiale, les matériaux polymères soulèvent un grand nombre de questions au niveau sociétal, notamment autour de leur durée de vie et de leur réutilisation. Depuis le début des années 2000, des recherches sont entreprises pour augmenter cette durée de vie en créant des polymères autoréparables.
Les matériaux, au cours de leur cycle de vie (durée de service), subissent en général de nombreuses sollicitations qui les endommagent. Or, l’opération de remplacement est coûteuse, voire impossible dans certain cas. Il serait intéressant, par exemple, qu’un satellite puisse s’autoréparer suite à un impact, qu’un avion soit capable de combler ses fissures en attendant la prochaine inspection, ou encore qu’une prothèse soit en mesure de s’autoréparer pour éviter une opération. De plus, en Europe, environ 40 % des matières plastiques terminent leur vie sous forme de déchets ultimes n’étant ni recyclées ni transformées en énergie.
La capacité des systèmes naturels ou artificiels, à se guérir spontanément après dommages tout en gardant leurs fonctions, est une caractéristique importante pour leur durabilité. L’autoguérison est très commune dans les systèmes biologiques. On peut citer la guérison de la peau blessée ou encore la réparation de l’ADN, comme le confirme les travaux de T. Lindahl, prix Nobel de chimie en 2015. Inspirés par cela, les systèmes autoréparables, appelés aussi autocicatrisants, ont été largement explorés depuis 15 ans. Suite à une dégradation (thermique, mécanique, chimique…), ces matériaux déclenchent spontanément, ou sous l’effet d’un stimulus externe, un processus physicochimique d’autoréparation pour restaurer leurs propriétés initiales. Ce processus permet ainsi d’augmenter leur durée de vie.
Un des premiers modèles synthétiques de ces matériaux a été proposé par White et al. en 2001 à partir de matériaux polymères composites incorporant un catalyseur et des capsules contenant un agent réparant. L’inconvénient de cette méthode repose sur le fait qu’une même région du matériau ne peut plus être réparée dès lors que la capsule d’agent actif a été consommée. Même si des améliorations ont été proposées, ces matériaux reposent sur des systèmes relativement complexes. De plus, la réparation modifie également leurs propriétés mécaniques, ce qui en limite le champ d’applications.
Aussi, un intérêt croissant est porté sur une deuxième famille de matériaux autoréparables obtenus via une réticulation réversible. Ces derniers présentent l’avantage, en théorie, de pouvoir être fracturés et réparés autant de fois que possible. Cette famille se divise en deux groupes selon que leur réticulation réversible est obtenue par liaison covalente ou par liaison non covalente.
De nombreux polymères supramoléculaires autoréparables de ce type ont été développés en laboratoire. Ces polymères possèdent comme caractéristique commune d’être intrinsèquement autoréparables, c’est-à-dire qu’ils cicatrisent grâce à leurs propriétés chimiques sans avoir recours à un agent cicatrisant stocké séparément. Certains polymères ont besoin d’un stimulus extérieur pour s’auto-réparer comme la température, d’autres en revanche sont autonomes. Dans ce dernier cas, il est important que les polymères aient une faible température de transition vitreuse. Celle-ci garantit en effet la mobilité et la dynamique des molécules favorisant l’autoréparation. Toutefois, cette température ne doit pas être trop faible pour que les liaisons non covalentes libres restent à la surface de la zone coupée afin de permettre la cicatrisation. Pour les polymères présentant une structure semi-cristalline ou cristalline, il est en plus nécessaire de supprimer la cristallinité du polymère dans la zone fracturée, afin de permettre aux liaisons non covalentes de se reformer. Le temps d’attente avant que les faces soient remises en contact joue un rôle capital. Ce temps s’étend de la minute à plusieurs heures dans le meilleur des cas. Mais, plus ce temps d’attente est faible et meilleure est l’efficacité d’autoréparation.
Aujourd’hui, deux produits issus de ces recherches sont sur le marché dans le domaine des caoutchoucs portant les marques Reverlink® et SupraB™ .
La conception de ces polymères continue d’être améliorée pour répondre aux besoins du marché notamment en augmentant leur rigidité. Plusieurs stratégies sont étudiées, qui se focalisent notamment sur l’incorporation de nanoparticules. Ces derniers systèmes présentent souvent la particularité de s’autoréparer à température ambiante sous rayonnement UV ou IR.
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Polymères supramoléculaires autoréparables, un article de David PRORIOL
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