Dès fin janvier, le label national antigaspi viendra récompenser les points de vente les plus engagés dans la lutte contre le gaspillage alimentaire. Jean Moreau, fondateur de la start-up Phenix, nous explique l’intérêt de ce nouveau label officiel.
Le premier label national antigaspi sera opérationnel dès sa publication au journal officiel par décret d’application fin janvier 2023. Prévu par la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec), il récompensera les points de vente les plus performants dans la réduction du gaspillage alimentaire, sur la base d’un audit réalisé par un organisme certificateur agréé, avec un système de notation d’une à trois étoiles.
La start-up Phenix accompagne aujourd’hui 17 000 points de vente, dont 1 500 magasins de grande distribution, dans la lutte contre le gaspillage alimentaire et les met en lien avec des associations caritatives et des structures pour l’alimentation animale. Elle a ainsi sauvé de la poubelle 62 millions de repas en 2022, soit près de 75 tonnes par jour.
La start-up lance un nouveau service d’accompagnement pour les distributeurs afin de les aider à obtenir le label national antigaspi. Son fondateur Jean Moreau nous en dit plus sur ce nouveau label et la manière dont la lutte antigaspi commence à s’imposer dans la grande distribution.
Techniques de l’ingénieur : Qu’est-ce que ce nouveau label et pourquoi était-il nécessaire ?
Jean Moreau : Le label national antigaspi est un label d’État qui découle de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, la loi Agec, adoptée en 2020. L’idée était de concrétiser l’engagement des différents acteurs de la grande distribution pour avoir un label de référence certifié par un tiers de confiance qui fasse autorité. Et ce pour identifier et valoriser les magasins impliqués dans une démarche anti-gaspillage concrète avec des résultats tangibles.
Ce label vient compléter la loi Garot qui a mis en place la lutte contre le gaspillage alimentaire dans tous les supermarchés de 400 m² et plus depuis 2016. [Cette loi a rendu obligatoire la conclusion d’une convention de don à des associations pour la reprise de leurs invendus alimentaires encore consommables et l’interdiction pour les distributeurs de rendre impropres à la consommation des invendus encore consommables, NDLR]. Si cette loi a été utile, il y avait encore des attentes sur son application concrète. En particulier, si elle prévoyait 10 000 euros d’amende par infraction constatée, les amendes ne sont pas appliquées.
Au total, le label repose sur 17 critères. Quels sont les plus importants ?
Les critères sont répartis en quatre grandes catégories. Il y a des critères transversaux qui évaluent la performance globale du point de vente en matière de lutte contre le gaspillage, des critères qui portent sur l’approvisionnement, l’achat et la fabrication des denrées alimentaires. Ils s’intéressent notamment à la gestion des stocks, des commandes. Ils vérifient par exemple si le réassort est automatique ou s’il s’adapte à la saisonnalité, à l’historique des ventes, aux vacances scolaires…
Il y a un ensemble de critères qui portent sur la commercialisation des denrées alimentaires et la pédagogie dans les rayons sur les dates de péremption. Enfin, lorsqu’un produit reste invendu, des critères portent sur les pratiques de gestion et de dons aux associations caritatives, ainsi qu’aux structures d’alimentation animale comme des fermes, zoos, centres équestres ou parcs animaliers.
Deux critères sont incontournables à l’obtention du label. Le décret définira un taux de casse maximum à ne pas dépasser pour le point de vente. C’est la part de produits mis en rayon non vendus et non valorisés, maximum à ne pas dépasser. Ce taux est en cours de définition, mais devrait se situer aux alentours de 2,5 %. La qualité et la traçabilité du don aux associations seront aussi scrutées : le don aux associations devra se situer au même niveau d’exigence que les autres pratiques de la grande distribution.
Le label servira donc à mettre en valeur les bons élèves ?
Aujourd’hui, environ 70 % des acteurs de la grande distribution ont initié des actions anti-gaspillage. On peut toutefois faire beaucoup mieux. À défaut de pointer du doigt les mauvais élèves, on récompensera donc ceux qui sont vertueux et on mobilisera les autres par une logique d’exemplarité. Il y a aussi un enjeu purement économique. Réduire le gaspillage, c’est économiser jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires.
Le label doit aussi pouvoir générer de la préférence de marque pour faire venir davantage de clients en magasin. Entre deux magasins qui se ressemblent, probablement le consommateur préférera aller dans une démarche engagée dans le zéro déchet. En effet, selon une étude YouGov pour Phenix, réalisée en janvier 2021, 84 % des Français privilégieraient une enseigne récompensée d’un label anti-gaspillage plutôt qu’une autre.
Pour Phenix, qu’est-ce que ce nouveau label va changer ?
Un magasin qui s’ouvre prend un système de caisse, d’éclairage, de chambre froide… Désormais, la gestion des invendus va aussi devenir incontournable. Chez Phenix, nous sommes 250 employés avec 80 personnes sur le terrain qui aident à réduire le gaspillage alimentaire à tous les niveaux. Nous accompagnerons les magasins dans l’atteinte du meilleur niveau possible. Notre objectif est d’amener plus de 300 points de vente vers la certification nationale avant la fin de l’année 2023.
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