Il convient tout d’abord de définir ce qu’est un réacteur modulaire. Deux types de solutions technologiques sont aujourd’hui développées, à travers la centaine de projets actuellement en cours à travers le monde : les SMR (Small Modular Reactor) et les AMR (Advanced Modular Reactor).
Les AMR, comme les SMR, sont de petits réacteurs nucléaires modulaires. Par modulaire, il faut comprendre que ces réacteurs peuvent être industrialisés pour être produits à grande échelle. C’est là la première révolution par rapport au nucléaire historique : Les petits réacteurs modulaires sont destinés à être utilisés dans des contextes très spécifiques, pour répondre à des besoins en énergie – chaleur, vapeur, électricité – très locaux. Cela peut concerner les besoins d’un site industriel gourmand en énergie, œuvrant dans des secteurs tels que la sidérurgie, la chimie ou l’aciérie par exemple. Cela peut aussi concerner un groupement d’industriels, de bâtiments publics, regroupés sur une zone géographique et ayant des besoins énergétiques pouvant être comblés par un (ou plusieurs) réacteur de petite taille. On l’aura compris, les AMR et SMR fournissent moins de puissance qu’un réacteur nucléaire classique, et sont destinés à être produits en série pour être utilisés massivement, afin de décarboner des usages industriels aujourd’hui fortement émetteurs de CO2. Ils pourraient à cet effet être très utiles pour alimenter des procédés de production d’hydrogène par exemple, ou de carburants verts.
En termes de fonctionnement, les AMR utilisent des technologies développées dans les années 1960 regroupées sous le terme de nucléaire de quatrième génération. Parmi ces technologies, trois font l’objet actuellement de travaux pour le développement des futurs AMR :
- Les réacteurs à neutrons rapides à caloporteurs sodium ou plomb, dont la particularité est leur capacité à consommer pour leur fonctionnement des matières nucléaires issues du retraitement des combustibles.
- Les réacteurs à haute ou très haute température, capables de fournir à l’industrie de la chaleur jusqu’à 900 degrés.
- Les réacteurs à sels fondus, qui regroupent de nombreux concepts, dont la possibilité d’utiliser des matières issues du retraitement de combustibles usés.
Les SMR, à la différence des AMR, sont refroidis à l’eau. La stratégie liée au déploiement de ces petits réacteurs est basée sur trois piliers : D’abord la volonté d’utiliser les combustibles et plus généralement les matières nucléaires avec plus d’efficacité, pour faciliter leur retraitement et produire moins de déchets. Ensuite, les petits réacteurs en développement doivent permettre de produire des unités ayant un haut degré de sûreté, mais aussi une compétitivité économique accrue.
En France, le programme d’investissement France 2030, et plus particulièrement son volet « réacteurs nucléaires innovants », ont permis à plusieurs start-up françaises d’être soutenues pour développer des SMR et des AMR, alors que la compétition mondiale sur ces outils industriels innovants est extrêmement forte.
Ainsi, parmi les projets français, portés par des jeunes pousses comme NAAREA, NEWCLEO, JIMMY ENERGY, RENAISSANCE FUSION, CALOGENA, HEXANA, OTRERA NUCLEAR ENERGY ou encore BLUE CAPSULE, toutes lauréates de l’appel à projet porté par France 2030, travaillent d’arrache pied pour développer et faire valider leurs concepts, sur des échelles de temps assez courtes, étant donné les impératifs européens et mondiaux en matière de réduction des émissions carbone.
La tête de gondole européenne sur ce secteur industriel restant NUWARD, qui doit produire, via deux réacteurs, 340 MWe de puissance.
Avec toutes les compétences accumulées au travers de décennies de recherche et d’exploitation des technologies nucléaires, notamment Superphénix et Astrid, la France a un avantage certain dans la course internationale actuelle au développement et au déploiement des petits réacteurs modulaires nucléaires.
Cet article se trouve dans le dossier :
La France dans la course aux réacteurs nucléaires innovants
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