Faut-il opter pour une technologie à court terme, mais qui sera limitée ou sur une autre solution plus efficace, mais qui est à plus long terme ? Tous les acteurs de l’informatique quantique se posent certainement cette question. Actuellement, Google et IBM ont choisi la première option avec les supraconducteurs.
Fondée en 2019, Pasqal a choisi une piste plus prometteuse, mais qui « pourrait prendre des dizaines d’années » a déclaré Georges-Olivier Reymond, PDG de cette start-up.
Le rêve de voir un ordinateur décupler la puissance de calcul des machines classiques est poursuivi par des scientifiques depuis plus de trente ans. Mais il se heurte à d’importants obstacles technologiques. L’un des principaux défis est de continuer à augmenter le nombre de qubits tout en améliorant la qualité.
Pour l’instant, les ordinateurs quantiques ne peuvent pas faire grand-chose : les taux d’erreur élevés et la taille limitée des processeurs quantiques limitent considérablement leur puissance.
Pasqal ambitionne de relever ce défi en annonçant avoir réussi à charger plus de 1 000 atomes en une seule opération. Dans un environnement cryogénique à une température de 6 K (- 267 °C), la startup a réussi à contrôler des atomes refroidis à l’aide de champs électromagnétiques.
Talonner IBM
« Le piégeage réussi d’atomes de rubidium dans de vastes réseaux de pinces optiques, comprenant jusqu’à 2 088 sites, dans un environnement cryogénique à une température de 6 K représente l’un des derniers exploits de Pasqal dans le domaine de l’informatique quantique. C’est une première mondiale dans l’industrie. En mettant fortement l’accent sur l’ingénierie, Pasqal sort la technologie de l’atome neutre des laboratoires » a déclaré Loïc Henriet, Co-CEO de Pasqal, dans un communiqué.
Les atomes neutres présentent l’avantage d’être naturellement identiques (d’où l’absence de problèmes d’incohérence au niveau de la fabrication), d’avoir de longs temps de cohérence et de pouvoir être hébergés dans des environnements moins exotiques (à température ambiante). Autre intérêt majeur, ces atomes froids peuvent être utilisés pour créer des qubits pour ordinateurs quantiques à portes quantiques universelles ou des simulateurs quantiques analogiques.
L’approche suivie par Pasqal lui permet ainsi d’augmenter continuellement les performances de ses machines et d’apporter des solutions stables et efficaces à ses utilisateurs. Cette étape s’aligne sur la feuille de route stratégique de la start-up, qui met l’accent sur le développement d’ordinateurs quantiques de plus de 1 000 qubits, progressant vers 10 000 qubits à l’horizon 2026-2027. Le but est de générer une utilité industrielle dans des cas d’utilisation réels.
La start-up fait partie du groupe très restreint d’entreprises (la start-up française Quandela, la société britannique Quantinuum, la société finlandaise IQM, la société américaine Atom Computing) capables de construire et de vendre des processeurs quantiques à des clients.
Pasqal en a vendu notamment à des centres de calcul à haute performance soutenus par l’Union européenne en France et en Allemagne.
De quoi talonner sérieusement IBM qui commercialise actuellement un processeur de 127 qubits. En décembre dernier, le groupe a dévoilé son prototype de processeur à 1 121 qubits, baptisé Condor, lors de l’IBM Quantum Summit 2023.
Pasqal n’est pas la seule entreprise à travailler avec des atomes neutres. Aux États-Unis, la société californienne Atom Computing produit des processeurs de 100 qubits et développe actuellement un dispositif de plus de 1 000 qubits. La société QuEra, basée à Boston, propose déjà un processeur quantique de 256 qubits et vise 10 000 qubits en 2026.
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