Suite à de sérieux incidents, la société pétrolière interrompt sa campagne de forage.
Il faut dire que l’année a plutôt mal commencé. Le 1er janvier, le navire de forage Kulluk s’est échoué au large des côtes en Alaska, avec 600 000L de diesel et 50 000L d’huile de graissage et de liquide hydraulique.
Bien qu’aucune fuite ne se soit produite, le risque d’une catastrophe comme celle de l’Exxon-Valdez est dans toutes les têtes. En 1989, l’échouement de ce pétrolier américain avait provoqué une terrible marée noire, avec 40 000 tonnes de pétrole brut répandus dans la mer et des centaines de km de côtes polluées. Autant dire que forer dans cette région se fait sous l’œil méfiant de la population et une surveillance accrue des autorités.
Car l’accident du Kulluk n’était pas un incident isolé. Au mois de juillet dernier, la plateforme de forage Discover-Noble avait « perdu » son ancre, menaçant de s’échouer près de la bourgade d’Unalaska. La plateforme avait finalement été remorquée, mais les garde-côtes avaient pointé du doigt des défaillances au niveau de la propulsion ainsi que des systèmes de sécurité. Shell avait alors remorqué Discover-Noble jusqu’à Seattle pour effectuer les réparations. Puis, à peine deux mois plus tard, c’est la plateforme de secours Arctic-Challenger qui avait été abîmée lors d’un test d’homologation. Un test totalement raté !
Privé de deux plateformes, Kulluk et Discover-Noble, Shell renonce finalement à forer en 2013.
Si cette nouvelle a été très favorablement accueillie par les associations de protection de l’environnement, Greenpeace en tête, cette décision ne signifie pas un renoncement définitif.
Shell a déjà investi plus de 4.5 milliards de dollars, une somme colossale, même pour ce géant du pétrole. Difficile de croire à l’abandon du projet. D’ailleurs, dans un récent communiqué, le groupe réaffirme son ambition d’exploiter cette région qui pourrait bien se révéler un nouvel eldorado énergétique : « L’Alaska reste une région à haut potentiel pour Shell sur le long terme et le groupe est engagé à forer de nouveau là-bas à l’avenir. Nous continuons de croire qu’un rythme mesuré et responsable, en particulier dans la phase d’exploration, correspond le mieux à cette région éloignée. »
L’arrêt des forages ressemble plutôt à une pause stratégique, le temps de calmer les esprits. D’autant que cette annonce intervient quelques jours avant qu’une enquête du gouvernement américain sur d’éventuelles défaillances de Shell ne soit rendue publique.
Ken Salazar, secrétaire d’Etat aux affaires intérieures s’étant dit troublé de tous ces incidents, avait en effet ordonné une enquête de deux mois sur la politique de forage du géant anglo-néerlandais, avertissant : « Il est possible que Shell ne puisse pas reprendre ses activités en 2013 en raison des évaluations en cours sur le Kulluk ».
Le groupe se sachant sur la sellette, un retrait tactique parait très pertinent. Pour mieux revenir en 2014 !
Par Audrey Loubens, journaliste scientifique
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