Le 11 avril dernier, la ministre déléguée en charge des Entreprises, du Tourisme et de la Consommation, Olivia Grégoire, a annoncé que « plus d’une quarantaine de marques très connues » s’engagent, dès cet été, à indiquer la provenance des ingrédients composant leurs produits alimentaires transformés.
C’est en réponse à la crise agricole, révélatrice du désarroi des agriculteurs, que le gouvernement avait annoncé, le 22 février dernier, la mise en place de ce nouvel étiquetage. Celui-ci a pour but de justifier les prix plus élevés des produits d’origines françaises et permettre ainsi une revalorisation des revenus des producteurs.
À la suite de cette annonce, industriels et distributeurs du secteur agroalimentaire, mais aussi associations de consommateurs ont été convoqués à Bercy, en mars dernier, pour poser les premiers jalons d’une démarche baptisée Origine-Info. D’ici le mois de mai, un cahier des charges définissant notamment le degré de précision de l’étiquetage devra être finalisé.
Un manque de traçabilité criant
La législation en vigueur impose uniquement d’indiquer l’origine pour les produits bruts comme la farine, les fruits, les légumes ou le miel.
En 2017, le scandale des lasagnes à la viande de cheval, déboucha sur une première avancée pour la traçabilité des produits transformés en rendant obligatoire l’indication de l’origine de la viande dans les plats préparés et du lait dans les produits laitiers. Cependant, après une éphémère expérimentation, le lobbying a fini par avoir gain de cause en obtenant la levée de l’obligation.
L’opacité de l’information domine, comme le révèle une enquête de l’UFC-Que Choisir qui démontre que l’origine de 69 % des ingrédients des produits transformés n’est pas mentionnée.
Même si des initiatives émanent du côté de certaines enseignes comme Intermarché qui a mis en place un Franco Score ou E.Leclerc qui a décidé d’apposer l’origine géographique sur ses produits, l’exigence de clarté doit être une préoccupation collective et non le fait de particuliers. D’autant plus que l’origine des produits est un critère majeur pour les consommateurs. Ils sont, en effet, 86 % à souhaiter disposer de cette information au moment de leur achat.
Un logo explicite pour un choix éclairé
Le logo « Origine-Info » aura pour ambition de combler ces lacunes en fournissant une indication précise concernant la proportion des ingrédients français présents dans les plats préparés pour les matières premières principales. Le logo sera élaboré en concertation avec les consommateurs et sera dévoilé au cours du mois de mai.
Bien que l’origine-score soit inspiré du Nutri-Score, l’échelle de couleur attribuant une notation de lettres (de A à E) n’a pas été retenue. Une première esquisse du logo prend la forme d’un diagramme divisé en trois, avec une partie sur l’origine France, une partie sur l’origine Union européenne et une partie sur l’origine hors Union européenne.
Ce prototype a été créé et expérimenté en septembre dernier par l’association En Vérité regroupant une soixantaine de marques agro-industrielles. En l’apposant sur les emballages de quelques produits, le collectif a pu étudier l’impact de l’information sur la provenance du produit sur le choix du consommateur. Malgré des prix plus élevés par rapport à leurs concurrents, les ventes des produits utilisant des matières premières françaises ont doublé, prouvant ainsi que les consommateurs sont prêts à dépenser plus pour soutenir les agriculteurs.
Une démarche qui sera facultative
L’apposition du futur indicateur reposera, comme c’est le cas pour le Nutri-Score, sur le volontariat pour rester conforme au droit européen. Une décision critiquée par les associations de consommateurs qui redoutent que les industriels achetant leurs matières premières à l’étranger ne jouent pas le jeu. Le logo serait alors accessoire puisque l’origine française d’un produit, considérée comme un atout pour la vente, est déjà affichée spontanément par les fabricants. Néanmoins, le succès rencontré en France par le Nutri-Score, avec presque 1 500 marques engagées, permet d’envisager une même destinée pour l’Origine-score.
Reste à savoir si l’information indiquée est authentique. Notons que sur 2 000 contrôles effectués, 683 établissements n’étaient pas en conformité concernant l’origine française de leurs produits alimentaires selon la DGCCRF[1].
[1] Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
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