Un bracelet, un frigo, une télévision, une voiture, des interrupteurs, une balance, des lampadaires, des poubelles, des feux rouges connectés… tous ces objets, autrefois creux, inertes, et désormais « intelligents » gardent encore un petit côté “gadget”.
Mais selon France Stratégie, ces appareils “communicants”, qui constituent ensemble “l’Internet des objets” (IdO ou IoT), et qui rendent votre maison ou votre ville intelligente, pourraient être au nombre de 80 milliards, dans le monde, en 2020, contre 15 milliards actuellement.
Rien qu’en France, selon Cisco, le nombre des objets connectés devrait passer de 3,1 millions en 2014, à 16,7 millions en 2019. “Il y a un écosystème très actif ici, avec des objets conçus dans le cadre de la “French Tech”, qu’il s’agisse de drones ou de balances connectées, voire de voitures intelligentes”, indique Lionel Janin, expert de l’IdO chez France Stratégie. Ainsi, des entreprises comme Netatmo, Parrot, Withings, ou Sigfox, ont déjà acquis une réputation internationale.
Selon l’expert de cette institution (aussi appelée Commissariat général à la stratégie et à la prospective) rattachée au Premier ministre, les voitures, “auront en interne de plus en plus de capteurs, pour renseigner sur l’état de la voiture, pour détecter l’environnement du véhicule, ou pour interagir avec le réseau”, les rendant “autonomes”, à l’instar des Google Cars (voitures sans conducteurs).
Ainsi, nos véhicules sont-ils de plus en plus connectés, et selon ABI Research, 60% des véhicules à travers le monde seront connectés à Internet en 2017, ce nombre devant augmenter de 11 % chaque année.
Villes intelligentes et objets de mesure
France Stratégie liste dans sa dernière étude, les applications de l’IdO. D’abord, dans l’espace public, avec des villes intelligentes (smart cities). Ainsi, “Plusieurs villes (Songdo en Corée du Sud ; I-City en Malaisie) déploient des technologies de l’Internet des objets pour répondre aux défis énergétiques et d’aménagement urbain.
Dans ces villes, l’éclairage, le trafic, la collecte des déchets, la qualité de l’air, la distribution des fluides sont analysés et optimisés en permanence”, écrit l’organisme. Et d’ajouter que “la gestion des services publics se conçoit de manière plus prédictive et automatisée”, et qu’ainsi, “les transports deviennent plus fluides, l’éclairage urbain optimisé et l’exposition à la pollution moindre.”
Mehdi Chouiten, data scientist chez Parkeon, une société qui conçoit des horodateurs connectés permettant de prédire l’emplacement de stationnement le plus proche qui “sera bientôt libre”, grâce à l’apprentissage automatique et à l’analyse de données, indique : “au delà, l’IdO devrait chambouler nos vies, dans d’autres secteurs comme celui de la santé, avec les bracelets, les podomètres ou les montres connectées, qui intéressent déjà les compagnies d’assurance, car elles permettront de mieux connaître nos habitudes et notre état de santé”.
Pour Lionel Janin, “il y a un effet de mode autour de ces objets, mais à terme, ils devraient faire comme le smartphone, en devenant indispensables”. En croisant les données, ces appareils de mesure finiront par en dire long sur nous. “Enormément de données sont captées au plus près de l’individu via l’IdO, et ces données devraient chambouler nos vies, de nos déplacements à notre santé”, remarque Lionel Janin.
“Donner à l’utilisateur un contrôle sur ses données”
Nombre de plateformes de services, comme Google Fit et Apple HealthKit, sont intéressées par la possibilité de monétiser ces données de santé et de bien-être, d’une grande valeur, et tentent à l’heure actuelle de les agréger pour les revendre à des publicitaires, à des chercheurs, voire à des laboratoires pharmaceutiques. “Ces services sont capables d’avoir une connaissance très fine des utilisateurs : en ayant accès à la courbe de pas, de poids, et aux activités sportives de l’individu sur plusieurs mois ou années, cela permet de connaître son mode de vie et son état de santé potentiel, actuel ou futur”, note Olivier Desbiey, chargé d’études prospectives à la CNIL.
Ainsi, l’Internet des Objets pose-t-il la question des risques liées à la circulation et à l’échange des données brassées. “Accumulées, ces nombreuses données anonymes permettent de vous identifier. C’est une question qui doit être prise en compte, pour que ce secteur se développe, car si les gens n’ont pas suffisamment confiance ds le contrôle qu’ils ont sur ces objets, peut être ne les adopteront-ils pas”, note Lionel Janin.
L’expert ajoute que “ce qui va jouer dans les années à venir, c’est la capacité des fabricants à donner aux utilisateurs un droit de regard et un contrôle sur leurs données.” Pour “accompagner la confiance du citoyen, des adaptations sont nécessaires”, conclut-il, incitant notamment les collectivités territoriales à “prendre des initiatives, notamment autour des données ouvertes”.
“Dépasser le développement en silo”
Ainsi, les pouvoirs publics ont-ils tout intérêt à développer dans l’avenir des “plateformes ouvertes”, où seraient “rassemblées et partagées les applications développées, et respectant des standards de protection des données personnelles”, explique l’étude de France Stratégie.
Conclusion de l’organisme : “les moyens financiers mis en oeuvre aux États-Unis ou en Chine sont considérables. De nombreuses actions ont déjà été engagées en France (plan “objets connectés”, pôles de compétitivité, meilleur accès des startups au financement, promotion du label FrenchTech), mais ces différentes actions doivent être amplifiées et coordonnées, pour dépasser les logiques de développement en silo”.
Objectif final : “assurer le développement d’un IdO ouvert, interopérable et répondant aux besoins en matière de protection des données personnelles et de sécurité.” En 2020, selon le cabinet IDC, l’Internet des objets (IdO ou IoT) devrait peser 1700 milliards de dollars. Soit une croissance annuelle moyenne de 16,9 %. En 2014, ce marché devrait représenter 655,8 milliards de dollars.
Par Fabien Soyez
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