À Biarritz, le réseau d’assainissement est unitaire : les eaux usées et pluviales sont collectées dans les mêmes canalisations. La station d’épuration de la ville traite en moyenne 20.000 mètres cubes (m3) d’eaux usées sur une journée et son débit de pointe est de 56.000 m3. Lorsqu’il pleut, l’eau est temporairement stockée dans les quatre bassins dits de «rétention» de la ville. Ils totalisent 40.000 m3.
Le système a été pensé pour traiter en débit de pointe une pluie mensuelle, c’est-à-dire une pluie qui arrive en moyenne douze fois par an. En cas d’orages intenses, le réseau sature ; les capacités demeurent insuffisantes. L’eau est alors rejetée dans l’océan Atlantique, sans traitement, à 800 m au large de la plage de Marbella.
Dans ces conditions, le numérique prend de plus en plus de place. «Grâce à des algorithmes, nous sommes capables de modéliser les flux de pluies qui vont arriver et de les répartir de manière intelligente sur tous les réseaux», se félicite Marie-Ange Debon, directrice générale de Suez. C’est la force du logiciel Aquadvanced Assainissement, développé par Suez et déployé à Biarritz.
Le numérique pour limiter les déversements
Rendez-vous au centre Visio de Biarritz. Ce centre collecte en temps réel les données provenant des capteurs répartis sur le réseau d’assainissement et ses infrastructures. Depuis 2016, il est équipé du logiciel Aquadvanced Assainissement. Ce logiciel permet d’adapter en temps réel le réseau d’assainissement, afin de limiter son débordement, limiter les risques d’inondation et maîtriser la qualité des rejets dans le milieu naturel. «Sa force est d’intégrer des prévisions de pluies de Météo France, prévient Pierre Echavidre, directeur adjoint Suez Eau France au Pays Basque. Cela permet rapidement de remplir ou vider des bassins».
Concrètement, lorsque la pluie est plus importante que la moyenne, l’eau est stockée dans les bassins de rétention. L’eau est ensuite déstockée, une fois la pluie passée, et envoyée vers la station d’épuration pour y être traitée. Pour optimiser les volumes de stockage, les capteurs mesurent les niveaux d’eau sur l’ensemble du réseau et optimisent le système en permanence. «Un bassin de 10.000 m3 peut stocker un volume largement supérieur sur une journée, précise Pierre Echavidre. Lorsqu’une pluie s’affaiblit, il est par exemple possible de déstocker 2000 m3, avant de pouvoir les restocker quelques heures plus tard, lorsque la pluie revient.»
La ville traite environ 6 millions de m3 d’eaux usées par an. «Avec le déploiement du logiciel Aquadvanced, le volume des eaux déversées sans traitement a diminué entre 30 et 40 %, analyse Pierre Echavidre. Nous sommes désormais aux environs de 300.000 m3 chaque année, soit 5 % du volume annuel traité.»
Le numérique en complément des bassins
La ville vient d’achever la construction d’un cinquième bassin de rétention de 4.000 m3. Ces réservoirs sont toutefois coûteux et longs à mettre en place : ce nouveau bassin a coûté 6,8 millions d’euros. «En période estivale, nous déversons encore entre 5 à 6 jours, reconnait Pierre Echavidre. Ce nouveau stockage permettra de déverser entre 2 et 3 jours de moins».
L’agglomération Côte Basque Adour a pris à bras le corps le problème des inondations. En complément de toutes ces solutions, et dans le cadre de son Schéma directeur des eaux pluviales (Sdep) lancé en 2010, elle demande désormais aux promoteurs et aux particuliers acquéreurs d’un terrain constructible de compenser la surface imperméabilisée. Pour ce faire, ils doivent se doter sur place d’un bassin ou d’une cuve de stockage des eaux pluviales.
Suez espère convaincre les collectivités d’adopter son logiciel, notamment pour diminuer la pollution plastique dans les océans. «Aquadvanced peut être déployé sur n’importe quel système d’assainissement existant, à partir du moment où il y a des ouvrages de stockage» précise Pierre Echavidre. En plus de Biarritz, la solution a été déployée à Paris, Bordeaux et Saint Étienne pour prévenir les inondations, les rejets d’eau sur le littoral et les phénomènes de pollution. Elle vient d’être déployée ou est en cours de déploiement à Marseille, Dijon, Mulhouse, Montargis, Carcassonne, Roanne et Vallauris.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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