Signer et ratifier l’accord de Paris pour limiter le réchauffement climatique à 2°C d’ici 2100 était une très bonne chose. Désormais, la transition énergétique va nécessiter d’extraire une quantité record de minerais et de métaux. La Banque Mondiale s’est intéressée aux ressources nécessaires pour répondre à trois scénarios : un réchauffement limité à + 2°C, un autre s’envolant à + 4°C et un dernier à + 6°C. Évidemment, plus l’objectif est ambitieux, plus le besoin en métaux et minerais sera important.
Le rapport explore les ressources nécessaires pour répondre à l’explosion de trois technologies qui seront au cœur de la transition énergétique : l’éolien, le solaire et les batteries. Ainsi, les métaux et minerais concernés sont nombreux. Aluminium, cobalt, cuivre, fer, plomb, lithium, nickel, manganèse, terres rares (notamment néodyme), argent, acier, titane et zinc… tous sont concernés. Leur demande pourrait doubler. « L’exemple le plus significatif sont les batteries pour le stockage de l’électricité, pour lesquelles l’augmentation de la demande en métaux – aluminium, cobalt, fer, plomb, lithium, manganèse et nickel – est relativement modeste dans le scénario +4°C, mais prend plus de 1.000 % dans le scénario +2°C », préviennent les auteurs.
Ce constat s’applique aussi aux autres technologies. « Les technologies supposées alimenter le passage à une énergie propre – éolien, solaire, hydrogène et systèmes électriques – sont en fait significativement PLUS intensifs en matériaux dans leur composition que les centrales à énergie fossile traditionnelles », observe le rapport.
Des opportunités pour les pays riches en ressources?
Pour tirer profit de cette hausse de la demande sans saccager la planète, la Banque Mondiale incite les pays riches en ressources à l’anticiper. Notamment, elle les invite à adopter des stratégies de long terme pour investir judicieusement. Et définir des mécanismes appropriés pour préserver les populations locales et l’environnement.
«S’ils développent leur secteur minier de façon durable, les pays qui disposent des capacités et des infrastructures pour fournir les minéraux et les métaux nécessaires aux technologies propres auront une occasion unique de dynamiser leur économie », prévient Riccardo Puliti, directeur du pôle mondial d’expertise en énergie et industries extractives de la Banque mondiale. Pour se positionner, ces pays devront parfaitement connaître le marché, et utiliser ces données pour élaborer des plans de développement, planifier des investissements et concevoir des activités durables. Pour que l’intensification des activités d’extraction et de production aient le moins d’impacts sur l’eau, les écosystèmes et les populations.
Quelle région pour quels métaux ?
Selon les auteurs, l’Amérique Latine pourrait jouer un rôle essentiel pour fournir le cuivre, le fer, l’argent, le lithium, l’aluminium, le nickel, le manganèse et le zinc nécessaires. L’ Afrique australe et la Guinée joueraient leur rôle pour le platine, le manganèse, la bauxite et le chrome.
Les sols de la Chine sont riches pour l’ensemble de ces métaux essentiels. Le pays restera un acteur de premier plan. L’Inde jouerait un rôle majeur pour le fer, l’acier et le titane. De leurs côtés, l’Indonésie, la Malaisie et les Philippines auraient des opportunités pour la bauxite et le nickel. Les réserves découvertes en Nouvelle-Calédonie pourraient aussi fournir du nickel en quantité.
Des évolutions avant tout liées aux technologies
L’évolution de la demande en différents matériaux dépendra des politiques menées. Et ainsi du nombre d’éoliennes, de panneaux solaires et de véhicules électriques fabriqués. Mais elle sera avant tout menée par les choix technologiques qui seront retenus au niveau mondial. Ces derniers définiront le marché des matières premières sur les cinquante prochaines années, prévient l’étude. Par exemple, les trois principales catégories de véhicules alternatifs ont des impacts différents sur la demande de métaux. Si les véhicules électriques ont besoin de lithium, les véhicules hybrides préfèrent le plomb et les véhicules à hydrogène le platine.
Les auteurs notent que cette étude est un premier pas pour sensibiliser les différents acteurs à travailler ensemble. Ils évoquent bien évidemment d’autres secteurs à prendre en compte pour de futures études, notamment les transports, les bâtiments, l’industrie et l’usage des sols.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
Cet article se trouve dans le dossier :
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