Si ces véhicules de niveau 2 sur l’échelle SAE laissent l’entière responsabilité de la conduite au conducteur, ils lui offrent plus de confort et de sérénité. Ainsi le rôle du conducteur évolue pour se concentrer plus sur des tâches de supervision.
Luc Bourgeois, expert leader ADAS/AD au sein du Groupe Renault, revient pour Techniques de l’Ingénieur sur cette évolution.
Il nous explique également ce qui sépare encore les constructeurs de la mise en circulation de véhicules autonomes de niveau 3, lesquels permettront au conducteur de déléguer la conduite au véhicule, sous certaines conditions. Ce que le niveau 2 ne permet pas.
Techniques de l’Ingénieur : Quelle est l’offre actuelle de Renault en termes de véhicules ADAS ?
Luc Bourgeois : Renault déploie des ADAS depuis plusieurs années maintenant. Notre offre se décline autour de trois grandes domaines : la sécurité, le confort et les aides à la manœuvre.
Prenons deux exemples. Avec notre Assistant Autoroute et Trafic, qui est un ADAS de niveau 2, le système gère à la fois le contrôle longitudinal et le contrôle latéral: il adapte la vitesse du véhicule, jusqu’à l’arrêt complet, en fonction du véhicule devant lui et maintien son centrage dans sa voie. Le tout de manière coordonnée. Tout ceci est possible grâce aux capteurs embarqués, que sont les caméras et les radars principalement.
Dans le domaine des aides à la manœuvre, Renault propose par exemple des vues à 360° pour l’aide au parking, en plus des dispositifs de détection à base d’ultrasons.
Ces innovations font-elles évoluer le rôle du conducteur ?
Il faut bien garder à l’esprit que le conducteur, même avec l’assistance de ces ADAS évoluées de niveau 2, est toujours responsable de la conduite. Mais, son rôle évolue. Pour vous donner un exemple : Quand vous n’avez pas de régulateur de vitesse dans votre véhicule, vous allez vérifier le compteur de vitesse environ dix fois par minute. Ces contrôles fréquents font quitter la route des yeux et entraînent une fatigue, oculaire notamment. Avec des ADAS évolués de niveau 2, cette vérification n’est plus nécessaire. Le conducteur est alors amené à passer plus de temps à la supervision de la scène de conduite qu’à la conduite elle-même. Cela apporte plus de sérénité au conducteur et aussi plus de sécurité, pour lui et les autres usagers de la route.
D’ailleurs, on mesure aujourd’hui des gains substantiels en termes de sécurité routière liés au déploiement des ADAS, c’est important de le préciser.
Pour autant, s’il a plus un rôle de supervision de l’environnement de conduite grâce aux ADAS de niveau 2, le conducteur reste responsable de la conduite..
Qu’est-ce qui nous sépare du niveau 3 d’autonomie, qui permet au conducteur de déléguer la conduite au véhicule sous certaines conditions ?
A partir du niveau 3 en effet, on peut offrir au conducteur ce que l’on appelle une délégation de conduite. Dans ce cas, le conducteur peut utiliser un mode qui lui permet de sortir des tâches de conduite et de la surveillance de la scène de conduite, sous certaines conditions. Aucun constructeur ne le propose aujourd’hui, mais tout le monde y travaille.
A partir des fonctions ADAS de niveau 3, il faut considérer ce qu’on appelle l’ODD (Operational Domain Design) : c’est le domaine de fonctionnement dans lequel on va autoriser un véhicule à proposer un moment de délégation de conduite. Aujourd’hui nous travaillons sur des ODD limités : routes à voies séparées, trafic assez dense et vitesse limitée. Du coup, ces ADAS permettront de proposer des moments de délégation de conduite. On ne parle pas pour le moment d’ADAS qui offriront une délégation de conduite à n’importe quel moment, mais uniquement dans les zones où les conditions de fonctionnement de l’ADAS sont réunies garantir la sécurité.
Revenons sur les ADAS de niveau 2. Quelles sont les innovations à venir ?
Pour améliorer encore le confort, la sécurité et les émissions de CO2 à l’usage, il faut mieux anticiper les situations routières. Concrètement, les systèmes de bord doivent comprendre encore mieux et les caméras « voir » plus loin ce qui se passe autour du véhicule. Aujourd’hui, les capteurs « voient » à environ 200 mètres autour de la voiture, 400 mètres pour les caméras. Cette distance n’est pas toujours suffisante pour anticiper des situations, notamment celles liées au vecteur énergétique du véhicule. Sur autoroute, à 130 km/h, en cas de freinage, il est préférable que la distance de perception des capteurs soit plus importante, afin de mieux appréhender les situations. Cela permet au véhicule d’adapter son freinage, et permet des économies très importantes en matière d’émissions polluantes des véhicules, en plus de l’aspect sécuritaire.
Pour doter les véhicules de ces capacités d’anticipation, on les connecte. Dans les mois et les années qui viennent vont se développer des connectivités, de véhicule à véhicule, et entre le véhicule et l’infrastructure autour de lui. L’amélioration de la capacité du véhicule à pouvoir identifier son environnement lui permettra, pour reprendre l’exemple du freinage, de beaucoup plus anticiper – un virage, un stop, un ralentissement du trafic – pour adapter ses actions.
Sans parler de la connexion avec les autres véhicules où avec l’infrastructure autour du véhicule, l’amélioration de la connectivité du véhicule lui-même permet déjà de proposer des ADAS innovants. Aujourd’hui, à travers une cartographie connectée et mise à jour régulièrement, on peut avoir une connaissance de la géométrie des cartographies routières. C’est un outil très puissant pour améliorer l’aide à la conduite et l’efficience des véhicules.
Propos recueillis par PierreThouverez
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