Dans un rapport, la Cour des comptes constate que l’État ne se préoccupe pas suffisamment des gains de productivité obtenus lors de la numérisation des services publics. Elle recommande de procéder systématiquement à des études d'impact et de retour sur investissement de chaque projet de transformation numérique et de tirer parti de l'IA.
Depuis le début des années 2000, la numérisation des services publics a représenté un véritable levier pour réformer l’État. Elle a profité aux usagers, qui peuvent à présent effectuer leurs démarches de manière plus efficace grâce aux plateformes en ligne. Les agents de l’État ont également bénéficié de cette transition, en facilitant leur travail au quotidien. Mais comment l’arrivée de ces outils numériques se traduit-elle en termes de gains de productivité au sein des administrations ? La question est importante, dans un contexte où l’État doit lui aussi consentir à des efforts pour redresser les finances publiques. La Cour des comptes vient de publier un rapport pour faire le point sur ce sujet.
Le bilan est pour lui moins critique, puisque les magistrats considèrent que les gains de productivité liés au numérique ne sont pas une préoccupation mise en avant par les services de l’État. Il faut dire que les mesurer est complexe, car l’administration publique ne dispose pas de prix de marché pour ses services. Pourtant, depuis 2001, la LOLF (Loi organique relative aux lois de finances) a instauré une démarche de performance dans la manière de conduire les administrations. Mais les sages de la rue de Cambon notent que « moins de 2 % des indicateurs de la LOLF mettent en regard une production administrative et les moyens alloués. »
Créé en 2017, le Fonds de transformation de l’action publique (FTAP) a lui aussi fait des gains de productivité un critère central de décision de financement des projets. Sauf que là encore, il apparaît que « l’évaluation des gains en amont (réduction des effectifs, baisse des coûts de fonctionnement, augmentation des recettes) réalisée par la direction chargée de la maîtrise d’ouvrage apparaît souvent lacunaire ou théorique. » Depuis 2019, la Direction interministérielle du numérique (Dinum) a été créée pour accompagner et faire réussir les projets numériques de l’État, mais « les gains attendus, et notamment ceux de productivité, ne font presque jamais l’objet de constats ou de recommandations dans ces avis. »
Exploiter de nouveaux gisements de gains de productivité grâce à l’IA
Face à cette situation, la Cour des comptes préconise de procéder systématiquement à des études documentées d’impact et de retour sur investissement des grands projets numériques de l’État, puis d’assurer leur suivi en termes de qualité de service et d’économies attendues. Pour cela, elle conseille de disposer d’indicateurs analytiques suffisamment précis pour identifier les gains de productivité. Dès la phase de cadrage des projets numériques, les magistrats proposent de renforcer la procédure existante d’avis conforme pilotée par la Dinum afin d’intégrer des enjeux de méthodologie et de productivité.
Les Sages de la rue de Cambon recommandent aussi de « tirer parti de l’intelligence artificielle pour exploiter de nouveaux gisements de gains de productivité. » Le rapport cite de nombreuses tâches que peut potentiellement effectuer cette nouvelle technologie : résumer et synthétiser des informations, aider à la décision sur la définition de politiques publiques, améliorer la qualité et l’efficience des services, générer des contenus, apporter assistance et support aux usagers (chatbot), et enfin optimiser les développements logiciels dans les projets numériques de l’État.
Un exemple réussi de gains de productivité obtenus suite au déploiement d’une IA au sein de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) est d’ailleurs cité dans le document. L’objectif initial était de repérer les dépenses de l’État présentant des risques d’irrégularité. Un traitement automatisé de l’analyse prédictive (TAAP) a donc été mis en place et cible de manière automatique les factures qui seront contrôlées par les agents comptables. Trois ans après son arrivée, ce nouvel outil a permis de réduire le nombre de contrôles de 32 % tout en multipliant par 5 le taux d’erreur détecté. « Le logiciel est donc un auxiliaire performant des services comptables », analysent les magistrats.
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