Pour Microsoft, l’heure est aux synergies et à l’interopérabilité. Sa suite bureautique Office est disponible sur iOS et Android, mais aussi accessible n’importe où avec le Cloud Computing (Office 365). De son côté, Azure est compatible avec la plupart des éditeurs tiers, que ce soit SAP, SalesForces, Oracle ou encore Cisco.
L’époque où chaque entité de Microsoft travaillait dans son coin est révolue (les équipes de Windows ne collaboraient pas avec celles de Windows Phone…). La fameuse convergence implique une collaboration étroite entre les tous les services, qu’ils soient internes ou externes à la firme de Redmond.
L’époque des affirmations tonitruantes de Steve Ballmer est également révolue. Le CEO de l’entreprise de 2000 à 2014 n’avait pas hésité à déclarer en 2005 que « Google n’est pas une vraie entreprise, c’est un château de cartes ». Affirmation pertinente également en 2007 lorsqu’il déclarait : « aucune chance pour que l’iPhone atteigne une part de marché significative ».
Directeur général de Microsoft (118.000 employés) depuis 2014, Satya Nadella avance plus discrètement, mais efficacement. Il avance méthodiquement ses pions sur l’échiquier du web mondial. Son dernier coup, l’acquisition, le 13 juin, du réseau social LinkedIn (433 millions d’utilisateurs inscrits, un chiffre d’affaires de 2,99 milliards de dollars en 2015, en croissance de 35 % sur un an, mais 150 millions de dollars de pertes). En dépensant 23,2 milliards d’euros, Microsoft entend renforcer les synergies entre les différents outils professionnels.
« Au cours de la dernière décennie, nous avons fait passer Office d’une suite d’outils dédiés à la productivité à un ensemble de services disponibles dans le cloud et sur toutes les plates-formes. Nous pouvons réinventer les façons pour les professionnels d’être plus productifs », a expliqué Satya Nadella.
L’un des objectifs de Microsoft sera de transformer ce réseau social en une source d’informations et d’interactions interne aux entreprises. Les professionnels pourront par exemple travailler depuis leur bureau, ou chez eux, sur Word, mais aussi appeler sur Skype (racheté par Microsoft en 2011) à partir de leur profil LinkedIn. Avant un rendez-vous professionnel, LinkedIn leur affichera le CV de leur interlocuteur et les potentiels points communs. Autre synergie en vue : l’intégration de l’offre de formations en ligne de Lynda (racheté par LinkedIn en 2015) à la suite bureautique Office.
Autant de nouveaux usages qui renforceront les divisions professionnelles de Microsoft.
Entamé depuis deux ans, ce recentrage vers les entreprises porte ses fruits et permet d’atténuer la baisse des ventes mondiales de PC passées de 363 à 276 millions d’unités entre 2011 et 2015. En 2015, son chiffre d’affaires a atteint 20,379 milliards de dollars et son bénéfice net s’approche des 5 milliards (4,620 milliards).
Certes, la division More Personal Computing (Windows) plombe ses résultats (même si les recrutements d’abonnés au Xbox Live ont progressé de 28 %). Ce sont les outils professionnels qui assurent l’essentiel des revenus. L’unité Productivity and Business Processes, avec notamment Office 365 (3 millions de nouveaux utilisateurs sur le dernier trimestre 2015…), reste attractive. Mais c’est la division Intelligent Cloud qui est devenue le principal moteur de Microsoft. Azure séduit de plus en plus les professionnels tandis que les produits cloud et serveurs progressent de 13 %.
Ces bons résultats ne permettent pas pour autant d’oublier les échecs du géant américain. Malgré le rachat de Nokia, Microsoft reste très loin derrière Google et Apple. Le cabinet d’analyses IDC prévoit même des ventes en chute libre de 61 %, pour une part de marché de 0,8 % en 2016… En un an, les livraisons de smartphones sous Windows Phone sont passées de 8,2 à 2,39 millions. Google avec Android s’octroie 84,1 % des terminaux livrés au cours du premier trimestre 2016 (293,7 millions d’unités). Apple perd du terrain avec 51,6 millions de smartphones écoulés et une part de marché de 14,8 %.
Le navigateur Internet Explorer est également en chute libre, concurrencé principalement par Google avec Chrome. Même sur son principal marché, Microsoft rencontre des difficultés. Vista avait était un bide et Windows 8 n’a pas réussi à convaincre les particuliers, mais aussi les entreprises. Avec Windows 10, l’éditeur mise là aussi sur la convergence et le développement d’un écosystème. Des applications déjà existantes sur d’autres plates-formes peuvent être adaptées pour fonctionner sous Windows 10.
Microsoft n’a pas réussi non plus à damer le pion de l’iPod d’Apple avec son baladeur Zune. Même constat avec les tablettes Surface qui n’ont pas réussi à s’imposer malgré d’indéniables qualités (surtout le dernier modèle).
En sera-t-il de même avec HoloLens ? L’entreprise ambitionne de devenir le leader de la paire de lunettes de la réalité augmentée. Cette fois, elle change de stratégie. Elle a lancé un grand concours pour attirer des concepteurs/développeurs afin de proposer des applications innovantes.
Par Philippe Richard
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